Groenland est, fjord de Sermilik
Onze ans après un premier voyage
dans la baie de Disko, j’ai souhaité retourner au Groenland pour en
visiter cette fois-ci la côte est. Côte dont j’avais pu avoir un très
bref aperçu lors de son survol à l’aller, et qui m’avait impressionné
par son aspect sauvage et accidenté ainsi que par son
extraordinaire enchevêtrement de glaciers. C’est d’ailleurs à l’est de
l’île se trouvent les « Alpes groenlandaises », dont l’un des sommets
les plus connus, le mont Forel, culmine à 3383 m (il est situé à une
centaine de kilomètres au nord du fjord de Sermilik).
Disons-le tout de suite, ce voyage m’a un peu laissé sur ma faim, car
l’ambiance polaire que j’ai pu y trouver, certes absolument remarquable
et très dépaysante, était toutefois sans commune mesure avec ce bref
aperçu aérien de 2003. Il faut dire que la logistique d’un voyage au
Groenland est très complexe, la glace dérivante rendant aléatoire toute
navigation et quasiment impossible, par exemple, l’approche du
point de vêlage des glaciers. Il est notoire que la manière la plus
adaptée de visiter le Groenland, c’est le kayak et l’évolution en
autonomie. N’étant pas très motivé par ce genre d’expédition, je me suis
contenté d’un trek plus classique où il était prévu de
randonner de façon itinérante pendant que nos affaires
suivraient en bateau. En pratique, ce programme s’est concrétisé par
trois camps montés successivement à proximité de l’unique village du
secteur, Tiniteqilâq, d’où nous partions à la
journée pour des balades d’intérêt inégal. Cela étant, le secteur est très
spectaculaire, bien plus accidenté que la baie de Disko, et les icebergs
du fjord Sermilik, sans être peut-être aussi nombreux, sont largement
aussi massifs que ceux d’Ilulissat. Et puis la météo
s’est montrée particulièrement clémente, encore plus que lors de mon
précédent voyage.
L’itinéraire aérien pour gagner l’est du Groenland diffère de celui de l’ouest : on ne passe ni par le Danemark ni par la
plateforme aéroportuaire de Søndre
Strømfjord, mais par l’Islande où il est nécessaire de descendre en
ville. J’ai dû voyager séparément du reste de mon groupe,
moyennant une escale à Londres dont je me serais bien passé, et dont je
serai curieusement épargné au retour. Nous étions le 5 juillet (2014),
le vol avait lieu en soirée et le soleil venait de se coucher. Mais
sitôt décollés de Londres, voilà que l’astre se relève à l’ouest, pour
ne (quasiment) plus disparaître. Lorsque j’aurai rejoint l’hôtel dans le
centre de Reykjavík, à 1h du matin, il fera toujours jour ! J’ai
quand même dû me coucher à tâtons pour éviter d’importuner mon compagnon
de chambre, arrivé plusieurs heures auparavant et dont je ne verrai le
visage que le lendemain. C’est aussi le lendemain matin qui j’ai pris
à l’eau sulfurée une douche qui devait être la première… et aussi la
dernière de tout le voyage !
Si l’agence a dû nous payer cette onéreuse nuit en Islande,
c’est que nous devions décoller le
lendemain d’un autre aéroport. Car peu de gens le savent,
mais c’est de deux aéroports qu’est dotée cette pourtant minuscule capitale qu’est
Reykjavík. L’aéroport de Keflavík, situé à 40 km à l’ouest de la ville,
est celui par lequel débarquent les hordes de touristes — les choses ont en effet beaucoup
changé depuis mon voyage
dans ce pays (1995), à l’époque une destination plutôt confidentielle ;
depuis la crise financière de 2008, qui a beaucoup secoué le pays, l’Islande mise
fond sur le tourisme. Le second aérodrome,
situé tout près du centre-ville, est normalement dévolu aux vols
intérieurs. Ces derniers ne sont toutefois pas légion en Islande faute
de destinations possibles : la
capitale Reykjavík, concentrant la moitié de la population du pays,
étant déjà peu de chose, c’est dire que les autres localités
sont des trous. L’aérodrome de Reykjavík est donc également utilisé pour les
liaisons avec l’est du Groenland ainsi que vers les îles Féroé.
Deux heures de vol séparent Reykjavík de la piste de Kulusuk, unique point d’accès à la côte orientale du
Groenland : le brouillard et le fait que je
sois assis du mauvais côté de l’appareil m’empêcheront d’apercevoir quoi
que ce soit du paysage. En dehors de notre groupe, tous les passagers
du vol étaient asiatiques : des touristes d’un genre étrange qui ne
viennent que pour la journée au Groenland, ne s’éloignant pas des
parages immédiats de l’aéroport. D’après Jean-Louis notre guide, ce sont eux qui
font vivre la ligne. C’est vrai qu’une fois sorti du minuscule bâtiment
qui tient lieu d’aérogare, on est tout de suite dans l’ambiance. Kulusuk
est bâti sur une île et les bras de mer qui entourent le site sont
parsemés d’icebergs. En arrière-plan, les montagnes groenlandaises
couvertes de glaciers. La température est aussi nettement plus fraîche
qu’en Islande (même si elle ne descend jamais sous zéro en été). À
l’intérieur de l’aérogare, dans chacune des salles d’embarquement et
de débarquement, deux gigantesques peaux d’ours polaires sont pendues en guise de
trophées. Ces deux fauves ont été abattus dans les années 1990… devant
l’entrée du bâtiment !
