Voyage à Madagascar | ||
Madagascar : Makay, AndringitraCinq ans se sont écoulés depuis ce voyage avant que je me décide d’en attaquer la rédaction. Cinq ans qui en paraissent dix tant se sont déroulés dans l’intervalle, pléthore d’évènements politiques traumatisants encore à l’époque parfaitement inimaginables, laissant ce sentiment d’avoir en si peu de temps changé de planète. Je devais en tout cas me sentir bien plus jeune en 2018 puisque j’ai entrepris — pour la dernière fois — ce long voyage rustique et engagé, dans un pays peu touristique, qui n’était pas sans me rappeler — par certains aspects du moins — l’expédition au Tchad de ma prime jeunesse. Pourquoi Madagascar ? Bonne question, car on rencontre peu de gens dans les trekkings qui y soient allés. Je pense que j’avais juste gardé cette idée dans un coin de ma tête depuis presque deux décennies parce qu’un groupe de collègues du travail s’y était rendus en 2001 pour assister à une éclipse solaire. Partir à Madagascar c’est pour ainsi dire voyager dans un autre siècle : un pays resté très authentique et très arriéré, mais aussi extrêmement pauvre. Pauvre au point de rendre certaines visites et certains contacts avec la population assez éprouvants, et c’est sans doute la raison pour laquelle j’ai tant tardé pour rédiger ce voyage. Des contacts qui m’avaient même laissé l’impression (que je tends à relativiser depuis) que les Malgaches ne cherchaient pas tant que cela à s’extraire de cette pauvreté, mais semblaient parfois plutôt s’y complaire. J’ai pu par exemple les voir effectuer en souriant des travaux physiques éreintants jusquà l’absurde, comme pomper de l’eau à dos d’homme ou canaliser un torrent à mains nues. J’ai évoqué le Tchad un peu plus haut, ces deux pays partagent en effet (du moins à l’époque de mes voyages respectifs) un énorme retard au niveau des infrastructures. Ainsi les rares routes asphaltées qui traversent le pays datent de l’époque coloniale. L’état de la chaussée est tel qu’on y roule bien évidemment à petite allure. Une fois qu’on a quitté ces axes principaux, c’est la piste, des pistes très difficiles et des transferts pouvant durer des journées entières — comme au Tchad. Avec quand même une différence de taille, c’est que le caractère insulaire du pays l’a protégé de certaines vicissitudes du monde. Je pense notamment à l’islam qui, du moins pour l’instant, est resté à l’écart de Madagascar. Autre point sans doute lié, et là c’est une différence fondamentale avec le Tchad, le pays semble assez paisible, il ne semble pas y avoir de circulation d’armes par exemples. Certes des conflits sont perceptibles, notamment entre éleveurs et entre tribus (le vol de zébus semble être un sport national). Mais ces évènements restent circonscrits aux zones reculées, et surtout les touristes présents sur place ne sont pas inquiétés. Si Madagascar a su rester à l’écart de l’islamisme, tel n’est pas le cas d’un autre fléau du XXe siècle, à savoir le communisme, puisque le régime de Ratsiraka a constitué un épisode particulièrement dur de l’histoire malgache récente. Des dirigeants communistes qui — à l’instar de ceux de nombreux pays du monde — ont hélas été formés par les enseignants gauchistes des grandes facultés françaises. S’il y a une faute majeure dont notre pays devrait répondre devant l’histoire, plutôt que la colonisation proprement dite, ce serait celle d’avoir constitué la matrice des pires idéologies criminelles de la planète (culminant au Cambodge avec le régime de Pol Pot). Notre guide malgache, Danz, assez âgé, avait connu ce régime dans sa jeunesse et en avait été traumatisé. Il gardait notamment une rancœur tenace du fait que ce dignitaire, au moment de la chute du régime, non content de n’être point jugé, soit parti en exil en chantant sur l’air d’Édith Piaf qu’ils ne regrettait rien. Danz affirmait qu’il l’aurait tué s’il avait pu le faire. Ce voyage organisé par Allibert a duré trois semaines complètes, et comprenait trois treks successifs. Les deux premiers dans la région du Makay, un massif assez sec (quoique non désertique) entaillé de cañons spectaculaires. Treks dont le premier constituait un véritable voyage à pied itinérant, avec nuits sous tente consécutives, dans des endroits différents, et des porteurs pour transporter nos bagages. Dans la troisième semaine était organisée une expédition dans le parc national de l’Andringitra (incluant l’ascension d’un sommet), une zone plus montagneuse mais moins sauvage que le Makay et qui m’a finalement moins plu. Le reste du voyage était consacré aux transferts et à la visite de quelques villes, dont la capitale Tananarive. On notera que bien que Madagascar soit une île, ce voyage restait complètement à l’écart des côtes et ne comportait donc aucun caractère balnéaire. Nous sommes arrivés à Tananarive tard en soirée après une dizaine d’heures de vol (direct). Queue interminable à la douane qui m’a rappelé l’arrivée à Bogotá six mois plus tôt. Notre guide nous attendait stoïquement à la sortie et nous a invités à changer immédiatement nos euros pour des ariarys, la monnaie locale. Dans l’aéroport mon attention avait été un peu plus tôt attirée par des affiches très insolites : elles mettaient en garde contre la recrudescence d’une maladie inattendue, nous invitant à prendre quelques précautions élémentaires et à surveiller les symptômes. Cette maladie, c’était la peste. Il y aurait eu plusieurs milliers de cas, mais seulement quelques dizaines de décès. Ensuite direction l’hôtel pour la première nuit (hôtel des Trois Métis situé en plein centre de Tananarive). Arrivée sur les 3h du matin, la ville, totalement endormie à cette heure et peu éclairée, donnait l’impression d’une ville fantôme. Il en serait, bien évidemment, tout autrement dans la journée. Départ pour la brousse dès le lendemain matin après un départ toutefois assez tardif. Le petit déjeuner n’avait pas été pour nous dépayser : croissant et baguette de pain blanc. L’héritage de la colonisation, notamment en matière culinaire, est assez présent à Madagascar. Notre guide a expliqué que les écoliers achetaient occasionnellement des pains au chocolat en ville et les dégustaient comme friandise en rentrant chez eux dans les campagnes. Notre groupe, d’une dizaine de personnes, s’est réparti dans trois véhicules 4×4. Première étape : la ville d’Antsirabé, la troisième du pays (env. 250 000 hab.), à 150 km environ au sud de Tananarive mais nécessitant une journée entière de transfert (malgré le fait que la route soit asphaltée). La sortie de Tananarive a constitué notre premier contact avec le pays. Une sortie épique tant la circulation était difficile (et ce bien que peu de Malgaches en proportion ne possèdent de voiture). Nous étions dimanche matin, mais beaucoup de gens étaient dehors pour se rendre dans les églises ou dans les temples. La ville semble construite en dépit du bon sens, sans aucun plan d’urbanisme. Beaucoup de maisons sont construites à flanc de colline (notamment sur les pentes de la colline « historique » où se trouve le palais de la Reine, que nous visiterons à la fin du voyage). Ces maisons sont fragiles et il y a régulièrement des catastrophes en saison des pluies, causant des morts (par contre la région n’est pas sismique). J’ai noté la présence de petits commerces en tout genre le long des rues, des fontaines où les gens venaient remplir des bidons de 5 l, l’accès à l’eau courante en ville étant rare. Par contre le téléphone portable est généralisé (pas le smartphone). Les inscriptions mélangent le malgache et le français. Voici les premières photos que j’ai prises une fois sortis de la ville. Un paysage de rizières mais qui ne donnent pas en saison sèche (une seule récolte par an). Pendant ces mois, certaines rizières sont utilisées pour d’autres cultures et d’autres pour produire des briques (ce qui a pour effet d’appauvrir le sol). Nous avons emprunté la route RN7 que nous allions suivre toute la journée jusqu’à Antsirabé (et encore bien plus longuement au retour). Cette route asphaltée relie Tananarive au port de Tuléar au sud-ouest du pays. La construction de cet axe remonte à la colonisation (à l’instar d’ailleurs de la quasi totalité du réseau routier de l’île : il n’y a pas d’investissement chinois majeur et récent à Madagascar contrairement à bon nombre d’autres pays). La route RN7 est en mauvais état, on trouve tout le long et de plus en plus des nids non pas de poule mais de zébu (selon la terminologie consacrée). Certains ponts sont endommagés par des cyclones et il faut plusieurs années pour les réparer. Arrêt pour déjeuner (au restaurant « Rendez-vous des pêcheurs ») dans la ville d’Ambatolampy. L’une des seules fois du voyage où je mangerai du poisson (de mer). Ambatolampy est connue pour la confection d’objets en aluminium en tout genre, dont la visite était prévue au programme mais les fabriques ne sont pas en activité le dimanche. Nous les verrons au retour, à la fin du voyage. J’ai pas mal dormi l’après-midi dans la voiture et dont j’ai moins noté d’explications (NB : je devais probablement voyager dans la voiture de Danz, vu la densité de celles-ci !). Nous avons un temps longé une voie ferrée mais sur laquelle ne circule plus aucun train. Le guide nous a aussi parlé des villages isolés dans la campagne dans lesquels on ne trouve pas de dispensaire (on utilise encore la médecine traditionnelle). L’agriculture n’est pas du tout mécanisée. Il n’y a néanmoins pas de malnutrition dans les campagnes. Dernière halte près d’Antsirabé pour acheter des fruits. L’approche d’Antsirabé se reconnaît à l’apparition au bord de la route de pousse-pousse, mode de locomotion très répandu dans la ville en raison du faible dénivelé des rues. Il y a aussi des cyclopousses, récemment introduits sur la suggestion d’un bobo occidental (plus rapides, mais moins typiques et accessoirement bien plus dangereux). Nous aurons la chance de faire une petite balade en pousse-pousse à la fin du voyage. Antsirabé est située à 1500 m d’altitude donc les nuits y sont un peu frisquettes. Mais nous logions fort heureusement à l’hôtel, un hôtel situé en périphérie et tenu par un Français (nous lui ferions une infidélité au retour). Plusieurs personnes dans le groupe souhaitaient ne pas arriver trop tard à l’hôtel et avaient fait (amicalement) pression sur le guide pour que ce soit le cas. Nous étions le 15 juillet 2018 et ils ne souhaitaient en aucun cas manquer la finale de la coupe du monde de football, qui se déroulait ce soir là et à laquelle participait notre équipe nationale. On observera qu’ils avaient de la chance de pouvoir suivre cette finale, puisqu’à partir du soir suivant et pour dix jours nous serions dans la brousse, loin de tout poste de télévision. Je devais être l’un des seuls à ne pas être intéressé par la chose, j’ai donc ostensiblement pris ma douche pendant que le match avait lieu puis me suis enquis du résultat lorsque j’ai rejoint mes compagnons pour dîner. Cette