Volcans de Bali, Lombok et Java

Indonésie : volcans de Bali, Lombok, Java

Un voyage assez inhabituel dans mon catalogue, loin des déserts et paysage d’altitude auxquels je vous ai le plus souvent habitués. Ici, place aux tropiques, à la végétation luxuriante, à la mer et aux cocotiers ! Même si mon domaine de prédilection reste le minéral, des fois ça ne fait pas de mal de changer non plus. Cela étant, en Indonésie on trouve aussi des volcans, donc certains assez hauts… et même un petit désert à Java, dans la caldeira du Bromo…

Bien qu’il s’agisse par ailleurs d’une destination sensiblement plus touristique que nombre de mes voyages (c’est une destination de tourisme de masse, plage, farniente et boîtes de nuits…), j’ai effectué ce déplacement dans des conditions assez particulières. Alors que le départ avait été confirmé au moins deux mois avant la date prévue (début juillet 2007), le groupe s’est trouvé réduit à trois suite à des désistements. Mais le voyage n’a pas été annulé pour autant. Et partir à trois avec un guide européen (un luxe malheureusement devenu bien rare ces dernières années), c’est convivial et sympathique. Comme l’étaient mes deux congénères, un ingénieur à la retraite et… un céréalier ! (je n’en ai pas rencontré d’autre de tous mes voyages, cela va sans dire).

Mais ce voyage a bien failli être annulé à la dernière minute… et pour une tout autre raison. Comme je le détaillerai plus bas, le programme prévoyait la visite de trois îles indonésiennes, Bali Lombok et Java, avec des liaisons d’île en île tantôt en tantôt en bateau, tantôt en avion. En empruntant dans ce dernier cas la compagnie nationale indonésienne, Garuda Indonesia (donc vol régulier, de quoi être rassuré). Mais voilà qu’une semaine avant notre départ, la commission bruxelloise de placer cette compagnie sur la liste noire des compagnies infréquentables. Impossible pour Terdav de changer les réservations au dernier moment. Donc la veille de mon départ, en rentrant du boulot, je trouve un message de Terdav sur mon répondeur. Je les rappelle et ce n’est pas la joie, on m’explique la situation et la seule solution semble de remplacer tous les trajets en avion par des traversées maritimes (traversées qui soit dit en passant ne sont pas en Indonésie nécessairement plus sûres mais là n’est pas le problème). Et comme ces traversées prendront du temps, une part importante du programme sera supprimée (en clair la visite de Yogyakarta). Cette perspective ne m’enchante guère. Mais par chance il existe un plan B : signer une décharge et prendre quand même la Garuda. Mais pour cela il faut que tout le groupe soit d’accord. Par chance, obtenir l’unanimité à trois est plus facile qu’à quinze. Ça n’aura de fait pas posé de difficulté, mais nous n’aurons la confirmation du programme que le matin du départ, l’un de nous trois n’ayant pas pu être joint auparavant. Une péripérie qui nous aura valu le déplacement à Roissy à une heure matinale, du responsable commercial de Terdav.

Mais nos péripéties avec l’aérien n’étaient pas terminées pour autant. Denpasar à Bali, où nous devons atterrir, n’est pas la porte à côté. Comme bien souvent notre vol n’était pas direct, nous volions (pour le trajet international) sur la Cathay Pacific qui est une compagnie hong-kongaise dont on suppose qu’elle est sûre ; donc cela faisait 11 h de vol jusqu’à Hong Kong, plus 4 jusqu’à Denpasar. Mais ça c’était en théorie. Parce qu’un problème technique a été détecté sur l’avion à Roissy, nous bloquant pendant cinq heures le temps que ce soit réparé (on nous a de ce fait déportés dans une salle d’embarquement à l’écart, d’où nous avons bien malgré nous assisté au pot de fin d’année du personnel d’Aéroports de Paris précédé des discours de la hiérarchie… avant tout de même de pouvoir goûter aux restes de petits fours). Donc décollage avec 5 heures de retard et… seulement trois heures de battement prévues à Hong Kong. Donc problème. Heureusement la Cathay a bien fait les choses si l’on peut dire, tous les passagers en correspondance ont été reclassés par leurs soins sur une autre compagnie. En ce qui nous concerne ça a été la compagnie China Airlines qui comme son nom ne l’indique pas est une compagnie taïwanaise. Donc passage par Taïpei, je pensais que c’était la guerre froide entre la Chine et l’ancienne Formose mais il y a quand même des vols directs. En tout deux heures de vol supplémentaires sans compter les attentes et le retard du dernier vol pour Bali. D’où une arrivée (vers minuit) avec 9 heures de retard par rapport à l’horaire prévu, notre guide n’était pas au courant de ces péripéties et nous attendait à l’aéroport depuis tout ce temps ! Il n’était guère enchanté… Quant à nous ça nous faisait une après-midi passée à Roissy, une nuit écourtée dans l’avion, une journée passée entre les aéroports d’Extrême-Orient et pour finir une demi-nuit encore dans l’avion : sympathique. Et pour couronner le tout, comme on pouvait d’ailleurs s’y attendre, nos bagages ne nous avaient pas suivi, nous avons ensuite dû nous en passer pendant quarante-huit heures.

 

Il est tout de même temps maintenant de parler de ce voyage et d’en annoncer le programme. L’Indonésie est un très vaste pays : 3 fuseaux ouverts, 17000 îles, dont les plus grandes sont Bornéo (île équatoriale partagée avec la Malaisie et le Bruneï, la partie indonésienne qui est la plus importante s’appelant Kalimantan), Sumatra, Irian Jaya (la moitié de la Nouvelle Guinée), les Célèbes (Sulawesi), et des archipels comme les Moluques et les îles de la Sonde. Des îles qui géographiquement se rattachent à l’Asie pour certaines et à l’Océanie pour d’autres. L’Indonésie est le quatrième pays le plus peuplé du monde, l’île de Java notamment (où se trouve la capitale Djakarta) est particulièrement dense. L’islam est la religion dominante (l’Indonésie est de loin le premier pays musulman par sa population), mais on trouve aussi des hindous (notamment à Bali), ainsi que d’autres religions. 