Ayant atterri sur une petite île, le voyage se poursuivait
naturellement en bateau. 800 mètres séparent l’aéroport de Kulusuk de
l’embarcadère, et aucun véhicule n’avait été loué par l’agence. C’est
donc à pied que nous avons parcouru cette distance, portant non
seulement les bagages, mais tout le matériel de bivouac et les stocks de
nourriture. Il a fallu faire trois voyages. Pour ce qui est de
l’embarcation, il ne s’agissait pas d’un petit brise-glace comme à Ilulissat,
mais de deux hors-bords se déplaçant à grande vitesse. C’est d’ailleurs
exclusivement en raison de la température ressentie sur ces
embarcations que nous avions, préalablement à ce voyage, loué des
équipements grand froid (les températures réelles,
toujours positives à cette saison, n’auraient
pas sans cela nécessité un tel matériel).
La mer était parsemée de glaces dérivantes : non des icebergs, mais
des fragments de banquise ramenées par les
courants marins venant du pôle nord. C’est tout à fait habituel en cette
saison, et cela complique énormément la navigation, les petites
embarcations étant facilement bloquées par les glaces. Il y a d’ailleurs
paraît-il au Groenland, outre les prévisions météorologiques telles que
nous les connaissons, une météo des glaces dévolue à la prédiction de
l’obstruction par la banquise des fjords et des bras de mer. Comme nous
le verrons, ces glaces vont impacter énormément le déroulement de ce
voyage qui s’écartera assez fortement du programme prévu. Mais cela
aurait pû être pire : notre guide a raconté avoir été bloqué pendant
plusieurs jours sur l’île de Kulusuk, l’amoncellement de glaces
empêchant tout accostage des embarcations !
Chose étonnante, le pilote d’un des petits bateaux était français :
Michel, installé avec son frère Max et depuis 20 ans dans le village de
Tiniteqilâq et y vivant
à l’année : il faut quand même le vouloir. Michel était instituteur
dans l’école du village, poste qui nécessite de maîtriser parfaitement,
non seulement l’anglais, mais aussi le danois et le groenlandais. Michel
était propriétaire de son embarcation et en prenait
de toute évidence bien mieux soin que les autochtones (pour qui, bien
souvent, c’est l’État danois qui subventionne le matériel). Inconvénient
pour nous, sa moins grande témérité (pour ne pas dire sa frilosité) à
nous emmener dans des endroits un peu chargés en glace.
Deux heures de navigation (pour une cinquantaine de kilomètres) nous
attendaient avant de rejoindre notre premier camp situé dans le fjord de
Kûgarmit. Nous avons contourné la grande île d’Angmagssalik, île qui
abrite
Tasiilaq, le plus gros bourg de la côte est du
Groenland (2000 habitants, c’est quand même très raisonnable !). Puis
nous avons remonté entièrement le fjord Ikâsagtivaq. Les paysages, très
accidentés avec des pics dotés de petits glaciers, sont bien plus
spectaculaires que ceux de la côte ouest. Ci-dessous, des montagnes près
desquelles nous aurons l’occasion de randonner dans la suite du voyage.
Nous avons débarqué puis installé le camp au bord du petit fjord
susnommé, situé à vue de Tiniteqilâq, le village autour duquel
s’articulera l’ensemble de ce voyage. Après l’installation du camp, nous
avons eu quartier libre pour l’après-midi ce qui nous a permis d’aller
un peu explorer les environs.
Cette escapade nous a à moment permis d’apercevoir la calotte «
continentale » du Groenland (contrairement à mon voyage de 2003,
celui-ci ne prévoyait pas d’incursions sur l’inlandsis).
Le dîner a traîné en longueur : encore proches du solstice (6
juillet), mais situés en-deçà du cercle arctique, nous n’avons pas pu
observer le soleil de minuit. Néanmoins, le soleil ne se couche pas
avant 23 h, et la nuit n’est jamais noire, rendant le masque obligatoire
pour dormir. À 4h du matin, le plein soleil illumine la tente, mais il
est encore trop tôt pour se lever. Il faut se découvrir (le duvet grand
froid en location, utile au creux de la nuit, devient à ce moment
insupportable), et on peine à se rendormir. De manière générale, on ne
dort pas très bien au Groenland.
Au réveil le lendemain matin (ainsi que le jour suivant) nous avons
pu apercevoir et même photographier un renard polaire. Il faut
d’ailleurs faire attention à ne rien laisser hors des tentes, car les
renards peuvent attraper ce qui sent l’homme, par exemple les
chaussures. Souvent les renards dévoreront nos déchets alimentaires.