finale avait lieu à Moscou, un détail qui offre une résonance particulière à l’heure où j’écris ses lignes où se font de plus en plus insistants les bruits de bottes, voire les menaces de troisième guerre mondiale, et où se met en place une censure tout azimuts à l’encontre des canaux pro-russes, nonobstant la chasse aux (paraît-il) 20 % de Français qui n’auraient pas une vision défavorable de la Russie. En tout cas à l’époque notre empaffé s’y était rendu sans sourciller (son homologue acceptant encore de lui parler) et ne s’était pas autant donné en spectacle que quatre ans plus tard au Qatar. Une longue route nous attendait encore le lendemain. Nous avons quitté Antsirabé vers l’ouest, empruntant la RN 34 qui descend progressivement des hauts plateaux. La région d’Antsirabé est volcanique, on peut observer des cônes monogéniques remontant à environ 8000 ans. La terre est donc très fertile et propice à l’agriculture. Nous repasserons dans ce secteur en fin de voyage et nous effectuerons même une randonnée dans le coin. Je n’ai pas eu la chance de voyager dans la voiture du guide ce jour là. J’ai donc eu beaucoup moins d’explications que la veille (j’ai d’ailleurs écouté mon baladeur pendant une bonne partie du trajet). Le paysage est devenu de plus en plus aride au fur et à mesure que nous descendions, comme l’on peut s’en rendre compte sur les photos. À la mi journée, arrêt dans un village typique, Mandoto. (La croix inversée est celle de Saint-Pierre, comme nous l’ont expliqué des personnes du groupe ayant fait leur catéchisme. Je n’ai jamais remarqué cela ailleurs). Une rivière aurifère située avant le village de Dabolava. Notre guide a certifié que les chercheurs d’or n’utilisaient pas de mercure. Ouais… Nous avons pique-niqué à Miandrivazo, au moment de quitter la RN 34. Pique-nique près des bâtiments d’une école agricole financée par l’UE et déjà désaffectée. Enfin, c’est que j’ai noté à l’époque car j’ai depuis totalement oublié ce pique-nique. Que d’argent jeté par les fenêtres en tout cas (vous me direz, c’est toujours mieux que d’alimenter la guerre en Ukraine). Dans l’après-midi nous avons de nouveau fait route vers le sud. Mais je ne me souviens pas si cette portion de l’itinéraire était asphaltée. J’ai photographié (je pense depuis le véhicule) le franchissement successif de deux rivières qui descendent du plateau : la rivière Manambolo tout d’abord, puis la rivière Manampanda. C’est à partir du village de Malaimbandy que nous avons dû emprunter une piste difficile devant nous conduire aux portes du massif du Makay. Cette région est habitée par l’ethnie bara, un peuple d’origine austronésienne dont les jeunes filles sont très maquillées. C’est en compagnie de cette ethnie que nous allions passer les jours suivants. Mais j’ai complètement oublié dans quel contexte la photo ci-dessous a été prise. La culture bara est tournée autour de l’élevage des zébus. Par exemple, un homme bara doit posséder au moins un zébu pour pouvoir se marier (la polygamie est autorisée). Corollaire, le vol de zébu est une sorte de sport national au sein de cette ethnie, une dérive exacerbée par la demande chinoise de viande de zébu qui en fait monter les prix (Madagascar est donc un exportateur de viande !). Les deux guides locaux qui nous guideront dans les deux parties du trek, tous deux des Baras, auront chacun été récemment victimes de vols de zébus. Mais il semble aussi qu’eux-mêmes aient trempé dans le vol de zébu ; on note par ailleurs que, s’ils sont voleurs, les Baras ne se volent que des zébus et ne s’attaquent pas aux biens des Vasahas (à savoir des touristes). Les Baras sont par ailleurs de très bons pisteurs, sachant reconnaître un zébu à sa trace ! (un peu comme les Touareg avec les dromadaires). Quelques photos prises sur la piste en fin d’après-midi. Les difficultés étaient telles qu’il nous fallait souvent descendre, mais c’est tout bénéfice quand on souhaite prendre des photos (surtout avec une lumière pareille). Néanmoins, non contents de descendre, il nous fallait aussi bien souvent pousser. Avec plus ou moins d’efficacité… Les véhicules n’ont finalement pas pu atteindre le premier camp : nous avons parcouru à pied les 500 derniers mètres, tandis que les (vingt-cinq) porteurs faisaient suivre nos bagages. En fait, avant notre passage, les locaux ne savaient même pas si la piste était praticable après la dernière saison des pluies. Ils sont donc allés la reconnaître pendant que nous attendions à Malaimbandy (c’est sans doute à cette occasion que j’ai photographié plus haut le groupe de femmes). Si elle ne l’avait pas été, il nous aurait sans doute fallu camper bien avant, ce qui aurait considérablement prolongé la marche d’approche. Installation du camp par les porteurs (il est devenu de plus en plus rare dans les voyages d’aventure qu’il faille soi-même monter sa tente, alors que c’était la norme lors de mes premiers voyages, comme par exemple au Pérou en 1996 où nous nous faisions enguirlander par le guide de ne pas les monter suffisamment rapidement, au point de presque se croire à l’armée). Autre luxe devenu également une habitude, du moins chez Allibert : chacun sa tente, même si on perd le bénéfice de la chaleur bestiale (quoique je n’aie pas le souvenir que les nuits aient été trop fraîches dans le Makay, elles l’étaient par contre bien davantage en fin de voyage dans l’Andringitra). Toilettes dans la nature, près des roseaux, mais le guide nous a mis en garde, non contre les serpents, mais contre ce qu’il appelait le poil à gratter, une plante dont les gousses éparpillent (justement à cette saison) des graines particulièrement irritantes. Les pisteurs nous accompagnant pendant le trek nous préviendront régulièrement de sa présence, mais sans que je ne sois jamais en mesure de la reconnaître (moi et la botanique…). En tout cas et fort heureusement, je n’ai pas eu à expérimenter le désagrément. Quant à la plante, je n’ai pas noté son nom pendant le voyage, mais d’après des recherches effectuées au retour, il est probable qu’il s’agisse du pois Mascate (Mucuna Pruriens). Le Makay, dans lequel nous allions maintenant randonner pendant une dizaine de jours, est un massif gréseux aride où sont entaillées des vallées et des gorges où coulent des rivières de façon permanente (d’où l’aspect de cervelle dans Google Earth). Au fond de ces vallées pousse une forêt tropicale où vit une faune, notamment de lémuriens. Quelques crocodiles du Nil se rencontrent également dans ces rivières et dans les lacs du massif. Il n’y a pas de village à l’intérieur du Makay. Nous avons démarré la première journée de randonnée très tôt, la première étape incluant une longue marche d’approche qui était (de loin) la plus longue du voyage. Lever à 6h pour un départ à 7. Vingt minutes à peine à près le départ, il nous faut déjà enfiler les chaussures d’eau pour la traversée de la rivière Manampanda (en fait, un double franchissement). Ensuite c’est un terrain assez monotone pendant une heure ou deux. En milieu de matinée, le relief s’accentue progressivement avant que nous rejoignons un premier cañon. Descente facile pour cette première fois, puis franchissement de rivière, c’est de nouveau la Manampanda. Nous avons alors de nouveau enfilé les chaussures d’eau, et ce pour plusieurs heures. En commençant par une double traversée de la Manampanda que nous devions ensuite définitivement quitter. Nous avons ensuite entamé la remontée d’un cañon de plus en plus étroit. Progression dans l’eau, et à contre-courant comme cela a pratiquement été toujours le cas au cours de ce trek. Je pense qu’il s’agit d’un choix délibéré des organisateurs même si les explications du guide à ce sujet sont restées confuses (peut-être en lien avec la possible — quoique rare — présence de crocodiles dévalant le courant ?) Parfois le cañon s’élargit pour laisser place à la forêt primaire. Des passages qui offrent, régulièrement, l’occasion d’apercevoir furtivement des lémuriens à travers les branches. Le guide et les pisteurs qui ont l’œil nous les signalent systématiquement, on peut donc en voir fréquemment, même quand on ne progresse pas en tête du groupe. Par contre pour la photo c’est un peu au petit bonheur la chance. Voici mon premier essai en la matière (j’ai recadré la photo bien que ce ne soit pas très net ; la photo originelle au 250 mm est également présentée). Pour rappel, les lémuriens sont des primates endémiques de l’île de Madagascar. C’est dans cette zone boisée que nous avons ensuite pique-niqué. Un pique-nique de luxe auquel nous ne nous attendions pas dans un endroit aussi isolé. Car l’un des porteurs nous avait accompagnés pour toute la journée, transportant jusqu’à ce lieu non seulement une abondante salade de pâtes, mais aussi de l’eau potable. (Nous disposions pourtant de pastilles rendant possible le ravitaillement dans l’eau de la rivière). Nous aurons un porteur pour la plupart des pique-niques du voyage (tandis que les autres porteurs qui transportent nos bagages suivent le plus souvent un itinéraire plus facile voire plus court). Suite de la progression dans le cañon dont l’eau se raréfie progressivement, rendant à un moment possible (et même nécessaire) le changement de chaussures. Et pour terminer un petit passage d’escalade que je n’ai pas franchement goûté (sachant qu’il y aura bien pire au cours du voyage). Une fois atteint le plateau, nous avons encore marché pendant une heure et demie sous une magnifique lumière déjà crépusculaire (on rappelle que juillet à Madagascar c’est l’hiver). De spectaculaires cañon étaient visibles à l’horizon ; mais nous ne nous en sommes pas approchés, cette zone n’étant paraît-il pas praticable. Descente finalement un peu abrupte vers une large vallée : j’ai noté que c’était le seul passage alentour rendant possible le franchissement de la falaise. Le camp était situé sur le sable dans un endroit magnifique ; la (relative) grasse matinée à laquelle nous aurions droit le lendemain nous permettrait d’en profiter un petit peu. La journée du lendemain a été plus courte et plus facile. On commence par quelques photos du site extraordinaire dans lequel nous avions passé la nuit. Nous avons alors entamé la remontée d’une étroite gorge que j’ai beaucoup aimée, c’était assurément l’une des plus belles de tout ce voyage. Cette gorge, un peu plus large à sa base que plus en hauteur, présentait un profil caractéristique de trou de serrure inversé. Je ne sais quelle peut être l’explication géologique. La couleur orangée de la roche donnait en outre au lieu un éclairage absolument unique. (À un moment nos pisteurs ont détecté une trace de crocodile. Le saurien aurait quitté une vasque d’eau située dans un cañon latéral, pour remonter la rivière et s’établir dans une autre vasque située en amont. De l’animal proprement dit nous ne verrons rien.) Puis brusquement, nous avons quitté la rivière et sommes montés (sans trop de difficulté cette fois-ci) sur sa rive droite, jusqu’à