Notre voyage s’est déroulé dans trois des îles de la Sonde : Bali tout d’abord, l’île la plus touristique, culturellement assez différente des autres car majoritairement hindoue, dotée de nombreux temples et monuments et remarquable aussi par ses paysages tropicaux ainsi que ses volcans. Ensuite Lombok, à l’est de Bali, que l’on visite surtout à cause de l’extraordinaire volcan qui s’y trouve, le mont Rinjani (3726 m). Et enfin, repassant par Bali, nous nous rendons à Java à l’ouest, la plus grande et la plus peuplée des trois, également tropicale et également volcanique. Java recèle des trésors (touristiques) exceptionnels, tant du côté de ses volcans (le sulfureux Kawa Ijen rendu en France célébrissime par l’inénarrable Nicolas Hulot, pourtant précédé (pour sa navigation sur le lac d’acide) par le volcanologue Maurice Krafft ; la fantastique caldeira du Bromo, et le très actif et spectaculaire Semeru) que de ses monuments, notamment hindous et bouddhistes (Prambanan, Borobudur). Java musulmane à l’instar de sa consœur Lombok, mais à la culture au moins aussi raffinée que celle de Bali, mêlant à la religion du Prophète les influences des croyances qui l’ont précédée, l’animisme, le bouddhisme et l’hindouisme.

Une dernière précision avant d’entamer la description au jour le jour : ce voyage est le premier pour lequel j’ai abandonné la diapositive et suis passé au tout numérique, avec un nouvel appareil réflex. D’où une abondance de clichés présentés ici par rapport aux voyages précédents, puisque je n’ai plus besoin de les scanner…

 

Nous avons donc débarqué à minuit passé à Denpasar, la plus grande ville de l’île de Bali : l’approche de l’appareil s’effectue au-dessus de l’eau jusqu’aux dernières secondes, et l’on survole les lumières de dizaines de bateaux qui pêchent à la lanterne. Notre guide (Charlie, de nationalité britannique mais on lui pardonne) nous attendait depuis de nombreuses heures à l’aéroport. Avant de rejoindre notre hôtel à Kuta, nous avons eu un aperçu de la « vie » nocturne, une succession de boîtes de nuit devant lesquelles se pressent de très jeunes femmes. Il est clair que tout le monde ne vient pas à Bali pour ses temples et pour ses volcans.

Mais la nuit a été très courte. Nous avons passé la matinée à acheter quelques bricoles destinées à palier l’absence de nos bagages (nous nous sommes également un peu baladés sur la plage, où la baignade est en permanence interdite en raison du danger des déferlantes : drôle de station balnéaire !). 

Une rue commerçante aux environs de notre hôtel de Kuta, le 5 juillet 2007

Bien que la photo précédente ne soit pas d’une grande originalité, on y distingue déjà quelques particularismes inhérents à l’île de Bali ; on aperçoit notamment sur les bords de la route (par exemple devant l’arbre à droite), des Penjor, sortes de tissages de bambous : ils sont installés en prévision de la fête hindoue de Kuningan qui devait eu lieu quelques jours plus tard (on étale également à l’occasion de cette fête des tissus jaunes, couleur de Shiva). Ces décorations éphémères demandent des heures de travail et ne sont pas réutilisées d’une année sur l’autre.

Première visite à Bali, celle du temple de Tanahlot, un lieu au demeurant assez célèbre. Ce temple est construit en bordure de mer, et en partie sur un îlot rocheux qui n’est accessible qu’à marée basse (ce qui ne sera pas le cas pour notre visite ; il n’y a semble-t-il qu’une marée par jour à cet endroit). Pour visiter le temple dans le respect des rites locaux, nous avons acheté puis revêtu un sarong (habit traditionnel à Bali), une sorte de jupe que l’on place autour de sa taille par-dessus le pantalon (le but étant de cacher ses genoux). La vision de touristes occidentaux, pas rasés (nos bagages n’étant pas là) et ainsi déguisés, amusait beaucoup des touristes chinois de passage qui se faisaient photographier à côté de nous… Il est vrai que peu de visiteurs européens font preuve d’autant de scrupules.

Vue de la partie insulaire du temple de Tanahlot, le 5 juillet 2007Statue recouverte d’un sarong au temple de Tanahlot

Près du temple se trouve un petit musée avec un mémorial de l’occupation japonaise pendant la guerre (laquelle a laissé quelques vestiges et aussi des souvenirs douloureux). On remarquera aussi (ci-dessus) cette statue revêtue d’un sarong (et le drap jaune, couleur de Shiva).

Nous avons visité un second temple ce même jour : le temple de Taman Ayun, situé lui à l’intérieur des terres, dans la localité de Mengwi. Ce temple a été édifié à l’emplacement d’un ancien palais royal fortifié (d’une époque où Bali était divisée en 8 royaumes), dont les fossés défensifs remplis d’eau sont toujours en place. Comme bon nombre de temples balinais, celui-ci est constitué de trois enceintes successives, de plus en plus sacrées (les touristes n’entrant pas dans la troisième). Ici à Taman Ayun, la première enceinte contient une sorte de préau sous lequel sont parfois organisés des combats de coqs semi-clandestins, mais nous n’aurons pas la chance d’assister à un spectacle de ce genre.

Vue générale du temple de Taman Ayun, le 5 juillet 2007

Quelques généralités (sans doute banalités) concernant la religion hindoue, à Bali et ailleurs. Il y a trois divinités principales dans le panthéon hindou, Brahma, Vishnou et Shiva (avec de nombreux avatars dont je ne parlerai pas). À chacun de ces dieux est associé un véhicule (vâhana) animal : le taureau pour Shiva, l’aigle à tête humaine pour Vishnu, le cygne pour Brahma, et c’est à ce véhicule qu’on peut le plus facilement reconnaître à quel dieu un édifice est dédié. Ces véhicules et ces divinités sont communs à tous les hindous. Par contre l’hindouisme balinais a ses spécificités, telles que l’identification des dieux aux grands volcans de l’île. En fait les volcans font l’objet d’adorations à part entière, le plus sacré d’entre eux étant le mont Agung, le point culminant de l’île (3142 m). Ainsi tous les temples de Bali sont en fait orientés vers un volcan et le plus souvent vers l’Agung.