Nous avons effectué ce jour une marche au fond de la vallée de
Kûgarmîtavqutâ, vallée qui monte en pente douce jusqu’à un col donnant
ensuite accès à la ville de Tasiilaq. Cette randonnée s’est avérée la plus longue du voyage, mais non la plus intéressante.
Nous avons eu droit à quelques pauses botanique…
Quelques pauses géologie aussi. Cette trace visible sur un rocher a
été provoquée par le choc d’un bloc de roche encastré sous un glacier.
On rencontre quelques névés et quelques lacs.
Un franchissement de torrent un peu périlleux…
La vue depuis le col (la seconde photo montre l’autre versant).
Retour à travers les champs de neige.
En arrivant au camp, une surprise : la tente mess était par terre,
suite aux rafales de vent (pourtant nous n’avions pas tellement ressenti
le vent pendant la randonnée).
Le soir nous avons pour la première fois goûté à l’omble chevalier,
un excellent poisson qui à l’instar du saumon remonte les cours d’eau à
partir des fjords. Celui-ci avait été pêché dans l’un des lacs
rencontrés pendant la randonnée. L’omble chevalier, visiblement assez
facile à attraper, sera l’un de nos mets de choix pendant ce voyage.
Il y avait quand même un petit désagrément au cours de ces repas
arctique : l’invasion absolument démentielle des moustiques. Leurs
piqûres sont heureusement moins urticantes que celles de leurs
congénères de nos contrées. Pour s’en protéger, Jean-Louis avait sorti
un serpentin mais cela n’est pas suffisamment efficace. Aussi a-t-il dû
recourir à l’arme de destruction massive : la raquette électrique. De
la taille d’une raquette de tennis et munie d’une pile d’1,5 V, il
suffit de la promener dans l’air pour griller tous les moustiques
rencontrés au passage ! La destruction s’accompagne en général d’une
étincelle voire d’une odeur de brûlé, l’objet est plutôt jouissif à
utiliser ! Je me l’étais accaparée et ai beaucoup fait usage de la raquette électrique pendant ce
voyage.
C’est à partir du jour suivant que, malheureusement, nous avons cessé
de suivre le programme prévu. Nous avons traversé le fjord en bateau,
pour gagner le village au terme d’une assez courte randonnée.
Nous avions une belle vue sur les pics enneigés du secteur (glacier de Nîniartivaraq).
Premières vues de Tiniteqilâq, le cadre est magnifique, nous ne dirons pas le contraire.
Outre le fjord de Kûgarmit, Tiniteqilâq donne sur le plus important
fjord de la région, celui de Sermilik, grand convoyeur d’icebergs géants
à l’instar de l’Isfjord
de Jabobshavn. Les icebergs se déplacent, montant ou descendant le fjord en
fonction des marées (en dépit de leur taille et leur proximité du rivage
ils ne sont pas échoués).
Les morceaux de banquise venant du large empêchent la sortie des
icebergs, ce qui peut obstruer le fjord et empêcher toute
navigation. Nous aurons l’occasion de revoir en long et en large (et même, finalement, de
traverser), le fjord Sermilik et ses icebergs.
On peut voir que les maisons du village sont construites en bois, à l’instar des villages de l’ouest du Groenland comme Sarqaq.
L’architecture traditionnelle en tourbe est abandonnée, mais les plus
anciens du village se souviennent de l’avoir encore utilisée pendant la
guerre.
Nous avons croisé très peu de monde pendant notre visite du village.
Ici le cimetière, protégé par une clôture pour éviter que les
chiens ne déterrent les corps. En hiver, les corps ne sont pas enterrés
car le sol gelé ne le permet pas ; on les entrepose dans un hangar et la
cérémonie d’inhumation a lieu au printemps.
Nous sommes ensuite passés par la maison de Max, le frère de notre
pilote Michel. Marié à une Japonaise, Max fabrique et vend des objets
pour les touristes.
Beaucoup de chiens de traîneau dans le village, lesquels sont
systématiquement attachés à l’exception des chiots. Mieux vaut ne pas
s’en approcher ! (Les chiens ne sont nourris que deux fois par semaine
en été). Le traîneau à chien reste le moyen le plus sûr de se déplacer
sur la banquise en hiver, les motoneiges risquant de passer à travers la
glace. La race de chiens de traîneau groenlandaise est la seule
autorisée sur l’île, les croisements sont interdits ; pas de toutou à sa mémère
au Groenland !
Beaucoup des habitants de Tiniteqilâq ont du reste conservé un mode
de vie traditionnel, vivant de la pêche au phoque et au narval. Ils
perçoivent néanmoins un « salaire » de l’état danois qui leur permet de
se payer des bateaux (bateaux dont ils ne prennent d’ailleurs pas le
plus grand soin). Le gouvernement danois fixe aussi les quotas de pêche
et de chasse pour le village : par exemple, 2 ours blancs par an. Ils
ont également droit à une baleine, mais le village n’est pas équipé pour
chasser la baleine.
On trouve, comme on peut le voir, de nombreux produits de la chasse
autour des maisons. Il faut notamment faire très attention à la graisse
de phoque répandue sur les cailloux, très tenace et malodorante sur les
vêtements. Il est vivement déconseillé de s’assoir !