rejoindre le plateau. Les porteurs nous ont dépassés à ce moment là. Nous avons ensuite parcouru des hauts de gorges sèches. La quasi totalité de la journée s’est ensuite déroulée sur le plateau (quittant même temporairement le massif proprement dit du Makay). Nous retrouvons ensuite une rivière, la Sakamaly, devant de nouveau enfiler les chaussures d’eau. Surprise, bien que nous venions du plateau, c’est de nouveau à contre-courant que nous l’avons parcourue. Mais notre camp n’était plus très loin. La journée suivante a été annoncée comme difficile. Au programme, la remontée du cours d’eau Sakamaly jusqu’à une « mare aux crocodiles » occupant toute la largeur de la gorge. À cet endroit, et dans l’hypothèse probable où il serait observé sur la berge des traces de crocodiles, il serait nécessaire d’éviter la mare. La seule solution pour ce faire étant d’escalader la berge, des cordes étaient prévues pour nous y aider. Autant dire que je n’étais pas très emballé… Sauf que les choses ne se sont pas du tout déroulées ainsi en raison de… la disparition pure et simple de la mare, semble-t-il emportée par un gros orage à la saison humide précédente. Une situation dont nos pisteur se doutaient en réalité dès le départ en raison de la présence dans le cañon de traces de zébus (volés). Les zébus en effet ne traversent jamais la mare aux crocodiles. (De toute cette journée je ne possède pas de tracé GPS enregistré : ce dernier s’est effacé lorsque j’ai rallumé l’appareil le lendemain matin. En principe au premier allumage de la journée le récepteur Garmin sauvegarde le tracé de la veille, sauf que cette fois-ci cela ne s’est pas produit et le tracé a été perdu. Je n’ai jamais compris pourquoi, la même mésaventure s’est d’ailleurs récemment reproduite au Viêt Nam. Pour ce qui est de cette journée dans le Makay, j’ai peu en reconstituer a posteriori l’itinéraire par l’intermédiaire de Google Earth ; par chance en effet, le tracé qui suivait longuement la rivière Sakamaly était assez évident, d’autant que le sentier vers le col qui clôt la journée est pour grande partie visible sur les images Google Earth). On notera la présence de roseaux par endroits dans cette gorge, une nouveauté par rapport aux jours précédents. Il faut se frayer un chemin entre ces roseaux et la paroi du cañon, ce qui n’est pas toujours très agréable (les roseaux, cela pique !) Nous sommes du coup sortis de la gorge beaucoup plus vite que prévu, nous laissant le temps pour une longue sieste au pique-nique. La gorge laissait ensuite la place à une zone boisée, présence de lémuriens dans les arbres mais sans que j’aie pu les photographier de manière réussie. Deux espèces de lémuriens habitent en ce lieu : les lémuriens blancs, qui vivent en bande exclusivement dans les arbres, et les lémuriens marron, plus solitaires mais qui descendent parfois au sol. Ensuite, franchissement d’un col pour rejoindre une autre vallée, par le petit sentier assez bien marqué que j’ai évoqué plus haut. Le premier panoramique du voyage : ainsi qu’un second sur lequel on peut reconnaître ce qui sera le « terrain de jeu » de la journée suivante. La rivière que nous avons ensuite remontée, sur quelques centaines de mètres seulement jusqu’au camp, avait assez peu d’eau, mais il a tout de même fallu changer de chaussures. Caractéristique de cette zone, la blancheur de la roche, qui selon Danz n’est pas du calcaire mais de l’argile verte. La journée suivante était la plus difficile techniquement et pour moi la plus éprouvante, puisqu’elle comprenait une descente de falaise au bout d’une corde. Elle a débuté par une montée assez raide avec un dénivelé de plusieurs centaines de mètres. Au passage, le pisteur nous a signalé la présence de plusieurs plants de « poil à gratter » mais nous n’aurons à en subir le désagrément. La vue sur le Makay, sans doute au terme de cette montée. J’avoue que je ne me souviens guère de cette dernière, ni des circonstances dans lesquelles ce panoramique a été pris. L’un de ces sommets serait le point culminant du Makay (lequel est d’après Wikipedia, le mont Dafimavo à 1034 m). Ensuite, traversée d’un vallon boisé (descente puis remontée). Vallon que j’avais également oublié, mais le fait de consulter mon tracé GPS sur la carte (Google) me rafraîchit un peu la mémoire. Comme quoi la mémoire visuelle… En tout cas j’ai complètement oublié l’épisode des zébus que j’ai relaté sur mon journal de voyage. À savoir qu’un troupeau paissait en pleine forêt, lequel s’est brusquement mis à courir, pour une raison indéterminée. Par chance nous ne nous trouvions pas sur leur trajectoire. A suivi un long trajet en balcon, entre deux falaises, avec quelques traversées d’éboulis un peu scabreuses. Un épisode il est vrai assez photogénique. J’ai noté que ce plateau constituait un véritable labyrinthe. Un peu de botanique au passage : à gauche une « plante étrange » (je ne suis pas un adepte des applications pour ordiphone qui vous disent tout de suite de quoi il s’agit… pour de toutes façons oublier la réponse dans les cinq minutes). À droite, ce que le guide a appelé la « fleur de baobab » et que nous avons rencontrée à deux reprises dans ce trek. Elle aurait vraiment un rapport (quoique ténu) avec le baobab. On continue avec ce magnifique sentier en balcon… pour finalement arriver à ce fameux passage de désescalade, qui toute la journée a suscité chez moi quelques sueurs froides. La fiche technique d’Allibert précisait bien, en commentaire global de ce trek, qu’« il est parfois nécessaire de s’assurer avec des cordes ». N’empêche, commence à venir le temps où je me sens un peu vieux pour des excentricités de ce genre (j’ai encore dégusté l’année suivante en Bulgarie). Bref. Le passage en question commençait par une petite crête aérienne d’une dizaine de mètres environ, avant d’entamer la descente proprement dite. Comme j’étais le moins à l’aise du groupe, le guide m’a fait enfiler un baudrier, une précaution d’utilité nulle car il ne connaissait manifestement pas les bases de l’assurance en montagne. Évidemment j’ai dû ranger mon appareil et n’ai finalement pris qu’une seule photo en bas du passage, c’est la vue de droite (on aperçoit notre guide Danz qui assure le passage de quelques porteurs). Les deux autres clichés (le premier et le troisième) m’ont été envoyés par l’un de mes compagnons de voyage, Pierre-Louis Beaubreuil. J’apparais d’ailleurs sur la troisième photo, en sandwich entre les deux pisteurs. J’ai pendant des années durant pu échanger des photos par Internet au retour de mes différents voyages. Mais les dernières années (surtout depuis le Covid) voient cette possibilité se tarir, depuis que mes compagnons sont tous comme un seul homme passés à What’s app, programme pourtant spécifiquement conçu par l’état profond américain pour espionner la vie privée de milliards de terriens, et qui a de surcoît le mauvais goût de ne fonctionner que sur téléphone et surtout pas sur ordinateur Linux. Comme le fait d’échanger par courriel était pratique et universel, il était en effet urgent de passer à autre chose. Après la falaise, il restait une heure et demie de marche dans les broussailles et la forêt (sans passage de rivière, la journée avait d’ailleurs été entièrement sèche). J’ai noté que les broussailles du sentier étaient assez agressives mais je n’en ai pas de souvenir. Encore des paysages remarquables. Nous sommes finalement arrivés assez tôt au camp, monté dans le lit d’une rivière. C’était le dernier du trek dans le nord du Makay, avant un transfert en véhicule et un changement d’équipe locale. Pour cette raison était organisée à notre attention une traditionnelle « fête » des porteurs (les Malgaches sont en effet très festifs) avec des danses auxquels les Vasahas étaient (en principe) tenus de participer. Fin de randonnée le lendemain matin, deux heures de marche (sans guère d’intérêt) nous permettant de retrouver les véhicules. A suivi l’adieu aux porteurs et l’inévitable épisode des pourboires. Nous avons passé le reste de la journée dans les 4×4 : la distance à parcourir n’était pourtant pas énorme (une soixantaine de kilomètres), mais la piste était particulièrement difficile. Se sont succédé tout au long du trajet les photos de 4×4 avec une roue dans le vide, d’enlisements, de déblaiement de la piste à coup de pelle, de traversées hasardeuses de torrents. Le Makay, cela se mérite ! Nous avons fait halte en chemin dans la localité de Mandronarivo où se tenait un marché (je n’ai pas été très inspiré…) Arrivée au camp à la nuit tombante (nommé Beronono d’après la fiche technique). Une arrivée mouvementée puisque le camp était situé sur les bords de la rivière Makay, mais pas sur la même rive que les véhicules. Donc, déchaussage pour traverser en chaussures d’eau avec les petits sacs, puis montage des tentes dans la quasi obscurité. L’endroit (où nous allions dormir deux nuits non consécutives) était par ailleurs infesté de moustiques, cas unique dans ce voyage. Je n’ai pas pu éviter les piqûres et j’ai craint que des petits soucis de santé que j’ai eus les mois suivants ne soient liés à cela, même si les médecins m’ont juré leurs grands dieux que ce n’était pas le cas. Le lendemain, début de deux jours de randonnée dans la partie sud du Makay, un secteur un peu plus touristique et un peu plus accessible que le nord (enfin, cela reste très relatif). Première demi-journée totalement à plat, consacrée à des visites de village et une caverne rupestre. Peu de temps après le départ, il nous faut de nouveau traverser à gué la rivière Makay. Nous croisons une paysanne bara dont le visage est recouvert d’une peinture rituelle. Voici maintenant la caverne de Mahatiny, toujours vénérée par les Bara qui pratiquent le culte des ancêtres. Les peintures dateraient du Xe siècle de notre ère. Mais il faut reconnaître que cela ne vaut pas le Tassili… Retour ensuite sur nos pas, avant de traverser de nouveau la rivière Makay. Ensuite, passage dans le village sans doute le plus remarquable de tout ce voyage à Madagascar (il s’appelle peut-être Maromby). Étrangement, on n’y trouvait que des femmes et des enfants, lesquels se laissaient volontairement photographier (les deux premières photos ci-dessous ont été retouchées, l’éclairage n’étant pas idéal) D’autres photos de femmes du village. J’ai joint un cliché de Pierre-Louis Beaubreuil, moi je n’avais pas osé. Voici le village proprement-dit : Je n’ai rien noté de particulier sur la démonstration du tapioca malgache. Quant au caméléon… Nous nous approchons ensuite du massif Makay dans lequel nous allons grimper l’après-midi. Pique-nique apporté par un porteur. La montée vers le plateau a débuté par un étroit cañon sec dont je n’ai conservé le moindre souvenir. J’ai toutefois noté que ce n’était pas très difficile. Lequel plateau offrait un panorama magnifique sur le complexe réseau de cañons du massif. La vue portait en outre jusqu’au nord du Makay. Cela valait bien un panoramique. La lumière