La partie la plus sacrée du temple de Taman Ayun, le 5 juillet 2007

Nous avons passé la nuit dans un hôtel de l’intérieur de l’île, à Wangaya Gede, dans un décor paradisiaque au milieu de rizières aménagées en terrasses. Les chambres des hôtels balinais ont souvent une particularité : la salle de bain est située à l’extérieur de la chambre, en plein air, entourée de hauts murs. Cet hôtel était situé à proximité du temple de Pura Luhur Batukau que nous devions visiter le lendemain (un temple bien moins touristique que les deux précédents, bien que ce soit l’un des plus importants de l’hindouisme balinais). Le mont Batukau est un volcan (ce jour-là dans la brume), le deuxième de l’île de Bali (2276 m), et ce temple est largement dédié à l’esprit de la montagne, amalgamée elle aussi à l’une des divinités hindoues. Comme dans la plupart des temples de Bali, les constructions du temple sont coiffées de meru c’est-à-dire de toits de chaumes. Le nombre d’étages des meru est toujours impair (3, 5, 7, 9 ou 11) ; 11 étages signifie que le bâtiment est dédié à Shiva, ensuite 9 correspond à Vishnou et 7 à Brahma. Un nombre inférieur correspond aux esprits des volcans.

Vue générale du temple de Pura Luhur Batukau, le 6 juillet 2007

Ci-dessous, la partie la plus sacrée du temple (donc interdite au touristes). Le sanctuaire comporte aussi une source d’eau bénite.

La partie la plus sacrée du temple de Pura Luhur Batukau, le 6 juillet 2007

Démarrant directement du temple, nous avons entamé une randonnée dans la journée dans la forêt tropicale puis dans les rizières. À Bali la forêt recouvre toutes les zones trop pentues pour être cultivables, mais elle n’est pas excessivement épaisse. Nous nous sommes tout de même fait guider (pendant une vingtaine de minutes) par le grand prêtre de Luhur Batukau. Ensuite nous avons rejoint un petit temple secondaire, puis traversé des villages et enfin des rizières.

Paysage de rizières, le 6 juillet 2007

La topographie de Bali est assez particulière : le relief est façonné par des vallées (ravines) qui descendent des volcans. Les rizières se trouvent parfois au fond de ces ravines, mais que les villages se trouvent presque toujours sur les crêtes. Entre les deux, des zones de forêt, parfois assez escarpées. Les routes relient les villages entre eux, et sont donc construites en haut des crêtes. Pour passer (en voiture) d’une crête à l’autre, il est souvent nécessaire de parcourir des kilomètres afin de rejoindre une zone plus basse.

Voici deux photos de villages que nous avons traversés. Ces villages étaient décorés en prévision de la fête de Kuningan dont j’ai déjà parlé. Nous sommes ici dans des hameaux de la commune de Jatiluwih, mais pas dans le bourg principal.

Traversée d’un hameau de la commune de Jatiluwih, le 6 juillet 2007

L’après-midi nous avons randonné dans l’une des zones de rizières les plus touristiques de Bali (il y a un droit d’entrée pour accéder à ce secteur), le long d’un canal d’irrigation (il est paraît-il possible de faire du rafting dans ce canal). Malheureusement le soleil n’était pas de la partie ce qui fait que je ne suis pas très satisfait de mes photos. En voici donc la seule rescapée :

L’écluse alimentant le canal d’irrigation, le 6 juillet 2007

Nous nous sommes ensuite rapprochés du lac Bratan où se situait notre prochain hôtel. Le lac Bratan occupe une ancienne caldeira, et renferme un temple important (le temple d’Ulun Danu) lui aussi en partie dédiés aux esprits du volcan. Ce temple est construit sur la rive du lac, mais une partie se situe sur un îlot accessible uniquement en barque. 

Le temple d’Ulun Danu sur le lac Bratan, le 7 juillet 2007

Le temple d’Ulun Danu renferme en outre une particularité unique à Bali : un stûpa bouddhiste (j’ai vérifié, c’est bien masculin…). J’avoue ne pas avoir noté la raison de sa présence ici.

La partie la plus sacrée du temple d’Ulun Danu, le 7 juillet 2007Stûpa bouddhiste sur le site d’Ulun Danu, le 7 juillet 2007

La journée s’est poursuivie (comme la précédente…) par une randonnée dans la forêt et dans les rizières. Nous avons démarré des rives du lac Bratan, à un endroit où les Japonais ont construit un tunnel pour se protéger des bombardements. Mais la visite de ce site militaire ne présente guère d’intérêt… Ensuite, la marche en forêt nous a permis de découvrir un certain nombre de plantes tropicales (dont j’ai peu retenu je l’avoue), et, ça et là, une vue sur quelques volcans éteints des alentours.

Vue sur des volcans éteints pendant notre randonnée, le 7 juillet 2007

Ensuite nous avons une nouvelle fois traversé des villages… et les rizières entre ces villages ainsi que les ravines entre ces rizières. Mais ce jour était particulier : c’était celui de la fameuse fête de Kuningan dont je vous ai parlé à plusieurs reprises. Tous les villageois étaient habillés en costumes traditionnels et rassemblés dans les temples, hommes et femmes généralement séparés. Et comme il s’agissait de villages assez isolés, nous étions les seuls touristes à photographier ces scènes !

Rassemblement dans un temple pour la fête hindoue de Kuningan, le 7 juillet 2007

Encore deux photos prises au cours de cette balade : une rizière et une ravine dont les pentes sont recouvertes d’une forêt de bambous.

Marche le long d’une rizière, le 7 juillet 2007Forêt de bambous sur les pentes d’une ravine

Après cette randonnée, un assez long transfert nous a menés jusqu’au bord de la caldeira du Batur. Nous sommes ici dans l’un des principaux sites touristiques de Bali, la caldeira mesure 7,5 km de diamètre environ et la moitié de sa surface est occupée par un lac en forme de croissant de lune. Au centre de la caldeira s’élève un volcan de 1717 m, le Batur, dont nous effectuerons l’ascension le matin suivant. Ce volcan, actif, causa des milliers de morts en 1917, à la suite de quoi le temple qui lui est dédié fut reconstruit, non plus au fond de la caldeira, mais sur son bord. C’est ce temple que nous visiterons aujourd’hui, lequel n’a de ce fait aucun caractère ancien. 

Vue générale de la caldeira du Batur et du volcan éponyme, le 7 juillet 2007

Et donc voici une photo de ce temple, dans sa partie la plus sacrée qui, contrairement à la plupart des temples de Bali, n’est pas ici située au centre mais à l’extrémité du sanctuaire. 

Vue du temple du Batur dans sa partie la plus sacrée, le 7 juillet 2007

Nous avons effectué le lendemain l’ascension du volcan Batur : la première des trois ascensions prévues au programme de ce voyage, et aussi la plus facile : à peine deux heures de montée. Revers de la médaille, nous sommes loin d’être seuls, les groupes de touristes se succèdent à la queue leu leu. On démarre l’ascension à 4h du matin pour être au sommet pour le lever du soleil : nous arriverons en avance ! Le guide local (il est obligatoire d’en avoir un) n’entame pas l’ascension sans une petite prière, volcan sacré oblige.