On trouve aussi, dans le village : un supermarché (bien pourvu en produit frais en provenance de contrées
exotiques. Également, des bains-douches dans lesquels les habitants du village se lavent tous les jours (ce qui n’a pas été notre
cas…). Enfin, l’école où enseigne notre pilote Michel.
Le village vu d’en haut, à proximité d’une cabane que les autorités
municipales ont fait construire dans le but de loger des touristes. Mais
beaucoup de ces derniers sont des Américains obèses bien incapables de
monter jusque là !
Nous avons repris le bateau pour gagner le camp du soir, plus près du
glacier de Nîniartivaraq. C’est le camp que j’ai préféré, quoiqu’il ne soit pas
très ensoleillé.
Le temps était couvert le lendemain matin, pour la première fois du
voyage. Nous avons effectué une balade en aller-retour qui constituait
en fait la première étape du trek initialement prévu. Nous avons longé
de grands lacs (dans lesquels seraient pêchés au retour plusieurs ombles
chevaliers de taille respectable) ; nous avons ensuite franchi un
petit col.
On aura remarqué sur la dernière photo, la personne équipée d’un
chapeau moustiquaire. J’avais fait de même (ce qui pour marcher n’est
pas très pratique).
Ici le fjord de Paornakajît qui constituait le but de cette balade.
C’est par là que nos bateliers auraient dû amener le matériel pour
monter le camp du soir, si le voyage s’était déroulé comme prévu.
Évidemment on ne peut pas deviner de ce point, si l’accès est ou non
obstrué.
Retour avec une légère variante de l’itinéraire. Cette
montagne pointue qui rappelle vaguement le Cervin (à moins que ce ne
soit la dent d’Hérens, il ne faut pas trop en demander…) s’appelle en
réalité le Paornartivartik. Cela veut dire le museau du phoque ou
quelque chose de ce genre. À l’instar de l’allemand, les noms
groenlandais sont construits en accolant des substantifs.
Le lieu de la pêche miraculeuse. Ainsi que nous l’a expliqué le guide
(et qu’on peut le deviner sur la photo), c’est un lac où se mélangent
des eaux, certaines plus chargées en alluvions venant du glacier de
Nîniartivaraq (celui dont nous nous approcherons le jour suivant).
Les ombles chevaliers peuvent être tout aussi facilement pêchés dans
le fjord, comme c’est le cas sur la troisième photo prise la
veille (photo : C. David).
Le retour vers le camp à la fin de la balade.
C’est le lendemain que nous avons effectué la plus belle randonnée du
séjour, celle qui nous a permis de nous approcher du glacier de
Nîniartivaraq et des pics escarpés qui l’entourent, «la montagne aux
airs de Fitz Roy » pour paraphraser la fiche technique. Cette excursion
débutait par un court trajet en bateau nous amenant un peu plus loin sur
le fjord. Ensuite, montée jusqu’à l’altitude de 325 m face au glacier,
puis retour en franchissant d’abord un col ainsi que, juste avant
l’arrivée, un torrent assez puissant.
Nous avons pourtant craint le matin que la balade ne se fasse
pas car de lourds nuages obstruaient le fjord. Mais notre guide n’était
pas inquiet, certain qui ne s’agissait que de brumes matinales.
Effectivement, quelques instants à peine séparent ces deux photos.
Début de randonnée au-dessus du fjord (ce torrent bien sûr n’est rien à côté de celui qui nous attend).
On jouissait déjà d’une magnifique vue sur la calotte et sur le fjord Sermilik.
Arrivée au belvédère sur le glacier. 325 m d’altitude et l’ambiance est déjà franchement à la haute montagne !
(Nous avions une charmante présence dans le groupe : elle s’appelait Alexandra, et elle n’avait pas vingt ans).
Photos des montagnes et du glacier, en large et en travers (j’attends
toujours que le dénommé Jean-Paul me fasse parvenir son cliché). Ledit
glacier a, comme il sied, beaucoup reculé.
L’étrange acrobatie de la quatrième photo
fait suite à une séance de « gorillapode », le langage codé
que nous avions adopté pour désigner les photos de groupe qui furent
nombreuses dans ce voyage (mais là aussi, seul un très petit nombre de ces
clichés me sont parvenus, n’incluant pas celui-ci).
Quelques photos de la courte descente qui a
suivi, puis de la montée vers le col, assez malaisée à travers les
éboulis. (À la fin, il y avait des dalles en pente douce puis des
névés).
Le col (alt. 400 m environ), dans une ambiance montagnarde.
Sur l’autre versant, on pouvait apercevoir un glacier plat (certes bien moins spectaculaire que le précédent).
Nous nous demandions si c’était Julie Gayet que Jean-Paul avait
aperçue dans son téléobjectif. (Pareil matériel dans un sac à dos, cela
doit quand même peser !).
Sur la photo de droite, du pavot arctique (enfin, c’est ce que j’ai noté mais j’ai maintenant un doute).
