Les hautes chaînes du Jura

Les hautes chaînes du Jura (randonnée CAF)

C’est une randonnée CAF que j’avais déjà programmée un an plus tôt, mais qui avait été annulée en raison de la grève SNCF. La version de cette année 2019 est un peu plus longue (cinq jours au lieu de quatre). Malheureusement, nous avons eu une météo assez difficile, avec de la neige le second jour et une pluie ininterrompue le dernier (les autres journées étant acceptables).

Le séjour commençait par une nuit d’hôtel à Bellegarde que j’ai rejointe en TGV directement à la sortie du travail, prenant en outre un train une heure plus tard que le reste du groupe. L’hôtel était juste à côté de la gare. Quant à la ville de Bellegarde, je l’ai à peine vue, ce qui ne m’a pas offert l’occasion de réviser la sinistre impression que cet endroit m’avait laissée lors d’un passage antérieur.

Arriver par un TGV différent m’a apporté le privilège de dormir seul dans une chambre, je n’ai trouvé le groupe que le lendemain au petit déjeuner. Le séjour a ensuite débuté par un court trajet en bus local, entre Bellegarde et le village de Farges situé dans le pays de Gex (alt. : 500 m environ). Le temps était meilleur que ce qu’avaient annoncé les prévisions météorologiques, alternant entre soleil et passage nuageux. Ainsi, nous avons pu démarrer la montée sous le soleil. Ce qui n’empêchait pas aux nuages de s’accrocher aux crêtes qui étaient partiellement enneigées.

Et ce sont ces crêtes qu’il allait maintenant nous falloir gagner : 800 m de dénivelé d’une traite, principalement sur des sentiers forestiers. Ci-dessous, le refuge de Pré Bouillet situé à mi-hauteur. Il était occupé mais apparemment pas ouvert. Plus loin, la cabane des Gardes (la frontière a dû passer par ici à une époque).

Avec l’arrivée au col du Sac se termine le plus gros de la montée. Nous allons ensuite pendant une bonne partie de la journée longer la crête, en forêt, alternant les montées et les descentes. Nous trouverons souvent de la neige résiduelle qu’il nous faudra traverser.

Le refuge non gardé de la Poutouille, près duquel nous avons pique-niqué. Une partie du chalet était ouverte, nous avons envisagé de pique-niquer à l’intérieur (il ne faisait tout de même pas très chaud), pour finalement opter pour une halte contre le mur du bâtiment, du côté abrité du vent.

On reprend ensuite l’itinéraire sur les crêtes.

Autre refuge non gardé, celui du Gralet (alt. 1450 m). Cette fois ci nous sommes entrés à l’intérieur pour une courte halte. S’y trouvait un poêle assez pittoresque (mais que nous n’avons pas utilisé).

Dommage que ce chalet n’ait pas été gardé, cela nous aurait épargné la descente qui allait suivre, ainsi que l’éprouvante remontée du lendemain matin ! Notre gîte du soir se trouvait en effet à Chézery-Forens dans la vallée de la Valserine, 587 m d’altitude seulement, donc 900 m en contrebas. La pénible impression d’avoir monté ce matin pour rien. J’ai trouvé le début de la descente un peu scabreux, hors GR et sur un versant assez raide. C’est devenu ensuite plus facile, le sentier progressant dans une jolie forêt jurassienne.

Quelques hameaux traversés dans la dernière partie de la descente : l’Éperry, Bellaigue.

Et finalement, Chézery-Forens.

J’ai beaucoup aimé le bâtiment abritant le gîte du soir, le « relais des Moines ». Comme son nom l’indique, il s’agissait des restes d’une ancienne abbaye, l’abbaye de Chézery, fondée en 1140, et presque entièrement rasée à la Révolution ; exception faite de ce bâtiment, l’ancienne hostellerie de l’abbaye, dont les murs remonteraient au XIIe siècle.