Malheureusement le temps sera assez bouché au sommet, nous privant de la vue sur la caldeira. Assez incommodé par la foule, notre guide nous proposera de redescendre immédiatement (sans même avoir fait le tour du cratère) pour enchaîner ensuite sur une autre balade dans un secteur moins touristique. Mais à notre grande surprise, le temps se dégagera ensuite complètement et la journée sera l’une des plus belles de notre séjour à Bali. Ci-dessous, le Batur photographié vers 9 h du matin, alors que nous venons juste d’en achever la descente.

Le Batur vers 9h du matin, le 8 juillet 2007

La journée n’était pratiquement pas entamée ! Mais pour cette seconde balade (qui n’était pas au programme et que notre guide Charlie nous a concoctée spécialement à notre intention), nous avons dû nous passer de nos accompagnateurs balinais : pour eux il était hors de question d’en faire plus que ce qui était convenu ! Nous sommes partis du village de Songan d’où nous avons rejoint la crête de la caldeira. Crête que nous avons ensuite suivie pendant plusieurs heures (dans un secteur dépourvu de route), dominant à la fois le lac Batur et la mer située au nord en contrebas.

Le mont Batur vu depuis les crêtes, le 8 juillet 2007

De ces crêtes on pouvait également apercevoir le mont Agung, le point culminant de Bali. C’est rappelons-le une montagne très sacrée, donnant lieu à des rites religieux, dont l’un (qui n’est effectué que tous les 100 ans, si je me souviens bien) consiste à sacrifier un tigre vivant dans le cratère du volcan. La dernière fois que ce rite a été observé, dans les années 1960, le volcan est entré en éruption peu de temps après. Les prêtres en ont alors conclu que le sacrifice avait été mal fait et qu’il fallait recommencer.

Le mont Agung vu des crêtes du Batur, le 8 juillet 2007

Le temps ce jour était tellement dégagé qu’on pouvait même deviner dans le lointain le mont Rinjani (3726 m) sur l’île de Lombok, volcan dont nous devions faire l’ascension quelques jours plus tard.

Cette balade s’est terminée par une descente (sur une pente assez escarpée, mais par un sentier bien aménagé) jusqu’au village de Trunyan, l’un des deux seuls villages animistes de Bali. Mais (aux dire de notre guide), ses habitants sont agressifs et désagréables (contrairement aux autres balinais) c’est pourquoi nous avons préféré éviter de le visiter, nous contentant de le contourner en catimini.

Le village animiste de Trunyan et ses temples, le 8 juillet 2007

La journée avait été longue, mais elle était encore loin d’être terminée ! Nous aurions normalement dû passer une seconde nuit dans le même hôtel au fond de la caldeira du Batur, mais notre guide nous a concocté un nouvel extra par rapport au programme (nous avons vraiment été gâtés dans ce voyage !) : un spectacle de danses traditionnelles balinaises. Mais pour ce faire il a fallu faire un petit bout de route, jusqu’au village de Sebatu, au centre de l’île. Village qui (outre les danses) possède une spécialité assez curieuse : son artisanat de souvenir « authentiques » du monde entier (par exemple des totems d’Amérique du sud). Il paraît que quand on achète un objet «traditionnel » chez un marchand de souvenirs, que ce soit en Afrique, en Océanie ou en Amérique, il y a de bonnes chances qu’il ait été fabriqué à Bali ! C’est ça la mondialisation. En ce qui me concerne, ça tombe bien, je n’achète jamais rien dans les souks.

Venons-en maintenant à ces danses : un spectacle, excusez du peu, qui était donné rien que pour nous ! Seulement quatre spectateurs (trois touristes et le guide) pour une vingtaine de musiciens et une dizaine de danseuses. Les danses balinaises constituent une tradition très ancrée dans la culture locale, perdurant en dépit du tourisme de masse qui submerge l’île depuis des années. Les petites filles de tous les villages de Bali apprennent ces danses traditionnelles qui sont exécutées devant les touristes, mais également dans les temples dans le cadre de cérémonies religieuses auxquelles les étrangers ne peuvent pas toujours assister (et certaines danses sont spécifiques à ces cérémonies). Ces danses, très travaillées, incorporant toute une gestuelle, et effectuées en costumes traditionnels, sont accompagnées de musique également traditionnelle généralement jouée sur des gamelan, sortes de xylophones métalliques. Cette vidéo accessible en streaming donne une idée de la sonorité de ces gamelan.

En fait la musique des gamelan est assez connue dans le monde fermé de la musique classique (occidentale) contemporaine, depuis que Pierre Boulez s’y est intéressé eu égard à la parenté qu’il y voyait avec le dodécaphonisme et autres élucubrations de ce genre. Les musiciens que nous avons peu entendre à Sebatu ce soir là, et qui se trouvaient être parmi les meilleurs joueurs de Bali, avaient de ce fait eu l’occasion d’effectuer des tournées dans plusieurs des grandes salles parisiennes (le chef de l’orchestre — celui qui se trouve au fond à droite et qui joue tout en dirigeant de la tête — m’a cité entre autres le théâtre des Champs Élysées, le Châtelet, la salle Pleyel… et il est clair que les spectateurs parisiens paient beaucoup plus cher que la somme symbolique que nous avons versée à Sebatu !). Les danseuses, quant à elles, n’étaient pas des artistes professionnelles mais des fillettes du village qui apprenaient les danses comme la plupart de leurs congénères (cette soirée était en fait une répétition, ce qui explique que nous ayons payé si peu cher et que nous étions les seuls spectateurs).

Danses balinaises traditionnelles à Sebatu, le 8 juillet 2007

Nous avons effectué le lendemain une balade entre Sebatu et le temple (important) de Gunung Kawi qui se trouve dans les environs. Mais malheureusement la météo pour cette randonnée dans les rizières n’était pas idéale. 

Canards dans une rizière près de Sebatu, le 9 juillet 2007

Le terrain dans ce secteur est assez plat (nous sommes situés sur un plateau), mais il y a tout de même des ravines à franchir de temps en temps. Dans l’une de ces ravines nous avons surpris des villageoises en train de se laver, mais elles n’ont pas eu l’air gênées plus que cela de notre passage.