Une photo dont je me sers volontiers comme fond d’écran :
Et le premier panoramique du voyage :
Nous avons descendu une grande partie du col en ramasse par les
névés, c’est beaucoup plus facile. Certains se croyaient à Courchevel…
A suivi la traversée de torrent à laquelle nous
étions préparés psychologiquement dès le matin. Il s’agissait davantage
d’une rivière que d’un torrent, assez large (plusieurs bras d’une bonne
vingtaine de mètres) et un courant assez fort. Il a fallu enfiler les
sandales et ôter les bas de pantalon (enfin, presque tout le monde…),
et la température de l’eau était, disons, vivifiante. Je n’ai évidemment
pas pris de photos de la traversée, l’appareil étant à l’abri au fond
du sac. Nous n’aurons pas d’autres passages à gué pendant ce voyage.
L’arrivée au camp (le même que la veille) et cette étonnante image de
marée basse avec arrière-plan montagnard. Nous n’étions plus
seuls dans les parages : un important groupe d’Allemands s’était établi à
deux cents mètres de notre camp. C’était heureusement la dernière nuit
que nous passions à cet endroit (et la finale du foot, ce n’était pas ce
soir là).
Contrastant avec cette longue randonnée, la journée suivante a
été consacrée à une navigation contemplative au milieu des icebergs géants du
fjord Sermilik (normalement prévue quelques jours plus
tard, après le retour du camp de Parnagaï devant constituer la fin
du trek). Avant de gagner le fjord, nous avons fait une nouvelle halte à
Tiniteqilâq que j’ai trouvée interminable.
Ensuite le bateau s’est donc promené pendant plusieurs heures et à
très petite vitesse parmi les icebergs. J’en ai pris des dizaines de
photos, même si je savais que les photos de ce genre s’avèrent in fine
répétitives — c’était en tout cas l’impression qui
m’était restée de mon premier voyage au Groenland où la grande majorité
de mes clichés (pourtant beaucoup moins nombreux car il s’agissait à
l’époque de diapositives) montraient des icebergs. Deux particularités
toutefois rendent mes photos de Sermilik plus intéressantes que celles
d’Ilulissat : l’arrière-plan montagneux d’une part, et surtout la mer
véritablement d’huile, donnant lieu à de très photogéniques reflets des
glaces.
Nous avons aussi eu la chance de voir émerger quelques phoques.
Ouf ! Et je vous assure que j’ai vraiment condensé…
Nous avons finalement établi sur l’île d’Angmagssalik le troisième et
dernier camp du voyage. Nous allions y rester cinq nuits, telles des
moules collées à leur rocher : c’est paraît-il la métaphore un tantinet
péjorative qu’avait employée au retour de voyage, dans la fiche
d’évaluation,
une cliente d’une précédente édition. Je ne lui
donne pas tout à fait
tort, la moitié du voyage passée en cet endroit c’est tout de même
beaucoup. Du reste, j’ai trouvé que l’intérêt des balades effectuées
depuis ce camp (à l’exception notable de l’excursion dans le fjord
Petersen)
allait en décroissant avec le temps qui passait. Le campement était
installé
sur une presqu’île assez plate, un endroit pas si folichon que cela et
dépourvu de source.
Seul intérêt du lieu (certes appréciable mais fort semblable d’un soir
à l’autre) : le crépuscule sur les icebergs du fjord Sermilik.
(Ces deux clichés n’ont pas été pris le même soir).
Le lendemain nous avons effectuée une balade le long du fjord Sermilik, assez courte et en aller-retour.
Cette balade possédait tout de même une particularité remarquable :
la traversée à pied, profitant de la marée base, du fjord Agtingeq (« le
petit qui se prend pour un grand »), où un nombre conséquent de petits
icebergs étaient échoués sur le sable.
(Nous avons même fait une photo de groupe au gorillapode, tous juchés
sur un iceberg échoué ; mais là non plus, du cliché je n’ai jamais vu
la couleur).
On rejoint ensuite le fjord Sermilik.
Le mouvement des icebergs était visible à l’œil nu du fait de la
marée montante. À cet endroit, notre guide s’est essayé à la pêche à la
morue, mais sans succès. Contrairement à l’omble chevalier, on ne
parvient plus à en attraper dans le secteur depuis quelques années,
alors qu’il y en avait beaucoup auparavant.
Le but de la promenade était un petit belvédère sur le fjord
Sermilik. Long pique-nique en haut de ce caillou et observation du fjord
en long et en large.
Encore quelques photos du fjord. Nous avons bien eu le temps
d’observer (et de commenter) la progression des kayaks d’un groupe de
touristes.
Le retour ne s’est pas effectué exactement par le même itinéraire :
c’est que la mer avait maintenant envahi le fond des fjords.
La fin de la balade a été un peu pénible : du fait de
l’absence de source, il a fallu se charger du ravitaillement en eau du
camp. Quelques litres d’eau par personne à transporter sur un bon
kilomètre (la distance au dernier torrent traversé), sur un itinéraire par
endroits un peu escarpé car la marée haute ne nous permettait plus
d’emprunter la grève comme à l’aller.