Nous étions prévenu que la météo de ce séjour ne serait pas fameuse. Nous avons eu confirmation le lendemain matin en découvrant les hauteurs de la vallée totalement recouvertes de neige fraîche. Nous étions pourtant au mois de mai ! Manque de chance, c’est justement en direction de ces hauteurs saupoudrées qu’il nous allait falloir remonter aujourd’hui.

Par chance, il ne pleuvait pas lorsque nous avons démarré l’étape. Le tout début était en fond de vallée, sans guère monter dans un premier temps.

Rare rayon de soleil, peu après le lieu-dit Fontaine Bénite. Ci-dessous, vers le hameau de la Rivière.

Cette passerelle « himalayenne » (présentée comme telle sur le panneau indicateur) a constitué la distraction de la journée. Je suis passé dans les premiers pour ensuite photographier un à un mes compagnons en train de traverser.

J’ai connu d’autres passerelles himalayennes mais c’était la première que je franchissais qui soit constituée de rondins (heureusement qu’il y avait le filet de sécurité, et que le vide en-dessous était sommes toutes raisonnable).

La véritable montée début juste après cette passerelle. Nous avons d’abord gravi ce qui ressemblait furieusement à une ancienne moraine (le relief au-dessus faisant par ailleurs penser à un cirque glaciaire). Ensuite, nous avons emprunté une route forestière en lacets, tandis que non pas la pluie mais les flocons s’étaient remis à tomber. Le paysage est devenu de plus en plus enneigé au fur et à mesure que nous progressions dans notre ascension.

Nous avons fini par trouver une véritable ambiance hivernale. Avec des sapins couvert de neige.

Pendant la montée, à un moment où le ciel s’est un petit peu dégagé, laissant apercevoir les plateaux totalement recouverts de neige.

Nous nous demandions où nous allions bien pouvoir pique-niquer dans ces conditions. Par chance, une fois dans les alpages, nous avons finalement atteint le chalet isolé de Derrière Thoiry, dont une salle était ouverte même si son confort était plus que spartiate. Et contrairement à la veille, nous n’en avons pas dédaigné l’intérieur.

Nous avons ensuite quitté ce chalet pour reprendre notre progression dans les champs de neige, sous un inattendu rayon de soleil.

Cette relative amélioration nous a permis d’effectuer jusqu’au bout l’ascension du Reculet (1719 m), le second sommet du Jura (les cinquante derniers mètres effectués en aller-retour auraient en effet pu être court-circuités).

On aura remarqué sur la troisième photo la vue sur le lac Léman et la ville de Genève. Par contre, je n’ai pas réussi à apercevoir le jet d’eau, contrairement à une autre fois. Quant au mont Blanc en arrière-plan, il ne fallait pas trop en demander.

Nous avons ensuite repris la progression le long de la crête, en direction du Crêt de la Neige le point culminant du Jura. Crête qui se révèle dans ce secteur très large (avec dolines et vaux perchés) ; et même, chose surprenante, par endroits boisée.

Voici maintenant le Crêt de la Neige (alt. 1720 m), à peine plus haut donc que le Reculet, et qui constitue un sommet bien moins marqué. Pour rappel, c’est ma seconde ascension du Crêt de la Neige, j’étais déjà venu à raquettes le 1er janvier 2011.

Moi qui espérais revoir ce sommet dans une atmosphère plus estivale, j’en ai été pour mes frais.

Après le Crêt de la Neige le plus gros de l’étape était derrière nous, mais nous n’étions tout de même pas arrivés. Une bonne heure de descente nous séparait encore du refuge (gardé) de la Loge où nous allions passer la nuit. Le sentier était bien balisé (évitant sans difficulté les dangereuses zones de lapiaz), mais sur quelques passages un peu plus pentus la progression dans la neige pouvait s’avérer un peu difficile. Je n’avais pas apporté de bâtons, mais heureusement mes chaussures presque neuves (je les avais achetées pour partir à Madagascar l’été précédent) adhéraient très bien.

Fin de balade dans une véritable ambiance de vacances au ski. D’ailleurs nous nous trouvions dans un domaine skiable, celui de Lélex, mais aucune remontée mécanique ne fonctionnait plus à cette date tardive.