Les photos suivantes ont été prises à proximité du temple de Gunung Kawi, lui aussi situé au fond d’une ravine. On accède au temple en descendant un escalier de 230 marches.

Arrivée au temple de Gunung Kawi, le 9 juillet 2007

Le temple de Gunung Kawi est l’un des plus anciens de Bali, certaines parties datent du XIe siècle. En l’occurrence, des anciennes tombes royales sculptées dans la roche, qui très exactement sont des cénotaphes puisque les hindous sont incinérés. La partie plus récente du temple contient des mérus comme dans les autres temples de Bali. On trouve ici néanmoins, et c’est une autre originalité de ce temple, une partie troglodyte, très vénérée. Malheureusement le temple de Gunung Kawi est assez touristique.

Cénotaphes royaux du XIe siècle dans le temple de Gunung Kawi, le 9 juillet 2007

Dernier temple que nous avons visité à Bali (avant d’embarquer le jour suivant pour Lombok), celui de Besakih au pied du mont Agung. Pour nous y rendre depuis Gunung Kawi, et bien que les deux temples soient assez proches à vol d’oiseau, il nous a fallu parcourir pas mal de kilomètres et remonter jusqu’à la caldeira du Batur : c’est que, comme je l’ai déjà évoqué, les communications à Bali n’existent que parallèlement aux ravines. 

Le temple de Besakih, l’un des plus importants de Bali, est aussi, malheureusement, l’un des plus touristiques. Il est situé au pied du mont Agung auquel il est dédié, il a d’ailleurs été épargné de justesse lors de la dernière éruption de 1964. Sans doute à cause d’autres événements similaires antérieurs, les bâtiments ne sont pas très anciens, bien que le lieu soit sacré depuis très longtemps. On trouve par contre des éléments architecturaux intéressants, comme des tuiles traditionnelles en bambou, devenues rarissimes à Bali. Le temple est situé sur un lieu en pente, les différentes parties s’en visitent en gravissant des escaliers. Comme au temple de Taman Ayun, la partie la plus sacrée (interdite aux touristes) se trouve au centre.

Vue générale du temple de Besakih, le 9 juillet 2007

Nous avons ensuite rejoint la station balnéaire de Candi Dasa (au sud-est de l’île) où nous devions passer notre dernière nuit balinaise (en chemin nous avons fait halte au village de Sidemen, d’où notre guide local était originaire). Notre hôtel était localisé en bord de mer mais il n’était pas possible de se baigner (trop dangereux).

 

Notre séjour à Bali était maintenant terminé. Pour nous rendre dans l’île suivante, Lombok, nous avons (conformément au programme) emprunté un transbordeur : quatre heures de traversée (avec un départ à 6 du matin). Nous étions absolument les seuls touristes sur ce bateau, dont il ne vaut mieux pas trop s’attarder sur l’état (ça m’a un peu rappelé la Grèce de mon enfance…). 

Arrivée dans l’île de Lombok, le 10 juillet 2007

Notons que le bras de mer que nous avons traversé est (relativement) profond : c’est là que passe la ligne de Wallace, qui sépare géographiquement l’Asie de l’Océanie (on n’a jamais trouvé d’espèces asiatiques, comme les tigres, à Lombok, car le détroit n’a jamais été à sec).

Lombok est (contrairement à Bali mais à l’instar de la plupart des îles indonésienne) une île essentiellement musulmane. L’ambiance y est incontestablement moins « sympathique » que dans sa consœur, on n’y trouve pas ces temples, cette culture raffinée, ni non plus ces belles rizières en terrasses. L’île est de ce fait bien moins touristique que Bali, à l’exception notable de ce pourquoi nous sommes venus ici : l’exceptionnel volcan Rinjani et son extraordinaire caldeira avec son lac aux eaux turquoises. Le visite du volcan Rinjani (qui culmine à 3726 m, c’est le plus haut sommet des îles de la Sonde) nécessite un trek de trois jours accompagnés de porteurs. Démarrant du village de Sembalun-Lawang (1180 m), on commence par une montée de 1500 m jusqu’à un col sur la la crête de la caldeira, à 2724 m d’altitude et à 700 m au-dessus des eaux du lac. Le deuxième jour, après un départ très matinal comme il se doit, c’est l’ascension proprement dite (assez éprouvante en raison du terrain instable), puis une descente particulièrement escarpée jusqu’au bord du lac. Mais là se trouvent de réconfortantes sources chaudes. Enfin le troisième jour, on remonte sur la crête du côté opposé (c’est moins raide à cet endroit), avant une descente de 2000 m pour finir dans la végétation tropicale (Senaru, alt. 620 m). 

Tout le périmètre du volcan Rinjani se situe dans un parc national. Le secteur n’est donc pas habité et surveillé par une police spéciale, même si des problèmes de sécurité ont pu y être observés par le passé comme notre guide s’est fait un plaisir de nous le raconter… seulement après que nous eûmes terminé la randonnée !

Cette première photo a été prise peu après le départ du trek, on aperçoit le sommet du volcan en toile de fond (la crête où se situe le premier camp étant située à droite). On remarquera la technique de portage des porteurs indonésiens, assez spécifique (différente aussi de celle des Népalais). 

Ce singe sait profiter du passage des touristes ! (11 juillet 2007)

Sur la seconde photo ci-dessus, l’un des très nombreux singes que l’on rencontre le long du sentier : connaissant parfaitement les lieux de pique-nique des touristes, ils n’ont qu’à attendre pour déguster les restes. Mais ils ne sont pas agressifs, ils savent qu’il y aura toujours à manger !

La véritable montée n’a débuté que l’après-midi : 1000 mètres d’un coup, sur un sentier face à la pente et en pleine chaleur (même si je n’étais pas mécontent qu’il fasse beau, après le temps couvert que nous avions eu la veille lors de notre approche du volcan en véhicule). Alors que nous étions, bizarrement, presque seuls le matin, nous avons été rattrapés par pas mal de touristes : des occidentaux (surtout des Australiens), mais aussi, et c’est paraît-il nouveau, d’assez nombreux touristes indonésiens. Ce sont des membres des classes moyennes des villes de Java, très peu habitués à marcher en montagne (bien moins à l’aise que nous) ce qui se voit sur leur rythme de montée ! Il y a paraît-il souvent des accidents impliquant des touristes indonésiens.