La soirée a été très contemplative. Plusieurs des participants
ont mis le temps à profit pour un brin de toilette dans une flaque
d’eau douce. J’avoue le vent frisquet ne me motivait guère à une telle
corvée.
J’ai vraiment vécu la journée suivante comme une journée de remplissage.
Pourtant, certains de mes compagnons ont affirmé l’avoir apprécié ! La
balade du jour, traverser l’île de Sarpaq qui fait face
à Tiniteqilâq : ce village, je commençais à en être fatigué ! Cette île
qui mesure trois kilomètres de long sur un de large, possède une
particularité : il est possible de la rejoindre à pied sec
par grande marée. C’est d’ailleurs l’origine étymologique de Tiniteqilâq.
(Nous n’avons d’ailleurs pas tiré parti de ce phénomène, puisque après
une première escale au village, nous avons rembarqué pour deux minutes
de traversée).
L’île de Sarpaq n’est pas habitée, elle est par contre utilisée pour
l’estivage des chiens de traineaux. Lesquels s’y baladent normalement en
liberté (contrairement aux rues du village), du coup notre guide nous
avait dit de faire attention et j’étais assez inquiet. Mais en fait les
chiens avaient été attachés, sans doute à cause du fait que le détroit
était exceptionnellement découvert.
Cette île était beaucoup trop petite pour une balade de la journée,
aussi cette fois encore, de longues pauses contemplatives nous ont
permis de tuer le temps.
Photos d’icebergs :
Nous sommes tombés sur une vielle tombe indigène. Elle n’est pas
datée, mais son contenu est conservé, si vous tenez absolument à le voir
c’est : ici.
Nous avons aussi eu le temps d’observer un phoque, attendant qu’il remonte (5 minutes environ).
Pour terminer, et sans doute ce qu’il y avait de plus intéressant
dans cette balade : ce reste d’habitation groenlandaise en tourbe. Cet
habitat était encore utilisé au milieu du XXe siècle. On accédait aux
maisons par un étroit corridor en pente qui assurait l’isolation.
Bien que petites et très basses de plafond, ces demeures étaient aménagées en pièces individuelles.
Le lendemain nous avons enfin pu effectuer la plus belle excursion au
programme de ce voyage, consistant à traverser entièrement le fjord
Sermilik pour gagner, sur l’autre versant, le fjord Petersen et ainsi
s’approcher de la calotte glaciaire et de ses langues glaciaires vêlant
des icebergs. Cette balade magnifique était très redoutée de notre
pilote Michel qui craignait d’être pris au piège des glaces pendant la
journée. Mais on nous a expliqué que ce jour là, la météo des glaces
était favorable. Il semble quand même que cette escapade ait fait
l’objet d’âpres négociations entre le guide et le pilote.
Et en ce qui me concerne, je n’ai pas eu trop de chance ce jour là.
Car mon appareil photo réflex est tombé en panne au bout d’une heure de
bateau environ. Panne irréparable, sans doute de l’obsolescence
programmée ; je possédais cet appareil Pentax depuis sept ans.
J’avais
emporté un second appareil plus petit, mais ce dernier était resté au
camp. Pour le reste de la journée, je n’ai donc pris aucune photo :
celles présentées ici m’ont été communiquées par C. David, qui fut la
seule de ce groupe à bien vouloir me faire parvenir ses clichés :
qu’elle en soit remerciée (je lui dois aussi, d’ailleurs, quelques
judicieux conseils en matière de technique photographique).
Les photos (encore de mon cru) des icebergs aperçus pendant la navigation.
Il y avait encore de très beaux reflets pendant cette traversée ; et
le fait que le ciel soit ce jour-là voilé rendait l’ambiance encore
plus particulière.
L’entrée du fjord Petersen et l’approche de la calotte glaciaire. Les
glaciers au fond s’appellent respectivement Brückner (rien à voir avec Anton) et Heim.
C’est ici que mon Pentax K10D a rendu l’âme ! Je passe donc aux photos
de Corinne, aux couleurs incontestablement plus claquantes que les
miennes… Et ce grâce à l’utilisation d’un polarisant (ce que je ne
faisais pas encore à l’époque), et peut-être aussi au prix d’une certaine dose
de retouche informatique à laquelle en général je me refuse.
Nous avons débarqué à mi-profondeur du fjord Petersen, au terme d’une
navigation assez difficile car les icebergs étaient nombreux.
Le débarquement sur des dalles de granit inclinées était aussi un peu
délicat. Notre pilote est resté sur son embarcation (qu’il a
éloignée du rivage) pendant tout le temps qu’ont duré notre petite balade
et notre pique-nique.
Ici le lieu du débarquement. Juste retour des choses, c’est moi ai conseillé à Corinne l’usage du produit Hugin,
excellent logiciel libre permettant de réaliser des panoramiques avec
des appareils (en particulier les réflex) dépourvus de cette
fonction.
Après une montée d’un quart d’heure à peine et qui devait constituer
la totalité de la marche du jour, nous sommes arrivés à un magnifique
point de vue sur les glaciers environnants.
Le glacier Hann est issu de la calotte groenlandaise. Sa langue descend jusqu’au fjord où elle vêle des icebergs.