commençait à décliner alors que nous poursuivions notre progression sur le plateau. Sur cet arbre en contrebas sont suspendues une myriade de chauves-souris. Passer à proximité constitue paraît-il une épreuve en raison des odeurs (épreuve qui nous aura été épargnée). On approche ensuite d’un lac, le lac de Sariaka (selon la fiche technique Allibert) dans lequel vivraient des crocodiles. En fait de crocodile nous n’avons aperçu qu’une pirogue. J’ai assez peu photographié ce lac, déjà dans l’ombre quand nous sommes arrivés dans les parages. Le retour sur le « plancher des vaches » nous avait été annoncé comme difficile. Je m’attendais au pire, mais cela s’est finalement beaucoup mieux passé que l’avant-veille. La pente était certes assez raide mais ce n’était pas trop vertigineux. À un moment aussi, une échelle de bois mal arrimée. La technique de s’asseoir sur le chemin a du bon dans ce genre de circonstance. Ensuite, nous gagnons le camp en fond de vallée (sur un terrain sableux un peu pénible) tandis que les falaises sont magnifiquement éclairées. Pour la première fois du voyage, un autre camp de touristes était situé à proximité. Pour la dernière journée passée dans le Makay, nous avons effectué une randonnée en boucle : montée par une gorge, descente par une autre (très spectaculaire). Au démarrage, un petit crochet pour admirer le lac Anosilahy, voisin de notre camp. Ici aussi, le crocodile est resté à l’état de concept abstrait. Remontée (en chaussures d’eau) d’un premier cañon — qui s’appellerait aussi cañon d’Anosilahy, chose difficile à vérifier en l’absence de carte annotée ; Google est muet sur le sujet. Ces noms proviennent de la fiche technique d’Allibert, laquelle est — peut-être volontairement — assez vague. Puis, brusquement, nous avons quitté la rivière pour entamer une montée vers le plateau. Danz nous a expliqué que le programme prévoyait normalement de suivre le cañon jusqu’à sa source, mais qu’il avait préféré abréger un peu la journée. L’itinéraire bis que nous avons suivi était rarement emprunté, y compris par les locaux. Nous aurions également été parmi les premiers Vasahas qui passent par là. Heureusement (en dehors des broussailles qui parfois obstruaient le passage) il n’était pas très difficile, se faufilant entre les gorges sur des terrains peu pentus. La plante que Danz a ramassée (ci-dessous à droite) s’appelle le tapioca malgache. C’est une plante toxique mais il est possible moyennant une longue préparation d’en extraire une poudre blanche comestible. Nous avions vu les femmes en préparer la veille au village. Cela permet aux Baras de subsister pendant la saison sèche ; problème, on en trouve de moins en moins dans la montagne, il faut se rendre dans des lieux de plus en plus isolés (tel l’itinéraire que nous sommes en train d’emprunter). Nous quittons ensuite la zone des corniches, pour franchir un petit col puis nous retrouver dans un cirque amorçant une nouvelle gorge. Début de descente dans cette gorge, laquelle pourrait toujours selon la fiche technique d’Allibert s’appeler gorge de Sakamanitra. Ce cañon s’est rapidement accentué jusqu’à devenir particulièrement spectaculaire. Je crois que jamais dans mes voyages je n’avais parcouru une telle gorge aux parois inclinées. Le site semble du reste constituer un haut lieu du Makay, j’en ai retrouvé des photos sur de (rares) blocs-notes sur Internet relatant des expéditions dans la région. Nous avons pique-niqué dans cette gorge, à l’endroit où nous attendait le porteur venu nous apporter notre pique-nique, juste avant que la vallée ne devienne humide. Le porteur avait attrapé une anguille un peu plus bas, nous ne l’avons ni vu faire, ni la consommer. Ensuite, nous poursuivons la progression en chaussures d’eau, avant que les parois de la vallée ne s’élargissent et que nous ne retrouvions les rives du lac de Sariaka, déjà parcourues la veille. Et toujours pas de crocodile ! Nous étions de retour à notre point de départ, mais le camp avait été démonté : c’est en effet à Beronono, le camp de l’avant-veille, qu’il était prévu de dormir. Deux camps distants de 5 km environ, par un terrain plat et sablonneux, sans guère d’intérêt. Aussi l’agence avait-elle prévu de parcourir cette distance non pas à pied, mais en « char à zébus » : un genre de véhicule sans doute utilisé par les Baras pour transporter des objets pondéreux et accessoirement les touristes ; mais je doute qu’ils n’utilisent eux-mêmes de tels attelages pour se déplacer. Deux chars avaient été affrétés, ce qui était insuffisant pour transporter tout le groupe. Je pense que l’idée était que nous nous relayons. Mais j’ai préféré en ce qui me concerne rentrer au camp à pied, je me suis donc séparé du convoi, accompagné d’un de mes compagnons (et sans doute aussi d’un pisteur). Nous avons en tout cas marché assez vite et sommes arrivés bien avant les chars. Le tout par un itinéraire plus direct qui nous a en outre épargné de nouvelles traversées de rivière. Le séjour dans le Makay était maintenant terminé. Au programme de la journée suivante, un transfert interminable nous permettant de rallier la RN7 à la hauteur du parc de l’Isalo et la ville de Ranohira où nous pourrions dormir à l’hôtel. Au milieu de ce transfert, la traversée en bac de la rivière Mangoky, des plus épiques comme nous allons le voir. La piste du Makay parcourue pendant la matinée, avec son lot de difficultés… Nous arrivons ensuite dans la ville de Beroroha : le passage en bac était prévu juste après. Longue halte pour flâner dans la ville. Le guide nous avait d’emblée annoncé que la traversée de la rivière Mangoky serait difficile. Déjà parce que le seul bac disponible, d’époque antédiluvienne (probablement coloniale…) n’était en mesure de transporter que deux véhicules à la fois. Or nous avions trois voitures, il faudrait donc faire deux voyages. Mais ce n’était sans doute pas suffisamment difficile. Car lorsque nous sommes arrivés sur la berge, on nous a tout d’abord annoncé que la traversée ne pourrait pas se faire car le bac n’avait plus de batterie. (Le bac est la propriété de l’état malgache, je ne sais si ceci explique cela). Qu’à cela ne tienne, en Afrique on se débrouille. La solution était d’enlever la batterie de l’un des véhicules pour la mettre sur le bac. Ledit bac se trouvant en outre sur l’autre berge lors de notre arrivée, la batterie a dû préalablement être transportée en pirogue jusqu’au bac. Et le courant était assez fort. En attendant que soit mise en œuvre cette solution, nous avons pique-niqué sur la berge avec tout loisir d’observer la rivière. Celle-ci est très large, pas mal de monde la traversait en pirogue ; mais on pouvait également voir quelques troupeaux de zébus qui passent à pied avec leurs bergers. Il n’y avait semble-t-il pas plus d’un mètre à un mètre cinquante de fond à l’endroit où ils passaient. La rivière était censée contenir des crocodiles, mais si cela avait été le cas les zébus ne seraient pas passés. En tout cas nous n’en avons pas vu. Autre point d’intérêt, les femmes baras de Beroroha qui viennent laver leur linge dans la rivière. L’un d’elles était accompagnée de trois fillettes (la plus grande prépubère) qui se sont baignées nues et sans aucune gêne à une vingtaine de mètres de nous. Pendant tout ce temps, la pirogue a atteint le bac, lequel a démarré sans coup férir. Il a ensuite traversé la rivière et les deux premiers véhicules (qui avaient conservé leur batterie) sont passés tout d’abord. Le bac est ensuite revenu, tandis que nous finissions nos agapes, afin que nous embarquions avec le troisième véhicule (doté de la batterie de l’un des deux premiers). La traversée a duré une dizaine de minutes, avant que nous ne débarquions sur un banc de sable bien en amont sur la rive d’en face (il paraît que parfois quand il n’y a pas assez de fond les véhicules débarquent directement dans l’eau). Ensuite nous sommes remontés dans les véhicules qui traverseront le banc de sable sans s’ensabler. La route était encore longue. Une heure environ après la traversée, un bosquet de baobabs apparaît brusquement au bord de la piste. Bien que les baobabs soient emblématiques de Madagascar, ce seront les seuls de tout le voyage. Le guide les avait d’ailleurs annoncés au breffage la veille au soir. Nous avons encore passé toute l’après midi dans les véhicules, à travers les grands espaces. J’ai pris quelques photos au passage, à la faveur de quelques rares arrêt. On notera notamment un Inselberg assez remarquable (culminant à presque 1000 m) mais auquel Google Maps ne donne pas de nom. Nous avons ensuite longé le parc national de l’Isalo. L’Isalo est un massif géologiquement proche du Makay, mais plus touristique car plus accessible (la RN7 passe au sud). Il a également connu son heure de gloire lors de l’éclipse solaire de 2001, un grand nombre de touristes y séjournèrent à cette époque. En ce qui nous concerne, nous n’en retiendrons que ces clichés crépusculaires. Nous avons continué notre progression de nuit, toujours sur la piste. Avant de déboucher brusquement sur le goudron de la RN7, quel soulagement alors ! Nous avons encore traversé la localité de Ranohira, notre motel se trouvait un peu plus au sud. Je me souviens bien de ce motel… dans lequel Danz m’avait réservé une surprise. On sait que les groupes français ont l’habitude (pour ne pas dire la manie) de parler de ripaille dans des endroits les plus inattendus, comme deux jours plus tôt dans le grand cañon du sud du Makay. Chacun y va de ses spécialités culinaires les plus délirantes, et c’est à cette occasion que, préférant de manière générale les desserts, j’avais parlé de mousse au chocolat. Qu’à cela ne tienne, le guide avait appelé le restaurant du motel de ce soir pour que de la mousse au chocolat soit effectivement servie au dessert ! Sympathique attention. En fait ce petit plaisir très français n’est pas aussi incongru à Madagascar qu’on se l’imagine : la colonisation est passée par là et a tout de même laissé quelques savoir-faire. Nous aurons en tout trois mousses au chocolat lors de notre séjour. Au mur du restaurant était affichée une carte stellaire, en particulier du ciel austral. L’occasion pour moi de faire l’intéressant à peu de frais et de montrer à mes compagnons sur la carte, les nuages de Magellan, galaxies satellites de notre Voie Lactée qui ne sont observables que dans l’hémisphère sud (je suis en fait assez peu calé en astronomie, je m’étais préoccupé du sujet pendant mon adolescence pour ensuite m’en désintéresser complètement, je ne sais d’ailleurs pas trop pourquoi. Bref. En tout cas, mes connaissances superficielles de cette science sont souvent suffisantes pour paraître plus savant que je ne le suis, j’en avais déjà fait l’expérience dans le Sahara). En ce qui concerne les nuages de Magellan, je leur ai expliqué que la nuit précédente à Beronono, réveillé par le froid sur les trois heures du matin, j’avais précisément pensé à ces nuages et avais ouvert quelques