Ce n’est qu’en arrivant au camp que nous avons eu notre premier aperçu des somptueux paysages sommitaux du Rinjani, et ce, même si les nuages commençant à monter nous en masquaient une partie. Le fond de la caldeira du Rinjani (7 km environ de diamètre) est occupée par un lac, le lac Segara Anak. Ce lac est en forme de croissant en raison de la présence au centre de la caldeira, d’un cône éruptif récent, le Barujari. Ce cône (presque invisible sur la série ci-dessous de photos prises du premier camp) est toujours en activité, la dernière éruption remontant à mai 2009, donc postérieure à mon voyage. Les eaux du lac Segara Anak sont de couleur turquoise en raison des émissions de soufre du Barujari, ce qui ne les empêche pas d’être très poissonneuses. Bien que situé au fond de la caldeira ce lac possède par ailleurs un déversoir, par une entaille dans les flancs de la caldeira. Notre camp de ce soir (Plawagan II) est situé au bord de cette entaille (c’est par cette vallée aussi que montent ce soir les nuages). 

Vue partielle de la caldeira du Rinjani depuis le premier camp, le 11 juillet 2007

Notons que cet itinéraire d’ascension du Rinjani (et ce camp en l’occurrence) n’est ouvert que depuis quelques années, quand une source minuscule a été découverte dans les environs, rendant possible le bivouac à cet endroit. Auparavant l’ascension s’effectuait par un départ des rives du lac à 1 h du matin, ce qui la rendait nettement plus soutenue !

Le camp sur une crête au bord de la caldeira du Rinjani, le 11 juillet 2007

Malgré la présence de ce camp, l’ascension du Rinjani n’est pas une promenade de santé. On se lève à 2h30 du matin pour effectuer la plus grande partie de la montée à la frontale. La montée s’effectue en trois étapes : d’abord une montée assez raide, mais sur un terrain assez stable (il y a encore quelques arbres). On arrive ainsi sur la crête sommitale, qui dans un premier temps n’est pas trop raide. Mais 300 m sous le sommet, la pente s’accentue et le terrain, fait de cendre volcanique, devient instable : on recule d’un pas quand on en monte deux ! Cette dernière partie, qui s’effectue normalement de jour, est de loin la plus soutenue (l’un de mes deux compagnons de voyage déclarera d’ailleurs forfait).

Nous mettrons quatre heures pour atteindre le sommet. Mais cela vaut vraiment la peine, je vous laisse juger par les photos, même si en raison de l’heure très matinale la lumière n’était pas optimale. Ces photos nécessitent quelques commentaires : le croissant formé par le lac Segara Anak est maintenant presque intégralement visible, de même que le cône du Barujari. À l’horizon, on peut deviner un cône volcanique : il s’agit du mont Agung à Bali. Un peu plus près, dans la mer, se dessinent par ailleurs trois petites îles : ce sont les îles Gili, le second haut lieu du tourisme à Lombok, elles sont réputées pour leurs paysages sous-marins (notre guide a d’ailleurs envisagé de nous y emmener en extra, après notre ascension, mais nous y avons finalement renoncé). 

La caldeira et le lac Segara Anak vus depuis le sommet du Rinjani, le 12 juillet 2007

La photo montrant l’autre versant du Rinjani présente également un certain intérêt. Au premier plan se trouve un cratère secondaire du volcan dont personne ne parle jamais, mais qui semble lui aussi actif. Dans le lointain, on distingue une autre île, Sumbawa. C’est sur cette île que se trouve (également visible mais il faut le deviner) le volcan Tambora, responsable en 1815 d’un cataclysme volcanique particulièrement destructeur (quoique relativement méconnu), encore plus puissant que celui du Krakatoa, à l’origine de perturbations majeures du climat pendant l’année qui a suivi (des tempêtes de neige observées en plein mois de juillet en Amérique du nord). Le volcan qui dépassait sans doute 4000 m avant cette éruption a d’un coup perdu un tiers de son altitude !

Quelques photos prises au cours de la redescente, là où la crête est la plus raide : elles donnent une bonne idée de la difficulté du terrain… La dernière photo a été prise de plus bas, juste avant de quitter la crête principale pour redescendre vers le camp de Plawagan. On ne s’en doute guère, mais c’est cette zone qui est la plus dangereuse de ce trek. Il est difficile en effet de bien repérer l’endroit exact d’où il convient de quitter la crête pour amorcer la descente. Des sentiers semblent partir de plein d’endroits mais ce sont des pièges : si l’on s’engage sur un mauvais itinéraire, on se retrouve sur une pente rapidement séparée de la bonne route par des ravines infranchissables, avec risque de tomber à plus ou moins brève échéance sur des barres rocheuses. La seule solution dans ce cas, mais il est difficile de s’y résoudre, est de remonter jusqu’à la crête pour retrouver le bon chemin. Note guide savait de quoi il parlait en racontant cela, une semblable mésaventure lui étant arrivée sur le volcan Semeru à Java.

Redescente du mont Rinjani, le 12 juillet 2007

Après un pique-nique à l’emplacement du camp de la veille, nous avons entamé la descente jusqu’au fond de la caldeira et au bord du lac Segara Anak (alt. 2027 m). Sept cents mètres de descente, sur une pente particulièrement raide, le sentier se frayant un passage entre des barres rocheuses. En outre, les câbles qui ont a une certaine époque existé pour nous aider à descendre, n’ont pas été entretenus et ont le plus souvent disparu. J’ai dû pour ce passage laisser un de nos accompagnateurs porter mon appareil, ce que je regrette car du coup je n’ai pas pu photographier ces passages.

Le camp du soir au bord du lac était très agréable, bien que l’endroit soit aussi assez populeux. Il y a non loin des sources chaudes fort bien venues. Autre agrément du lieu, les eaux du lac sont très poissonneuses, ce qui nous a permis de déguster au dîner du poisson d’eau douce, un luxe assez rare en trek.

Sur les rives du lac Segara Anak, le 12 juillet 2007

Le dernier jour de la randonnée commence par une montée de six cents mètres jusqu’à la crête de la caldeira, jusqu’à un col (quasiment diamétralement opposé au sommet). C’est pendant cette remontée et jusqu’au col, que la vue sur la caldeira est à mon avis la plus belle. Malheureusement, j’avais fait une erreur de réglage de mon appareil que je ne maîtrisais pas encore très bien (je l’avais laissé sur 800 ISO depuis le sommet où j’avais pris quelques photos par faible luminosité). Du coup, certaines de mes photos ne présentent pas la qualité qu’elles auraient dû.