Corinne a pris plusieurs photos du glacier au téléobjectif (nous ne nous
en étions pas approchés davantage). J’ai quand même trouvé le lieu
moins spectaculaire que le Perito Moreno que j’avais visité deux ans plus tôt
(en faisant bien évidemment abstraction de la foule et des aménagements industriels que l’on trouve là-bas).
Également au téléobjectif, cette vue du fond du fjord et plus
particulièrement de la cascade de glace du glacier Brückner. Il n’eût
bien évidemment été question d’approcher de cette zone en bateau.
On terminera avec le Petersen par ce « gorillapode ». La photographe est assise au premier rang.
(Rédigeant cette page trois ans après le voyage, en 2017, il m’a
fallu procéder à des déductions pour retrouver lequel sur la photo était le
guide Jean-Louis — le plus à gauche).
J’ai sorti pour la dernière randonnée du séjour, l’appareil de secours que j’avais apporté ; un appareil Fujifilm 3D (on pourra consulter sur cette page
quelques unes de mes photos en relief), mais de qualité fort médiocre.
Il s’avère que ce jour a également été (et de loin) le plus maussade du
séjour du point de vue de la météo. La pluie tombait à verse quand nous
nous sommes levés, et j’étais tellement peu motivé que j’ai failli
rester au camp (ce que j’aurais regretté). Le temps s’est heureusement
dégagé dans le courant de l’après-midi.
La dernière balade concoctée par Jean-Louis consistait à approcher un
glacier de l’île d’Angmassalik, et qui dominait notre camp. Il était
toutefois nécessaire d’emprunter le bateau pour une courte traversée
avant de démarrer, la présence d’un torrent impétueux
rendant impossible l’accès au site à pied.
Nous avons débarqué dans le fjord d’Ârtâ, à un endroit où avait été
bâti deux ans auparavant une cabane en bois destinée à l’accueil des
touristes. Cabane solidement arrimée contre le vent mais… qui n’avait
pas supporté le poids de la neige du premier hiver. Depuis cette ruine
reste là, personne au village (et surtout pas celui qui l’avait
construite) ne se sent obligé de venir en enlever les débris. Au Groenland
comme nous l’a expliqué le guide, il n’y a pas de notion de propriété du
terrain, du moins en dehors des villages. N’importe qui est libre
d’aller construire une cabane n’importe où s’il en éprouve le besoin.
Le débarquement a été assez difficile : il fallait s’élever sur des
dalles de très faible pente qui, d’ordinaire, ne soulèvent pas de
difficulté particulière. Mais la pluie rendait ces dalles
particulièrement glissantes et la progression des plus ardue. Trouver
le passage offrant la meilleure adhérence (en fonction de la présence de lichen)
relevait du casse-tête. J’ai vraiment cru que je
n’arriverais pas à passer. Heureusement, le retour du beau temps fera
suffisamment sécher les dalles pour nous épargner cette complication au
retour.
Au cours de ce débarquement, nous avons également pu apercevoir
quelques baleines dans le fjord. Je n’ai malheureusement pas pu les
photographier, trop affairé que j’étais au maintien de mon équilibre.
Jean-Louis a repéré les baleines au bruit caractéristique qu’elles
émettent en expulsant de l’air. La chasse à la baleine se pratique de
façon sporadique au Groenland (mais le village de Tiniteqilâq n’est pas
équipé pour).
Le terrain est devenu plus facile après les premiers cent mètres de
progression. La pluie a également cessé. Nous avons parcouru une assez
longue distance à plat, au fond d’une vallée, découvrant au détour d’un
rocher quelques traces de pas dont Jean-Louis a certifié qu’il
s’agissait de celles de ses clients de l’année précédente : personne d’autre
que lui ne vient paraît-il jusqu’ici. Ensuite, une dernière montée nous a
permis de gagner un belvédère sur le glacier, d’où la vue laissait tout
de même quelque peu à désirer.
Mais voici ce qu’était devenu le même point de vue une heure plus
tard, à la fin de notre pique-nique. Comme j’ai pu l’écrire, le
Groenland n’est pas l’Islande !
Venant ici chaque année avec un groupe de touristes, notre guide
avait loisir de mesurer l’évolution du glacier. Prenant des repères et
comparant ses clichés, il estimait le recul de l’ordre de quelques
mètres par an. Il nous montrait également, sur le terrain et en fonction
de la poussière recouvrant le sol, quelles zones étaient encore sous la
glace quelques années auparavant. Mais n’est-ce pas, l’observation est
une chose, la théorie réchauffiste une autre, a fortiori répétée à tue-tête par des médias sous influence.
Nous nous approchons maintenant du front du glacier.
Observation d’une grotte et d’un cañon sous-glaciaire en passe d’être
dégagé (retenu du cours de glaciologie prodigué par Jean-Louis : les
torrents creusent parfois sous la glace des cañons demeurant visibles
après la disparition du glacier ; il en existe des exemples dans le
Vercors).
En s’éloignant du glacier, là aussi sur une zone autrefois entièrement recouverte. Le beau temps est maintenant revenu.