instant ma toile de tente qui donnait vers le sud, espérant les apercevoir ; les objets célestes étaient effectivement visibles même s’ils n’étaient pas très lumineux. Mes compagnons ne m’ont d’abord pas cru, mais l’un d’entre eux a quand même été interpellé par la chose, surtout quand je lui ai expliqué que c’étaient (presque) les seules galaxies visibles à l’œil nu et que ce voyage dans l’hémisphère austral offrait une rare occasion de les observer. Suffisamment interpellé en tout cas pour se lever chaque nuit les jours suivants dans l’Andringitra, sans ne jamais rien observer. Mais il est possible que les camps de la suite du voyage n’étaient pas suffisamment dégagés vers le sud. Le lendemain matin, nous avons repris la route, cette fois-ci sur le goudron, suivant la RN7 en direction du nord-ouest. Notre destination était le parc national de l’Andringitra où devait se dérouler la suite du séjour. Nous avons tout d’abord effectué une courte halte pour ravitaillement dans la ville d’Ihosy. Nous avons ensuite traversé un plateau élevé, le plateau de l’Horombe, dominé par une montagne emblématique que les Malgaches surnomment : le Bonnet de l’Evêque (son véritable nom est Andriamitsioka). Les montagnes de ce secteur sont des bulbes granitiques (comme l’Andringitra dans lequel nous nous rendions), aux noms souvent évocateurs. On trouve aussi près d’Ampizaramaso la Femme couchée, montagne dont la silhouette vue du nord-est fait penser à une femme enceinte sans poitrine. Arrivée en fin de matinée dans la ville d’Ambavalao où se tenait un marché en plein air. Nos chauffeurs se devaient (pour des raisons logistiques) de pénétrer en voiture au cœur de la ville, une mission quasi-impossible donc il a bien fallu qu’ils s’acquittent, non sans avoir testé plusieurs accès. Pendant que notre guide s’occupait de l’intendance, nous avons eu quartier libre pour visiter le marché (en faisant attention à nos affaires). Nous avons ensuite déjeuné au restaurant : Danz nous a fait servir un menu typique (dessert compris) qui m’a moyennement enchanté. Heureusement, le restaurant vendait également des pâtisseries, j’en ai ensuite acheté une en douce. Après cela, nous avons fait nos adieux à une partie du groupe (environs un tiers), qui ne faisait pas l’Andringitra et pour qui c’était donc presque la fin du voyage. Le parc de l’Andringitra est un parc national voué à l’accueil des touristes, équipé notamment de sentiers bien entretenus. Principal problème… son accès, puisque la route pavée qui le reliait il y a quelques années à Ambavalao, a été fortement endommagée par les pluies tropicales. Seuls les 4×4 peuvent désormais passer, ce qui en limite la fréquentation. Il faut une bonne demi-journée pour atteindre le parc depuis la ville (et autant dans l’autre sens puisqu’il n’y a qu’un accès). Un trajet que nous avons effectué sur des véhicules particulièrement délabrés, qui n’étaient pas ceux que nous avions utilisés dans le Makay. Celui dans lequel j’avais pris place calait en outre fréquemment ce qui obligeait les passagers à descendre et à pousser (à un moment, le guide Danz m’a laissé sa place dans l’autre véhicule qui roulait un peu mieux). J’ai pris assez peu de photos de ce trajet (dont du reste, je ne me souviens guère). De nombreux paysans malgaches qui rentraient du marché d’Ambavalao empruntaient cette piste à pied, parfois sur ces kilomètres. La pluie avait récemment détrempé le sol (alors qu’elle devait nous épargner pendant notre séjour dans le massif). J’ai noté qu’on pouvait voir des rizières mais elles n’apparaissent pas sur mes photos. Arrivée au camp à la nuit, après avoir franchi la limite du parc et payé les droits d’entrée. Notre premier camp était situé dans le jardin du responsable de l’équipe locale, à l’entrée d’un village. Nous avons dîné dans sa maison, sur des bancs et à table, un luxe que nous n’avons connu dans aucun autre campement du voyage. La température était du reste assez frisquette (nous étions déjà à 1400 m d’altitude) et cela n’allait pas s’arranger les deux jours suivants. Début de trek le lendemain matin, traversée de quelques villages. Les paysans du secteur pratiquent la culture du riz en terrasses. Dans certains villages, des femmes étaient en train de piler le riz dans des récipients « en forme de Graal ». Cette opération n’est réalisée que certains jours de la semaine. Ce franchissement de rivière quelque peu scabreux nous a bien pris une demi-heure (il eût sans doute été beaucoup plus simple de passer carrément dans l’eau en se déchaussant). Le trek proprement dit commence ensuite. Comme je l’ai précédemment évoqué, les sentiers de l’Andringitra sont très bien aménagés, même suraménagés : sur des kilomètres, des marches d’escalier construites le plus souvent en pierre. La réalisation (et l’entretien) de ces sentiers à dû faire travailler des dizaines d’hommes. Le hic, c’est que très peu de touristes les utilisent, la faute à la route d’accès qui n’est pas entretenue (les responsables du parc et ceux de la commune voisine s’en rejettent mutuellement la responsabilité). Bref, c’est l’Afrique. Nous entamons la montée par une forêt primaire situé sur le côté est du parc. Dans la forêt, nous recherchons en vain les lémuriens. Nous devons nous contenter de quelques oiseaux. Nous avons fini par déboucher sur les crêtes, à environ 2050 mètres d’altitude. La vue vers l’est était dégagée, mais il n’était pas possible d’apercevoir la mer. Côté ouest, nous pouvions apercevoir les villages dont nous étions partis, ainsi que les bulbes granitiques formant le cœur de l’Andringitra ; le guide local qui nous accompagnait à ce moment là (Danz étant resté en arrière) s’est toutefois montré incapable d’en désigner le point culminant, le pic Imarivolanitra, dont l’ascension était programmée pour le lendemain. Pique-nique un peu plus loin, avant de poursuivre notre progression. La forêt du matin a laissé place au arbustes, en raison bien entendu de l’altitude. Un incendie a en outre récemment ravagé certains secteurs, mais je n’ai pas dû y prendre de photo. Arrivée au pied des bulbes granitiques, là où était établi le camp du soir, à plus de 2000 mètres d’altitude. Nos tentes avaient déjà été montées par les porteurs, et une collation avait été préparée. La nuit devait être courte puisque le départ pour l’ascension était prévu dès potron-minet. Le jour suivant s’est déroulée l’ascension du second sommet de Madagascar, altitude 2658 m, désigné pour les touristes sous la désignation anglo-saxonne de pic Boby mais dont le véritable nom est Imarivolanitra. Notre guide nous a imposé un départ des plus matinal, 2 h du matin. Un choix parfaitement injustifié ! Il a se faisant non seulement sous-estimé le niveau de marche de notre groupe (en réalité assez pêchu pour emprunter un vocable militaire), mais il a trouvé le moyen de se tromper sur l’heure du lever du soleil ! Résultat, une arrivée au sommet par nuit noire suivie d’une attente (des plus frisquettes) d’une bonne heure et demie, histoire que le jour veuille bien se lever. La seule erreur — aux conséquences il est vrai relativement limitées — qu’ait commise ce guide par ailleurs fort compétent. Après donc une mauvaise nuit écourtée et un petit déjeuner frugal (et un changement in extremis des batteries de ma lampe), montée à la fraîche et à la frontale. Température sous zéro jusqu’au sommet. L’ascension en soi n’est pas très difficile, des marches sont souvent taillées même s’il faut parfois passer sur des dalles inclinées. Par contre, je pense que l’ascension par temps de pluie serait une autre paire des manches. L’avantage en outre de l’obscurité, c’est que l’éventuelle sensation de vide disparaît. Je ne saurais dire si le sentier a été vertigineux. Nous tentons de nous réchauffer pendant qu’apparaissent les premiers rayons du soleil. (l’ombre du photographe n’est pas très bienvenue). Dernières photos avant d’entamer la descente. J’ai été déçu du panorama qui n’offrait pas de vue sur la mer (masquée par les nuages). Le seul sommet aisément reconnaissable (absent de mes photos) était le « bonnet de l’Évêque ». Début de descente par le même chemin qu’à la montée, jusqu’à un col situé au pied de la montagne. Là avait été préparé pour nous un petit déjeuner apporté par un porteur. J’ai noté que celui-ci était aussi copieux voire plus que s’il avait été servi au camp. Par contre, l’endroit était à peine éclairé et il y faisait encore plus froid qu’au sommet. Le porteur qui nous avait attendus là avait dû souffrir. Pour la suite de la journée, le guide Danz avait modifié le programme initial (consistant à redescendre au camp par le même chemin puis à gagner assez rapidement le camp du soir, assez proche) ; en effet un nouveau chemin de retour, aménagé depuis plusieurs années déjà mais jusqu’ici non autorisé car non « inauguré », était depuis peu ouvert aux touristes. Ce chemin était un test pour Danz, il s’est avéré intéressant mais particulièrement long (nous avons fait plus de 25 km en tout). Nous avons commencé par gravir des dalles, suivant un balisage assez mal indiqué. Ensuite le chemin a alterné des sections en dalles et des marches d’escalier, des montées et des descentes, dans des vaux particulièrement sauvages et déserts. Nul autre touriste n’a emprunté cet itinéraire de toute la journée. Le paysage me faisait parfois penser au Hoggar, ou plus précisément à la Taessa. (malgré la longueur de l’itinéraire Danz nous a accordé une heure de sieste au milieu de la matinée, ce qui n’était pas de trop). Paysages rencontrés en début d’après-midi : Puis, brusquement, nous avons quitté le sentier aménagé pour progresser directement sur des dalles en faible pente. D’après le pisteur, il est permis dans cette partie du parc de déroger à la règle (de ne pas quitter les sentiers) en raison de son caractère très minéral avec très peu de végétation. Nous avons fini par atteindre un col ; on pouvait de l’autre côté apercevoir le camp, mais il est loin, il restait encore une bonne heure de marche. Le camp était situé à côté d’une « piscine » (le torrent alimentait un vaste réservoir d’eau naturel) mais je ne suis guère senti motivé pour aller m’y rincer. C’est ce soir là au camp que Danz nous a évoqué sa jeunesse sous ce qui a été appelé la seconde république malgache, c’est-à-dire le régime de Didier Ratsiraka. Évoquant notamment les terribles privations, les queues interminables qu’il fallait faire pour la moindre bouchée de nourriture, queues qui commençaient à deux heures du matin (Danz était de corvée en tant qu’aîné de famille, puis se faisait remplacer dans la queue à l’heure d’aller à l’école). Danz considère aussi comme une catastrophe absolue la malgachisation de l’enseignement, voulue par Ratsiraka et qui eut comme conséquence une chute drastique de la qualité de l’enseignement à Madagascar. Danz nous a exprimé aussi n’avoir jamais compris pourquoi Ratsiraka, formé en France dans les meilleurs lycées, a pu professer une telle