Le lac Segara Anak ainsi que le cône éruptif du Barujari, le 13 juillet 2007

Toute cette montée (et c’est aussi l’un de ses principaux attraits) nous offre en permanence une vue sur le Barujari, le cône éruptif récent du Rinjani (de nombreux touristes passent d’ailleurs un jour de plus sur le Rinjani afin d’aller le visiter de plus près). Comme je l’ai déjà signalé ce cône est à nouveau entré en éruption au printemps 2009. Le magma est sorti du flanc à gauche sur la photo précédente (là où se trouve la tache rouge) et une coulée de lave est venue obstruer la petite baie située en contrebas.

Le Rinjani, le lac Segara Anak et le cône du Barujari, pendant la remontée, le 13 juillet 2007

Voici un panoramique pris depuis le col (mon tout premier panoramique effectué avec cet appareil qui ne comporte pas de fonction dédiée…). On distingue bien sur la gauche le sommet du Rinjani (3726 m), celui là même dont nous avions fait l’ascension la veille. Le camp de Plawagan II (premier soir) se trouve en haut de la falaise située à mi hauteur : on comprend bien pourquoi la descente avait été si délicate ! Quant à l’ascension finale, elle suivait la crête sur tout le parcours, et on voit aussi qu’il valait mieux ne pas trop s’en écarter…

Panoramique du Rinjani, du lac Segara Anak et du cône du Barujari, depuis le col le 13 juillet 2007

Avant de quitter définitivement cet environnement fabuleux, deux dernières photos, également prises depuis le col. La seconde montre l’autre versant, celui par lequel nous allons ensuite redescendre. On distingue à l’horizon le mont Agung de Bali, très souvent visible depuis cet endroit alors qu’on ne peut quasiment jamais le voir en raison de la brume, depuis les côtes de Lombok.

La caldeira et le sommet du Rinjani vus depuis le col, le 13 juillet 2007

La journée se terminait par deux mille mètres de descente sur un sentier aisé, le plus souvent en forêt comme le montre cette photo de jungle tropicale.

Marche en forêt sur les pentes inférieures du Rinjani, le 13 juillet 2007

Après cette randonnée exceptionnelle, les quelques jours qui ont suivi ont il faut bien le reconnaître été moins mémorables. Il faut dire aussi que beaucoup de transferts nous attendaient. Le 14, nous devions prendre un avion dans l’après midi pour retourner à Bali. En attendant, nous nous sommes baignés à proximité de la station balnéaire de Senggigi où nous avions notre hôtel — mon premier bain de mer depuis dix-sept ans, mine de rien ! Nous nous sommes même essayé à faire du snorkel, mais n’ayant jamais pratiqué et n’étant du reste que très moyennement motivé, l’expérience ne s’est guère avérée concluante. Du reste, cette côte était dangereuse et il fallait faire très attention à ne pas dépasser la première barrière de rouleaux. Autant dire que le bain c’était plutôt une trempette…

Avant d’aller prendre l’avion, en attendant dans le hall de notre hôtel, nous avons eu la surprise de voir passer un étonnant défilé de personnes en costume traditionnel. On ne fête quand même pas le 14 juillet jusqu’ici ? D’après notre guide, il s’agirait d’une répétition en vue de la fête nationale indonésienne ; mais celle-ci étant le 17 août, cela leur laissait quand même le temps !

Après une demi heure de vol pour Denpasar par cette compagnie indonésienne depuis peu sur liste noire (pas d’incident majeur mais quatre heures de retard… et de l’eau qui me tombe dessus avant le décollage, obligeant les hôtesses à me changer de place) , nous avons passé la nuit en plein centre de Kuta dans le logement des guides (le fait que nous soyons un petit groupe permettait à notre guide certains arrangements). Le jour suivant, direction l’île de Java : plus d’avion cette fois mais un long trajet en minibus. Levés à l’aube, on commence par traverser toute l’île de Bali, gagnant sa partie ouest, bien plus pauvre et bien moins touristique que l’est. Seuls quelques kilomètres de bras de mer séparent Bali de Java. Des bacs traversent en permanence, ça fait un peu penser au détroit de Messine. Le port d’embarquement s’appelle Gilimanuk. Je ne décrirai pas la traversée par moult détails, signalons tout de même qu’on peut apercevoir, depuis le bac en direction du nord, un volcan, le Baluran (1247 m). Contrairement à la traversée entre Bali et Lombok, nous avons conservé le même véhicule qui a donc embarqué avec nous.

Une fois à Java et après un déjeuner à Banyuwangi, nous avons gagné le plateau d’Ijen où nous devions le lendemain visiter le volcan éponyme (le Kawa Ijen). Ce plateau s’étend jusqu’à 2000 mètres d’altitude et se trouvait le jour où nous l’avons gagné plongé dans les nuages. Nos chauffeurs balinais, peu habitués à cet environnement, grelottaient de froid ! À cause de son terrain volcanique fertile, le plateau d’Ijen abrite une vaste plantation de café de 4000 ha, que nous avons visitée en long et en large (les caféiers sont des arbustes qui poussent en général sous une couverture végétale plus haute qui les protège du soleil). Nous avons logé dans la localité de Blawan (alt. 955 m), à côté d’une pittoresque maison coloniale hollandaise.

Maisons ouvrières à Blawan, le 15 juillet 2007

C’est à Blawan que se trouve l’usine de traitement des grains de café. Toute la localité est organisée autour de cette activité, à commencer par ce village des ouvriers aux maisons toutes identiques, me faisant vaguement penser aux corons de mon Nord natal (où certes, je n’ai pas beaucoup vécu…). Nous avons eu le privilège de visiter l’usine, en partie automatisée (notamment tout ce qui est lavage et séchage des grains). Mais le café doit également être trié pour séparer les meilleurs grains, exclusivement réservés à l’exportation, des autres, destinés à la consommation nationale. Ce travail particulièrement fastidieux est effectué par des dizaines de femmes rassemblées dans une vaste salle : cela vaut le coup d’œil !

Ouvrières triant les grains de café dans l’usine de Blawan, le 17 juillet 2007L’usine de café de Blawan, le 16 juillet 2007

Une scène qui me fait invariablement penser au chœur des cigarières dans Carmen

Le Kawa Ijen est le troisième des quatre volcans prévus au programme de ce voyage ; c’est aussi le plus facile (400 m de montée à peine). Ce qui ne nous a pas empêchés de nous lever à 3h30 pour démarrer l’ascension à l’aube : il faut croire que notre guide aimait ça ! Ce volcan est connu pour ses champs de soufre et l’exploitation qui en est faite, avec des dizaines de porteurs qui descendent jusqu’au fond du cratère (respirant à haute dose l’hydrogène sulfuré toxique) pour ramener sur leur dos des blocs pesant jusqu’à 90 kg. L’espérance de vie de ces porteurs s’en trouve nettement réduite comme on peut se l’imaginer ; mais ils gagnent aussi sensiblement plus que les paysans du coin. Le soufre est essentiellement utilisé pour blanchir le sucre de canne (il ne semble pas que cette exploitation ait un rapport avec les plantations de café voisines).