Fin de balade :
Le dernier jour de voyage a débuté par un lever à 5h30 suivi de deux
heures de trajet en bateau, afin de regagner l’aéroport de Kulusuk.
L’occasion de prendre mes derniers clichés des paysages groenlandais.
Pour accoster l’île de Kulusuk, le pilote n’avait pas le droit à
l’erreur : l’échec pour franchir l’amas de glace aurait provoqué
l’impossibilité de prendre notre avion, notre blocage au Groenland pour
une durée indéterminée, nonobstant un surcoût certain pour l’agence (ou
peut-être pour l’assurance). Mais en s’approchant de l’île, le
brouillard s’est soudainement installé tandis que les icebergs se
densifiaient dangereusement. Michel a sorti son GPS et nous avons
navigué au ras de la côte ; tout
s’est finalement bien passé, mais nous n’avons pas traîné. C’est tout
juste si nous avons pu faire nos adieux à Jean-Louis qui ne repartait
pas en Islande avec nous.
Nous nous sommes ensuite débrouillés seuls pour transporter nos
deux quintaux de bagages sur le petit kilomètre nous séparant de
l’aéroport ; puis pour effectuer les formalités d’embarquement.
L’aérogare était (fortement) chauffée, ce qui procure une très étrange
sensation après dix jours passés dans la froidure. J’ai pu trouver à la
boutique de l’aéroport une carte détaillée de la région, c’est elle que
j’ai en partie utilisée pour cartographier ce
site (et pour déterminer certains noms de lieux). Malgré nos craintes en
raison de la couverture nuageuse, le vol à vue n’a pas été
annulé.
Cette fois-ci et contrairement à l’aller, aucune surprise ne nous
attendait à Reykjavík : pluie battante, à l’instar de ce que j’avais pu
connaître pendant la plus grande partie de mon voyage
dans ce pays en 1995. C’est, avec le coût de la vie locale, le
petit détail qu’ont l’air d’avoir
oublié les Islandais dans leur ambition de faire de leur île une
destination touristique majeure. Nous avons débarqué en ville où nous
avions toute une après-midi à « tuer » avant le vol international du
soir. Pas de chambre d’hôtel où nous aurions pu nous rafraîchir, c’eût
été beaucoup trop onéreux. Il ne me semble pas que j’avais visité la ville de
Reykjavík en 1995 : pas sûr que j’y aie perdu grand chose. En tout cas,
cette escale prolongée m’aura donné l’occasion de me rattraper.
Donc pour commencer, repas dans un fast-food du centre piétonnier de
la ville (on ne saurait parler de centre historique). Un lieu fréquenté
non par les touristes mais par la jeunesse du pays, jeunesse à 100 %
autochtone, blonde aux yeux bleus. Car l’Islande est un pays béni, à
l’abri de toute immigration, en particulier musulmane. Ceci expliquant peut-être cela,
c’est aussi l’un des rares pays
d’Europe où démocratie n’est pas un vain
mot ; en Islande quand le peuple dit non, c’est non
(même les Suisses qui longtemps ont aussi jouï de semblable privilège sont lentement
mais sûrement en train de le perdre).
Que faire ensuite à Reykjavík ? Aller là où se précipitent tous les
touristes, bloqués dans ville en attente d’un avion : à savoir
l’église Hallgrímskirkja. Ce nom, qu’on ne saurait saisir sur ordinateur
sans recours au copier-coller, désigne la principale église luthérienne
évangélique de la ville. Œuvre de l’architecte islandais Guðjón
Samúelsson et entièrement en béton, elle fut achevée en 1986 : comme
monument historique on fait mieux ! L’architecture rappelle les orgues
basaltiques fréquents en Islande. Il s’agissait jusqu’à une date récente
du plus haut bâtiment du pays.
L’intérieur de ladite église, très austère à l’image de la religion luthérienne. On y donne paraît-il des concerts d’orgue.
Notre périple nous a ensuite conduits sur le port. On y trouve
notamment cette sculpture moderne stylisant un drakkar : Sólfar, le voyageur
du soleil. Le monument le plus photographié de Reykjavík, faute de
grives on mange des merles.
Également sur le port, et bien qu’il s’agisse d’un emplacement pour le moins
étrange, l’Opéra, ou plus précisément la salle de concert, Tónlistar —
og ráðstefnuhúsið í Reykjavík (ou encore Harpa). Là on est dans le
contemporain, 2011, et le résultat est horrible. Comme à chaque fois que
je visite une ville d’un pays de culture européenne (la dernière fois à
Tbilissi en 2017), je jette un œil sur la programmation lyrique ; et
presque toujours je suis amèrement déçu ; au mieux une unique
représentation lyrique par saison (toujours au plus primaire concernant le choix du répertoire, Carmen ou la Traviata par exemple), au pire un vague concert
symphonique en alternance avec une flopée de spectacles de variétés. Et
à chaque fois, je me dis que ce n’est pas ici qu’on peut espérer
entendre la Tétralogie, et que, même avec Hidalgo, à Paris je ne suis
pas si mal.
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