haine de la France et de tout ce qui venait de notre pays. Une incompréhension que je ne partage pas (même si je me suis bien gardé d’exprimer mon avis), je ne sais que trop bien de quoi sont capables les gauchistes inamovibles qui accaparent la quasi-totalité des postes de notre enseignement supérieur, la haine de soi qu’ils profèrent à longueur de cours ayant déjà gangréné deux générations d’étudiants, prémices je le crains à un crépuscule dont notre pays ne se relèvera peut-être jamais. Et le fait que bon nombre des pires dirigeants communistes de la planète avaient été formés en France — Enver Hodja ou Pol Pot en étant deux autres exemples — ce qui ne fait que confirmer ce douloureux constat. Des témoignages de ce type par ceux qui les ont vécues sur les horreurs du communisme, j’en ai entendus tous les ex-pays communistes que j’ai pu récemment visiter à l’exception de la Russie : Mongolie, Albanie, Éthiopie, Arménie, Madagascar, et plus récemment Cambodge. Il n’en est que plus effarant que ces lubies marxistes soient toujours aussi vivantes chez nos élites. Y compris souvent d’ailleurs chez les participants à mes voyages, qui manifestement face à ce genre de ce témoignage n’entendent pas, ne comprennent pas, ne déduisent rien. La nuit était celle de la pleine lune qui correspondait à une éclipse totale de lune : les médias en avaient parlé, mais nous n’avons quant à nous pas eu loisir de l’observer. Le soir, le ciel était couvert et de ce fait la température restait plus clémente que la veille. Nous nous sommes couchés en confiance, mais (malgré mon duvet) je me suis rendu compte pendant la nuit que la température avait bien chuté. Au lever vers 6h, j’ai émergé le premier (touriste) des tentes et tout était gelé alentour. Les porteurs et Danz étaient frigorifiés, ils étaient en train de couper rapidement du bois mort pour faire un feu. Je m’y suis également réchauffé et c’est autour de ce feu (et non dans la tente mess) que nous avons pris notre petit déjeuner. Le bidon de 5 l contenant l’eau potable avait en grande partie gelé. Aujourd’hui était prévue une étape bien plus facile que la veille, et principalement de descente. Pour commencer, aller voir les deux cascades en contrebas du camp (cascades dites mâle et femelle). Ensuite et plutôt que de rentrer directement, et sur la suggestion du guide local (Danz n’était pas très chaud), effectuer un long détour pour passer voir une fête villageoise qui avait lieu depuis deux jours, et dans laquelle étaient pratiquées des sortes de courses landaises avec des zébus. Nous avons commencé par une petite montée, avant de rejoindre la piste principale du parc (la voie directe reliant le village au sommet du pic Imarivolanitra). Devant nous, une vaste mer de nuages masquait à cette heure les villages d’où nous étions partis l’avant-veille. A suivi une bonne descente en marches d’escalier, avant d’obliquer par un sentier latéral un temps le long d’un canal d’irrigation en courbe de niveau (en d’autre lieux on pourrait parler de levada). Visite au passage d’une caverne laquelle, contrairement à celle que nous avions vue dans le Makay, ne contient pas de peintures rupestres, et ne revêt non plus aucun caractère sacré. Elle fut par contre utilisée comme refuge, notamment par des voleurs de zébus. Visite ensuite des deux cascades successivement. La cascade dite femelle est la plus grande et la plus spectaculaire des deux ; mais la raison à cela m’a échappé. Il existe autour de ces deux cascades une légende relative à un roi et une reine de Madagascar (mais je ne sais à quelle époque). Le couple n’arrivant pas à avoir d’enfants, un chaman leur suggéra d’aller se baigner dans une source très pure, et ce sont ces deux cascades qui furent choisies (aucun village n’étant situé au-dessus). J’ai noté que le franchissement de la cascade femelle s’était avéré un peu scabreux en raison de la présence de dalles inclinées, humidifiées par l’eau de la cascade. J’ai dû pour passer me faire aider par les pisteurs. Mais j’ai complètement oublié cette péripétie. Curiosité en contrebas de cette cascade (mais que je n’ai pas photographiée), la présence d’un barrage qui n’est pas fonctionnel. C’est une élucubration de l’honnie seconde république malgache, le barrage devait alimenter un canal d’irrigation mais les ingénieurs se sont semble-t-il trompés dans les calculs de niveau ; l’eau ne pouvant remonter, tous ce travail a été effectué en vain. La nonchalance africaine combinée à l’idéologie communiste aboutit décidément à des absurdités. Ces marchandes de coca-cola s’étaient placées en un endroit stratégique, au croisement de la piste principale avec la boucle des cascades, s’assurant le passage d’un maximum de touristes. Mais notre groupe ne constituait pas de bons clients. Nous avons ensuite pique-niqué près du torrent descendant des cascades, malgré le fait que le lieu soit un peu graisseux. Progression le long d’un canal d’irrigation (asséché) pour rejoindre le village où se déroulait la fête. On pouvait deviner que nous nous en approchions… à l’absence de toutes présence humaine dans les fermes que nous traversions. Je n’ai pas bien compris l’objet de cette fête offerte par un notable du cru. Il ne s’agissait pas apparemment d’une fête religieuse ni d’un rite traditionnel, mais semble-t-il d’un évènement qu’il souhaitait marquer, à savoir l’achèvement de la construction de sa maison. La fête durait deux jours : le premier, de nombreux discours auxquels nous avons échappé. Et le second, jusque vers le milieu de l’après-midi, des courses de zébus suivies d’un festin. Nous sommes arrivés trop tard pour les rodéos de zébus, la viande de zébu étant en cours de préparation pour le repas et j’ai préféré ne pas regarder. Le rhum malgache coulait à flot chez tous les participants de la fête, où nous étions les seuls Vasahas. Nous y sommes restés une petite demie-heure. Le maire de la commune qui parlait bien français nous a parlé un peu, puis l’instigateur de la fête nous a invités à partager son rhum local : à la mode malgache, dans un seul verre que l’on se passe à tour de rôle. J’ai fait semblant. Retour ensuite à la maison du guide local où nous avons retrouvé notre premier campement. Avec au passage quelques rizières en miroir d’eau assez photogéniques. Nous avons aussi eu droit à un nouveau franchissement de la rivière, mais pas par la même poutre qu’à l’aller. Fin du trek, avec fête des porteurs et danses auxquelles sont sommés de participer les touristes (j’ai réussi à m’éclipser). Le lendemain, de nouveau l’interminable piste jusqu’à Ambavalao (2h30 de trajet, seul accès possible au parc de l’Andringitra) ; les véhicules étaient toujours dans un piteux état mais heureusement plus fonctionnels qu’à l’aller. Pas de marché ce jour là à Ambavalao, pénétrer dans la ville n’a donc posé aucune difficulté. Un nouveau minibus nous y attendait par lequel nous allions terminer le voyage. Mais nous avons commencé par reprendre la RN7… en sens inverse. Direction : la réserve d’Anja, petite forêt dans laquelle vivent un nombre impressionnant de lémuriens, et exploitée touristiquement du fait de sa proximité de la RN7. C’est l’un des seuls endroits de Madagascar où l’on est assuré de voir des lémuriens. La forêt est située au pied de bulbes granitiques qui n’ont rien à envier à ceux de l’Andringitra. Nous nous sommes chaussés pour une petite balade même si cette dernière s’est in fine révélée plus ardue que je ne le pensais. À peine étions pénétrés en forêt que nous aperçu sur le sol un grand nombre de lémuriens à queue rayée. Ils se laissaient approcher sans difficulté. D’autres lémuriens ont été aperçus dans la suite de la balade, mais toujours dans les arbres. Les caméléons constituaient l’attraction secondaire de cette balade. Quittant le règle animal, la balade s’est poursuivie sur un terrain auquel je ne m’attendais pas du tout : on nous a fait escalader quelques gros rochers disséminés en forêt. Certes la vue était appréciable mais les acrobaties que cela nécessitait, assez pénibles. Après deux rochers et alors que nos guides — Danz n’était pas avec nous — s’apprêtaient à en aborder un troisième, j’ai exprimé mon agacement et obtenu que la balade soit écourtée. On nous a raconté que ces rochers (du moins à une certaine époque) étaient utilisés comme sépulture (on enterrait les morts dans certaines anfractuosités des parois, après les avoir fait descendre depuis le sommet à l’aide d’une corde). J’ai quand même trouvé cette explication un peu fumeuse. A suivi un pique-nique « bourgeois » (avec denrées périssables) que Danz nous avait préparé pendant que nous crapahutions. Puis, à la sortie d’Ambavalao et au nord de la ville, nouvelle halte dans un atelier de tissage de soie qui ne m’a guère subjugué. La journée s’est terminée par un transfert jusqu’à la ville de Fianarantsoa (que l’on devrait prononcer Fianarantsou). Nous avons franchi un col, mais j’ai trouvé les paysages de cette zone assez décevants par rapport à ceux que nous avions rencontrés les jours précédents. Cette région est peuplée par l’ethnie Betsileo, c’est celle dont était originaire notre guide Danz. Il nous prodigué des explications sur les traditions de cette ethnie, mais je n’en ai pas noté grand chose. La région produit par ailleurs du vin, sans qu’il soit toutefois possible d’y reconnaître des alignements de vignes comme on en trouve par chez nous. Nous sommes descendus dans un hôtel confortable à Fianarantsoa, une localité assez importante (env. 200 000 hab, c’est la cinquième ville du pays). Je me suis baladé (seul) dans les rues attenantes à l’hôtel, mais la ville ne m’a pas subjugué. J’ai noté que bien qu’étant le seul Vasaha dans ces rues populeuses, le sentiment d’insécurité y était bien moindre que dans nombre de banlieues françaises. Je suis également passé par la gare, la ville étant relié par un train de voyageurs quotidien au port de Manakara sur la côte sud-est de l’île ; mais la gare était fermée sans la moindre trace d’activité. Fianarantsoa possède également un petit centre historique, que nous avons visité en groupe le lendemain. Ce quartier, regroupé autour de la cathédrale catholique, est situé sur la plus haute colline de la ville, à l’image du vieux quartier de Tananarive dont il est inspiré. À l’initiative d’une association (j’imagine d’une ONG…), certaines règles d’urbanisme sont appliquées, les maisons devant par exemple être rénovées en respectant des matériaux et des couleurs. Le quartier est également interdit à la circulation automobile (qui de toutes façons n’était auparavant pas facile). Cela étant, ce quartier n’est pas si ancien que cela (un siècle ou deux tout au plus). En haut de la colline se trouve aussi une école dans laquelle notre groupe a pénétré sans vergogne. Les institutrices y faisait cours à une cinquantaine d’élèves. Nous avons ensuite fait route par la RN7 en direction de la ville d’Antsirabé. Je n’ai fait aucune photo de ce trajet. Nous sommes