Le refuge de la Loge n’est pas un refuge du CAF, il est géré par la municipalité. Mais c’est un refuge à l’ancienne sans douche, ce que j’ai l’heur de préférer (au moins pas de problème de queue à la douche !). Il paraît que c’est bien évidemment l’Europe qui pousse les gestionnaires de refuge à des travaux coûteux pour installer des douches. Sans parler des accès handicapés (ce n’est pas une blague !).

Le temps était plutôt beau le lendemain et Jean-Marc, notre organisateur, a conservé l’ininéraire prévu par les crêtes. Nous avons néanmoins marché dans la neige la plus grosse partie de la journée.

On débute par une un peu fastidieuse traversée de domaine skiable.

Les jonquilles semblaient avoir été surprises par la neige…

Ascension hivernale d’un premier sommet, le Colomby de Gex (1688 m).

Même si le contraste de la photo est déplorable, c’est bien le mont Blanc dont on pouvait distiguer la silhouette dans la brume.

Suite et fin de l’ascension.

Ensuite, le sentier longe une falaise assez marquée dont fort heureusement Jean-Marc, prudent, ne s’est jamais véritablement approché. Nous avons pique-niqué un peu plus loin, en contrebas de la crête et à un relatif abri du vent.

Dernier sommet de la journée, le Montrond (en un seul mot, 1596 m). Nous aurions dû continuer la crête encore un peu, jusqu’au petit Montrond (la montagne coiffée d’une antenne), mais Jean-Marc a préféré écourter un peu en raison des conditions.

Depuis le Montrond on peut deviner, vers le nord-est, la Dôle, puis le mont Tendre, deux sommets du Jura suisse que j’eus l’heur de gravir à raquettes fin 2010.

C’est en amorçant la descente que nous avons croisé les premières personnes de la journée. Descente qui nous a vus de fait rapidement regagner la « civilisation » : tout d’abord une route forestière encore partiellement recouverte de neige, puis bientôt la station de ski du col de la Faucille. La station était fermée, mais un restaurant d’altitude fonctionnait encore, un groupe de pensionnaires d’un EHPAD de la région y était ce jour là de sortie. Nous avons à cet endroit fait halte pour un café, ce qui s’avèrera être la seule fois du séjour.

Dernière descente (par une piste de ski verte slalomant entre de dangereuses barres rocheuses), jusqu’au village de Mijoux (alt. 984 m) où se trouvait notre gîte.

Le village de Mijoux possède une particularité géographique : le bourg, localisé sur la rive gauche de la Valserine, se trouve dans le département de l’Ain ; mais son église, sur l’autre rive, est située dans celui du Jura. Apparemment cette séparation entre deux provinces remonte au début du XVIIe siècle.

Quatrième journée de marche, toujours sous un temps convenable. La journée débutait de nouveau par une montée, mais bien moindre que les deux premiers jours. Progression par un très beau sentier forestier jusqu’à rejoindre assez rapidement le plateau.

Une fois sur le plateau (appelé forêt de Massacre en référence à une bataille du XVIe siècle contre les Genevois), j’ai trouvé la journée un peu fastidieuse. Les névés étaient plutôt rares dans la matinée. Sur l’un d’entre eux (ci-dessous), des traces qui nous ont semblé être celles d’un lynx.

La neige est ensuite devenue plus abondante, avec par endroits des traces de ski de fond qui semblaient toutes fraîches.

Suivant le GR 9, le programme prévoyait ensuite l’ascension du Crêt Pella (alt. 1495 m), point culminant du département du Jura. Mais l’accès était barré en période de nidification. C’est à toute une partie de l’itinéraire que nous avons dû renoncer. Nous avons pique-niqué à cet endroit.

De ce fait, le seul itinéraire possible était maintenant de suivre la route… entièrement recouverte de neige. Mais sur la route étaient aménagées des pistes de ski de fond qui étaient toujours ouvertes ! Nous avons progressé en essayant de ne pas trop piétiner la trace. La piste était toujours utilisée, notamment par une jeune femme très athlétique qui semblait être une sportive à l’entraînement. Elle était tout de même obligée de déchausser par endroits (ce qui nous permettait de la rattraper un peu).