montés jusqu’à 1700 m d’altitude, les ouvrages d’art de la route qui avaient souffert de la dernière saison des pluies, étaient souvent en réfection. Nous avons quitté le pays Betsileo pour le pays Zafimaniry. Nous avons ensuite fait halte pour déjeuner dans la localité d’Ambositra, un endroit que je n’ai pas photographié et dont je n’ai plus le moindre souvenir. Nous avons déjeuné dans un restaurant typique, occupant environ un tiers de la salle. Dans l’autre partie est venue s’installer une importante smala malgache : deux hommes d’âge mur, et des jeunes couples avec des enfants. Particularité de ces gens, ils parlaient tous français entre eux, ce qui a l’air d’être le marqueur de la classe dominante à Madagascar. D’après Danz, ces deux hommes étaient des députés du coin qui passaient de temps en temps à la télé. Après le déjeuner, le guide nous a laissé une demi-heure pour « chiner » dans le boutiques du lieu, j’ai attendu que le temps passe. À Antsirabé nous retrouvons l’itinéraire du début du voyage : la grande boucle qui s’ouvrait par le Makay est donc bouclée. Par contre, nous ne sommes pas descendus dans le même hôtel qu’à l’aller (l’hôtel du match…), mais dans un autre établissement beaucoup moins bien. Avant d’arriver à l’hôtel, nous avions fait halte dans un truc à touristes qu’il ne vaut même pas la peine de mentionner. Le programme prévoyait le lendemain matin une visite de la ville d’Antsirabé, sans préciser ce qu’il y avait à y voir. Danz à préféré remplacer cette visite urbaine par une randonnée champêtre dans les environs, sous la conduite d’un guide local. Ce qui nous contraint à ressortir les chaussures de randonnée ainsi qu’un t-shirt sale… Cela étant, Danz a eu raison à n’en pas douter, cette randonnée valait vraiment le coup. La balade s’est déroulée près de la localité de Betafo à une vingtaine de kilomètres à l’ouest d’Antsirabé, démarrant de la RN34 par laquelle nous étions déjà passés pour nous rendre dans le Makay. Avant de démarrer, halte en bord de route pour assister à la confection de tuiles à partir de l’argile des rizières. Les tuiles ainsi que les briques sont cuites, ce qui n’a pas toujours été le cas à Madagascar. C’est le français Jean Laborde (1805-1878), qui séjourna à Madagascar et qui fut en particulier un proche de la reine Ranavalona Iʳᵉ, qui introduisit cette technique dans l’île. Cette randonnée champêtre assez exceptionnelle s’est déroulée dans une zone volcanique : toute la roche provient de cônes monogéniques qui datent de 8000 ans environ et qui dominent le secteur (cônes dont nous n’avons pas fait l’ascension mais qu’on peut apercevoir sur plusieurs de mes photos). Qui dit roche volcanique dit terre très fertile, d’où l’importance des cultures qui sont produites ici (avec toutefois des techniques restées très traditionnelles). Début de randonnée au milieu des rizières. Il y a dans cette région et du fait de l’altitude, une seule récolte de riz par ans. Le reste du temps les rizières sont utilisées pour d’autres cultures : soit des légumes, soit de l’orge pour la brasserie d’Antsirabé. (Lorsqu’ils produisent de l’orge, les paysans doivent cultiver les plants OGM fournis par la firme et ne peuvent garder de semences pour l’année suivante. En outre ils doivent rembourser les plants sur le bénéfice de leur récolte a supposer que celui-ci soit effectif.) On rencontre beaucoup de monde dans ces champs. L’agriculture n’est pas du tout mécanisée (même si un peu d’insecticide est parfois utilisé) ; les paysans utilisent même très peu les zébus (qui coûtent cher). Lorsqu’ils ont un peu d’argent leur réflexe est davantage d’acheter du riz que d’investir. Les champs sont retournés à la bêche ce qui représente un travail physique épouvantable. Le repiquage du riz est dévolu aux femmes ce qui est aussi un travail particulièrement pénible. Après avoir slalomé quelque temps entre les champs, nous sommes montés sur une butte où se trouvaient quelques tombes malgaches. De nombreux Malgaches pratiquent encore le culte des ancêtres (parfois de concert avec le christianisme catholique ou protestant). Plus précisément, le culte des ancêtres suppose l’existence d’un être suprême nommé Zanahary, avec lequel on n’a le droit de communiquer que par l’intermédiaire des défunts. Chaque année se pratique une cérémonie de retournement des morts au cours de laquelle les caveaux sont ouverts afin de changer les linceuls qui enveloppent les corps (les modalités exactes de ce rite diffèrent selon les ethnies). Les caveaux contiennent en général un grand nombre de corps (jusqu’à une trentaine), généralement d’une même famille, superposés les uns sur les autres. Chaque défunt est empilé en tenant compte de l’identité de ses voisins (on ne met pas un frère avec une sœur par exemple). Un panoramique (qui vaut ce qui le vaut) pris depuis la butte et montrant la zone dominée par les cônes monogéniques. Traversée ensuite de magnifiques rizières en miroir d’eau, sûrement les plus belles de ce voyage. Le tout sous un soleil que j’aurais bien aimé avoir lors de mon récent voyage au Viêt Nam… Les rizières sont irriguées par un système de canaux, chaque champ étant arrosé à tour de rôle ce qui n’exclut pas les conflits entre paysans… Dans certaines rizières on fait pousser une plante aquatique : cela sert à régénérer le sol, mais cette plante tend à être rarement utilisée de sorte que le sol s’appauvrit graduellement. Passage près du torrent dans lequel les hommes se livraient à un travail harassant (que je n’ai pas photographié) : la construction à mains nues de murs de pierre destinés à empêcher que le cours n’abîme les rizières voisines. Enfin pique-nique non loin d’une église protestante, au-dessus d’un lac de retenue voisin de la ville de Betafo (ce lac semble néanmoins assez pollué). Danz et le guide local ont tiré le pique-nique de leur sac, alors que nous étions à à peine deux cents mètres de l’endroit où nous attendait le véhicule. Au menu, des sandwichs achetés à Antsirabé (comme le second jour), de l’avocat et de l’excellent ananas. La journée s’est poursuivie par une animation assez rigolote quoique « politiquement incorrecte » (mais explicitement prévue par le programme Allibert) : une balade en pousse-pousse dans les rues d’Antsirabé. Il s’agissait bien là de pousse-pousse (charrette tirée par un homme à pied) et non de cyclopousse comme on en voit fréquemment en Asie (et même maintenant à Paris). Les pousse-pousse à Antsirabé existent depuis la nuit des temps, leur travail facilité par le fait que la ville soit assez plate. Quant aux cyclo-pousse, ils ont récemment fait leur apparition à Antsirabe, poussés comme il sied par une ONG bien pensante qui aimerait bien les voir supplanter les pousse-pousse. Mais ils passent pour être plus dangereux car leurs freins ne sont pas toujours fiables. Donc, six pousse-pousse ont été affrétés par notre guide Danz pour un aller-retour jusqu’au marché. Il y avait quand même une petite pente ascendante au retour que nos tireurs ont affrontée vaillamment. Précisons quand même que les pousse-pousse ne sont pas utilisés principalement par les touristes, mais bien par les locaux (c’est une institution à Antsirabé, on en voit dans toute la ville et dans les environs). Même si, évidemment, le prix « vasaha » est sans commune mesure avec celui payé par les Malgaches. Quant au marché, le voici. Il n’est pas très grand. La balade s’est terminée par un petit détour par la cathédrale catholique d’Antsirabé puis par la gare désaffectée. Retour dans la foulée à Tananarive par la RN 7, une portion que nous avions déjà parcourue à l’aller. Peu à dire sur ce retour, si ce n’est un nouvel arrêt à Ambatolampy (la ville de notre déjeuner de l’aller) ; cette fois-ci pour aller visiter la fabrique d’objets en aluminium. C’est de l’aluminium de récupération qui est utilisé par les artisans (canette de coca par exemple) : il n’y a en effet aucun minerai de bauxite dans l’île. L’aluminium est fondu (à 660°C, et dans des conditions défiant toute norme de sécurité) puis coulé dans des moules en terre. La confection de ces moules utilise la terre volcanique du coin, et c’est d’ailleurs pour cette raison que c’est Ambatolampy qui fournit toute l’île en objets en aluminium. Les artisans ont le savoir-faire de réaliser un moule à partir d’un objet modèle, afin de faire couler l’aluminium liquide dans le moule dans le but d’obtenir une copie du modèle. Le moule ne sert qu’une seule fois. Ensuite évidemment il y a un travail de finition (polissage de l’objet réalisé). Un objet de très petite taille a été fabriqué en direct devant nous. Évidemment, fabriquer un objet de grande taille comme une marmite demande bien davantage d’efforts, même si le procédé est exactement le même. Pendant toute notre visite, le patron de l’atelier qui était assis dans un coin ne quittait pas ses ouvriers de l’œil. J’ai terminé le trajet à l’avant du bus à la place du guide : Danz ne souhaitant pas cette place, il nous la laissait à tour de rôle (mais j’ai été le dernier à m’y coller car je n’y tenais pas tellement non plus). Le chauffeur était certes assez prudent et restant assez longtemps derrière des camions plutôt lents. Néanmoins, il fallait bien finir bien par doubler, le klaxon étant alors l’accessoire indispensable (les lignes continues sont de toutes façons inconnues à Madagascar). La nuit a fini par tomber et nous avons terminé la route dans l’obscurité ce qui n’est pas très rassurant (des charrettes à zébus non éclairées circulent ça et là sur la route). Mais rien de fâcheux ne s’est produit. L’arrivée à Tananarive a été très encombrée malgré l’heure tardive. J’ai noté que nous nous sommes trouvés bloqués dans une ruelle derrière une 2CV (en fait un taxi) en panne sèche que ses quatre occupants s’ingéniaient à pousser, en pleine côte ! Descente dans le même hôtel qu’au début du voyage. La journée suivante était entièrement consacrée à la visite de la capitale malgache. Une visite que notre guide Danz a organisée sous la forme d’une « randonnée urbaine » d’une dizaine de kilomètres qui a duré la matinée, avant de passer l’après-midi à du tourisme plus traditionnel (vieux quartier, palais de la reine, etc.). Notre bus nous a emmenés à 8h30 de la périphérie nord de la ville, au pied d’un gratte-ciel d’une centaine de mètres de haut et assez récent (que je n’ai pas photographié), surnommé tour Orange du fait qu’il est principalement occupé par la société éponyme. Puis nous nous avons démarré la randonnée depuis un quartier résidentiel où se trouve la résidence (bien gardée) de l’ambassadeur de France (d’où le drapeau sur la photo). Quartier où l’on rencontre également des rizières que des gens cultivent, une étrange incursion de la campagne à la ville. Non loin de là se trouve un lac (artificiel je pense), le lac Masay (on aperçoit au fond la vieille ville dominée par le palais de la Reine). Certains ouvriers présents dans ces rizières semblaient se livrer à un travail physique