Nous avons continué assez longtemps avant de pouvoir enfin quitter la route (les sentiers étaient d’ailleurs barrés en plusieurs endroits). La neige a ensuite cessé peu à peu.

Ci-dessous le belvédère des Dappes offrant une vue sur la Dôle (déjà évoquée), le domaine skiable de la station des Rousses ainsi que dans le lointain sur les Alpes suisses (sommets difficiles à identifier). La frontière suisse passe à seulement quelques centaines de mètres du point où nous nous trouvons, le versant opposé se trouve donc en Suisse.

Une dernière descente nous a fait gagner le plancher des vaches, même si nous avons quitté le domaine skiable d’une manière sans doute pas très régulière.

Nous avons passé notre dernière nuit au gîte de la Grenotte, un lieu où j’avais dormi deux nuits en 2010 et dont j’avais sur ces pages critiqué le penchant écolo à outrance. Ce second passage en ces lieux m’amènera à tempérer quelque peu ce jugement ; il n’empêche que ce n’est pas non plus de ce séjour le gîte que j’ai préféré.

Le cinquième et dernier jour aura été de loin le plus éprouvant de tous. Car conformément à ce qu’avait annoncé la météo, c’est sous une pluie ininterrompue que nous avons effectué la dernière étape. Étape qu’il n’a nullement été possible de raccourcir (aucun transport en commun par exemple ne fonctionnant en ce jour férié du 8 mai).

Ci-dessous, le fort des Rousses que nous avons traversé avant d’arriver à la station de ski éponyme. Il s’agit d’un ancien centre commando militaire, reconverti depuis une quinzaine d’années (suite à son abandon par l’armée) en centre de loisirs sans pour autant changer de thématique. Le fort ne date pas de Vauban mais du XIXe siècle.

Après les Rousses, nous avons poursuivi notre descente jusqu’à Morez, terme de notre randonnée et où nous devions prendre le train en fin d’après-midi.

Nous aurions pu nous croire presque arrivés, mais non : Morez est un bourg construit en fond de vallée et s’étirant sur des kilomètres. La gare se trouve en bas et le GR, plutôt que traverser cette ville il est vrai guère attrayante, remonte sur l’autre versant pour progresser ensuite en forêt. Malgré le temps, Jean-Marc n’a nullement raccourci la balade, il faut dire que les échappatoires eussent conduit à emprunter des descentes assez raides et sans doute glissantes.

Mon récepteur GPS de randonnée (que je possédais depuis fin 2013 et que j’avais beaucoup utilisé en toutes sortes d’endroits) n’a pas supporté cette humidité : il s’est bloqué puis arrêté pour ne plus redémarrer ensuite. J’ai dû reconstituer manuellement le trajet de cette randonnée (sur 5 jours !), puis par la suite, acheter un nouvel appareil du même modèle.

Nous sommes finalement arrivés à Morez sur les 15 h, sans avoir déjeuné. Nous étions trempés. Le seul commerce ouvert dans la ville étant un kébab (endroit qui ne faisait guère envie et dont le tenancier avait du reste une tête patibulaire), nous avons finalement gagné la petite gare, heureureusement ouverte et chauffée. Étant donné que le prochain train qui était le nôtre ne partait que trois heures plus tard, nous avons eu tout loisir de nous étaler, de faire sécher nos affaires et de pique-niquer à l’intérieur de la gare. La pluie n’a pas cessé une minute pendant que nous nous trouvions dans cette gare.

Le retour en train s’est effectué sans encombres, en dépit des deux correspondances dont la première assez serrée (5 minutes). La voie ferrée passant à Morez est assez spectaculaire avec ses viaducs et ses tunnels, il s’agit d’ailleurs d’un train touristique (dite ligne des Hirondelles). Nous avons pris le TGV à Dole, lequel avait un quart d’heure de retard. Par contre, il ne pleuvait plus.