absolument inimaginable : pomper à la main (à l’aide de bidons) l’eau d’un champ vers un autre (à vue d’œil, une trentaine de centimètres de différence de niveau). Les deux hommes qui affairés à cette tache puisaient l’eau en permanence pour la déverser dans le champ voisin. Qu’il n’existât aucune mécanisation pour effectuer cette tâche paraissait incompréhensible. On rentre ensuite petit à petit dans la ville (ce n’est pas toujours très joli à voir). Les notes que j’ai prises en voyage ne sont pas toujours en rapport direct avec les photos. Nous sommes passés près d’un grand collège financé par les Chinois, avec inscriptions bilingues devant l’établissement, et cours de mandarin dispensé aux étudiants. Plus loin, le village qu’a fait édifier à destination des plus pauvres le père Pedro (Pedro Opeka), un prêtre argentin vivant à Tananarive et très respecté de la population. La publicité sur la maison (ci-dessus en bas à droite) indique combien le paiement par téléphone mobile s’est généralisé à Madagascar (sans toutefois totalement remplacer les billets papier — lesquels sont sales et pléthoriques comme dans beaucoup de pays — mais il est possible que cela vienne). Cela se fait par SMS, les téléphones mobiles des Malgaches étant la plupart du temps des modèles basiques (les ordiphones sont encore très peu répandus dans le pays). Ci-dessous une une fontaine publique : les habitants (qui en général n’ont pas l’eau courante) viennent chercher l’eau avec des bidons de 5 litres. Ces fontaines ne donnent d’ailleurs pas toute la journée. Nous somme brusquement tombés sur un combat de coqs organisé en pleine rue (il ne s’agissait pas en réalité d’un véritable combat, mais plutôt d’une sorte d’entraînement). Les combats de coqs (qui donnent lieu bien évidemment à des paris) sont selon notre guide « quasi légaux » à Madagascar. Nous avons achevé la randonnée par l’ascension de la colline de Manjakamiadana où se trouve le cœur historique de la ville. Le dénivelé est de l’ordre de 150 m (alt. 1460 m), que nous avons franchi dans des ruelles très en pentes, le plus souvent par des escaliers. Nous avons également franchi une porte fortifiée du XIXᵉ, pouvant à l’origine être fermée grâce à un énorme disque monolithique (plus d’un mètre de diamètre) que l’on faisait rouler pour obstruer le passage. Le disque est toujours présent mais brisé, il n’a plus dû servir depuis fort longtemps. Tananarive signifie le village des Mille guerriers. La ville fut fondée au XVIIIe siècle par un roi (Andriamasinavalona ?) qui épousa douze princesses vivant chacune sur une colline alentour, permettant ainsi d’étendre son royaume. Le roi Radama Iᵉʳ qui régna entre 1810 et 1828 réalisa l’unité de Madagascar avec l’aide des Anglais (qui lui avaient fourni les canons). Il semble que la contrepartie ait été l’évangélisation de l’île. C’est par réaction que Ranavalona Iʳᵉ qui régna ensuite, persécuta les chrétiens. Après avoir déjeuné dans un restaurant pour Vasahas au sommet de la colline, place aux visites « culturelles » de la colline de Manjakamiadana (laquelle je dois le reconnaître ne m’a pas subjugué). Cet édifice aux allures de temple grec servait de palais de justice au XIXᵉ siècle. Apparemment la justice était particulière puisqu’elle constituait à empoisonner le justiciable : s’il survivait cela signifiait qu’il était innocent. On poursuit avec le palais de la reine Ranavalona Iʳᵉ (qui a régné de 1828 à 1861), aussi appelée Rabodonandrianampoinimerina (je plains quand même les écoliers de Madagascar qui doivent s’en coltiner le nom…). Le palais (ou Rova) fut d’abord construit en bois à la demande de Ranavalona Iʳᵉ sur les plans de l’architecte français Jean Laborde (que nous avons déjà évoqué) ; construire en pierre n’était pas possible à cette époque, ce matériau étant réservé aux tombeaux dans la culture malgache. Une vingtaine d’années plus tard néanmoins, un architecte britannique, James Cameron, entoure l’édifice en bois d’une protection en pierre, sur le modèle de la tour de Londres. Le palais originel a entièrement brûlé le 6 novembre 1995, avec tous les objets anciens qu’ils contenait. Une perte énorme dont je n’avais jusqu’alors jamais entendu parler (sans doute qu’à ce moment nos médias étaient trop occupées avec les contestations cégétistes). La partie en pierre, fragilisée, a été restaurée depuis (sur souscription publique !), mais il ne semble pas à l’ordre du jour que le palais en bois sois reconstitué. (L’intérieur de l’édifice n’était toujours pas visitable en 2018, la réhabilitation n’étant pas terminée, mais il semble qu’il ait rouvert tout récemment aux visiteurs). Ci-dessous, le musée Andafivaratra (le palais du Iᵉʳ ministre à l’époque royale). Cette édifice en pierre abrite les collections qui ont pu être sauvées lors de l’incendie du palais de la Reine. Problème, il est aujourd’hui fermé car il menace ruine ! Aucun plan de sauvetage ne semble non plus prévu pour l’heure. Passage devant un important lycée de Tananarive, l’ex lycée Gallieni (semble être aujourd’hui une université). La grève enseignante que j’ai évoquée plus haut était toujours d’actualité. Nous avons achevé la balade avec la cathédrale catholique d’Andohalo (cathédrale de l’Immaculée Conception). Elle aussi du XIXᵉ siècle (1873-1890). Nous sommes entrés à l’intérieur, ce fut la seule fois du voyage où nous trouverons une église ouverte. La cathédrale contient un reliquaire. À côté, une statue de la Vierge géante, tournée vers la pente vers l’ouest, est tout juste achevée et attendait son inauguration. (En contrebas, dans le stade, était en cours un meeting politique : l’élection présidentielle était pour bientôt. Le guide s’attendait à pléthore de candidats. Il n’y a pas de système de signatures comme en France ; tout le monde peut se présenter, les candidats versent une caution dont ils sont remboursés s’ils récoltent 5 % des voix). Nous avons terminé la journée par le jardin zoologique de Tananarive (je ne pense pas que cette visite était au programme d’Allibert). Ce jardin zoologique est un parc à l’accès payant, havre de paix dans la ville, fréquenté non par des Vasaha mais par des Malgaches aisés (cette possibilité de les croiser constituer d’ailleurs l’un des intérêts de cette visite). Bon nombre de ces familles s’expriment en français. Parmi elles, le guide reconnaîtra la fille d’un ancien président de la République malgache. Néanmoins, notre principale motivation pour visiter ce zoo était les crocodiles, dont nous n’avions eu cesse de guetter en vain l’apparition dans le Makay. Et je dois dire que, face à ses monstres, j’étais bien content de ne les avoir croisés plus tôt. Je pense notamment à cette fameuse varappe à laquelle nous avons échappé in extremis, laquelle aurait dû se dérouler au-dessus d’une mare grouillante de ces sauriens. Ou alors, nous trouver nez à nez avec l’un de ces spécimens dans ces gorges étroites au fond desquelles nous progressions cahin-caha dans nos inconfortables chaussures d’eau. Le parc vaut également pour ses lémuriens de différentes espèces. On a évidemment moins de mérite de les contempler ici qu’au plus profond des cañons sylvestres du Makay. Également, un potamochère, sorte de phacochère malgache, dont nous avions pu voir les traces dans le Makay. On pouvait aussi y admirer un fossa, sorte de félin, qui est un prédateur des lémuriens. Nous avons consacré notre ultime journée à Madagascar à la visite de la colline royale (rova) d’Ambohimanga, un site historique situé à une vingtaine de kilomètres au nord de Tananarive. Une visite explicitement inscrite au programme d’Allibert mais réservée aux groupes pénalisés par les rotations aériennes : il faut croire que c’était notre cas. Notons que nous avons failli ne pas visiter ce site car certaines personnes auraient préféré le parc aux lémuriens. Cela étant (à l’instar d’ailleurs de Tananarive), Ambohimanga n’est de toute évidence pas ce que j’ai préféré à Madagascar. La colline d’Ambohimanga présente toujours un caractère sacré aux yeux des Malgaches ; ainsi il convient de respecter certains rites pour s’y rendre, comme ne pas manger de porc dans les 24 heures. Elle est également inscrite au patrimoine de l’Unesco. La visite a débuté par une petite randonnée de 6 km, qui a démarré au pied de la colline. Un (nouveau) guide local nous accompagnait, mais je n’ai guère goûté ces explications donnant lieu à des arrêts intempestifs et répétés en pleine montée, de nature à casser le rythme. Une fois sur la colline, nous avons traversé plusieurs villages et on nous a même fait entrer dans la cuisine d’une maison. Les conditions de vie y étaient tout de même plus qu’indigentes. La cuisine était tellement enfumée que j’ai préféré en ressortir presque immédiatement. Arrivée sur le site archéologique, lequel comme à Tananarive pouvait être fermée par un énorme disque de pierre. Le disque était ici encore plus gros, il fallait une dizaine d’hommes pour le mouvoir. Ensuite et alors que nous n’avions vu personne de la matinée, nous avons trouvé la foule des touristes. Pas de Vasahas, mais des écoliers malgaches qui étaient venus en nombre. Le site a pris de l’importance sous le règle du roi Andriamasinavalona (1675-1710) ; toutefois le bâtiment le plus ancien, le palais Mahandrihono, construit en bois, date du règne d’Andrianampoinimerina (1788-1810). Les photos sont interdites à l’intérieur (et on n’en trouve pas non plus sur Internet…). Le roi vivait là dans une pièce unique ; son lit était situé dans un coin, perché à trois mètres de hauteur. Dans l’autre coin, le lit de son épouse, c’est lui qui descendait la rejoindre. Lorsqu’un visiteur se présentait, le roi se cachait au faîte de la bâtisse (qui fait bien quinze mètres de haut), la reine recevait seule le visiteur et le roi entendait tout. Si le visiteur lui faisait bonne impression, le roi apparaissait mais s’arrangeait pour ne pas dévoiler sa cachette. Les palais des reines Ranavalona Iʳᵉ et II sont plus récents (et dotés d’un étage), ils furent édifiés avec l’aide de Jean Laborde. À l’intérieur, du mobilier du XIXᵉ s. Le tombeau de ces reines et de ce roi se trouve toujours à l’arrière de l’enceinte. Quoiqu’un peu brumeuse, la vue depuis la colline d’Ambohimanga porte jusqu’à Tananarive. On peut également distinguer l’aéroport. Fin de la visite et du voyage à Madagascar. En rentrant nous avons fait halte dans un hypermarché (Jumbo Score), non loin du départ de la balade de la veille. Un supermarché à l’occidentale, dont les prix affichés (en dizaines ou centaines (de milliers ?) d’ariarys pour le moindre article) étaient à la portée de bien peu de Malgaches. Presque pas un client dans l’établissement en dehors de nous, mais ce n’était peut-être pas l’heure de pointe. Autre particularité du magasin, la totalité des inscriptions étaient rédigées en langue française, le malgache n’avait pas droit de cité. Au rayon librairie on pouvait trouver des livres scolaires, y compris scientifiques. |