Porteur de soufre au pied du Kawa Ijen, le 16 juillet 2007

Il y a surtout des Français parmi les (nombreux) touristes visitant ce volcan, eu égard au battage orchestré par ce cathodique olibrius à qui j’ai déjà fait trop d’honneur en citant son nom. Et dire que même les porteurs du coin le connaissent et nous en parlent quand ils nous croisent !

Pour ce qui est de notre visite du Kawa Ijen, je dois dire que j’ai été un peu déçu. Nous n’avons pas en effet été gâtés par la météo, sans précipitation mais très brumeuse et sans aucun vent. Résultat, les vapeurs de soufre s’accumulaient au fond du cratère, bouchant toute visibilité et nous empêchant en raison de leur toxicité de descendre au fond de celui-ci. Du fameux lac d’acide sulfurique je n’aurai eu qu’une vision fantomatique.

Vue fantomatique du lac d’acide sulfurique du Kawa Ijen, le 16 juillet 2007

Encore plus touristique que le Kawa Ijen (sans être, et de loin, aussi hexagonal !), le site du volcan Bromo, que nous avons rejoint après une journée entière de route. Cet endroit exceptionnel est l’un des sites volcaniques les plus connus au monde, on en trouve au moins une photo dans tous les ouvrages consacrés à la volcanologie. Le Bromo est un volcan très actif situé au centre d’une caldeira (la caldeira du Tengger) de 16 kilomètres de diamètre. Le fond de la caldeira, recouvert de cendre volcanique, n’est pas colonisé par la végétation, lui donnant un aspect désertique particulièrement inhabituel en pays tropical. L’un des principaux attraits de cette caldeira est la vue dont on jouit depuis ses bords (en particulier du mont Penanjakan, 2770 m), vue qui porte non seulement sur la caldeira, mais aussi sur le volcan Semeru (3676 m) situé au sud dans l’alignement, volcan en perpétuelle activité émettant toutes les vingt minutes environ un spectaculaire panache de fumée. Autre particularité de la région, le fait qu’elle soit très peu peuplée par rapport au reste de Java (un parc naturel englobe d’ailleurs le Bromo et le Semeru), et le fait qu’une fraction importante de cette population soit restée hindoue, mêlant comme à Bali le panthéon hindou avec une vénération des volcans (Bromo étant d’ailleurs une déformation de Brahma).

Malheureusement, tout comme au Kawa Ijen, notre visite des lieux aura été en partie compromise par la météo, tournant carrément au brouillard et à la pluie. Notre vue sur le site depuis le mont Penanjakan n’aura été que très partielle ; de même que l’ascension du Bromo effectuée dans le brouillard. Quant à la randonnée prévue dans le petit désert, elle aura carrément été annulée en raison du brouillard et du risque de se perdre 

J’ai groupé les rares photos que j’ai pu prendre du Bromo et du Tengger. La première photo a été prise des abords de notre hôtel, situé au bord de la caldeira, à 2230 mètres d’altitude (d’où un froid assez inhabituel en ces contrées…). Le Bromo se trouve à gauche, c’est le cratère assez grand laissant échapper de la fumée en grande partie d’origine volcanique. Le volcan situé à droite et dont le sommet est dans les nuages s’appelle le Batok, c’est un volcan éteint. La seconde photo a été prise depuis les pentes du volcan Bromo, on aperçoit en bas le temple hindou qui lui est dédié et qui se trouve au fond de la caldeira du Tengger. Notons que cette ascension, très brève, était rendue pénible par l’innombrable foule qui s’y pressait… après être montée non pas à pied mais à cheval. Les derniers mètres de l’ascension sont aménagés en escaliers rappelant furieusement ceux de la butte Montmartre…

La caldeira du Tengger et le volcan Bromo vus depuis notre hôtel, le 18 juillet 2007

La journée avait commencé par un lever à 3 h pour effectuer l’ascension en jeep du mont Penanjakan. Là haut, la foule de touristes était telle qu’il était très compliqué de se garer, et qu’il fallait terminer à pied les dernières centaines de mètres. On accédait ensuite au sommet sur lequel était aménagée, face au volcan, une tribune provisoire de style Furiani. Tribune noire de monde bien évidemment. Et tout ceci pour ne voir… rien ! Le sommet était entièrement dans les nuages ! Nous avons attendu, n’avons rien vu du lever du soleil sur cet exceptionnel site. Les nuages ont tout de même fini par se déplacer, ne laissant rien deviner de la caldeira mais nous laissant apercevoir, au loin, le volcan Semeru. Volcan qui ne nous a fait qu’une seule fois l’honneur de nous saluer d’un panache, et encore, je n’ai pu prendre la photo que quelques minutes après l’explosion. Et impossible d’éviter toutes ces têtes de touristes dans le champ !

N’ayant pu nous balader dans la caldeira, nous avons effectué le parcours correspondant en jeep. Mais comme une seule jeep avait été louée, pour le transport des bagages, nous avons dû voyager… sur le toit de la jeep ! Pour des Indonésiens c’est assez courant de voyager ainsi, mais pour des touristes c’est nettement plus rare… et les habitants du coin avaient l’air assez étonnés. Heureusement il n’y a pas trop d’arbres sur le parcours (sauf pendant la descente au fond de la caldeira). Ce parcours m’a en ce qui me concerne rappelé un petit précédent : le trajet depuis Hushe à la fin du trek au Pakistan… 

Les deux photos suivantes ont été prises lors de la sortie de la caldeira et depuis le bord de celle-ci, alors que nous nous approchons de Ranu Pani. Notons que ce secteur du Tengger est recouvert de végétation.

Parcours en jeep depuis la caldeira du Tengger, le 18 juillet 2007

N’ayant pas effectué la randonnée, nous sommes arrivés très tôt au village (en partie hindou) de Ranu Pani (point de départ pour l’ascension du Semeru que nous entamerions le lendemain), et nous y avons pas mal glandé…

Deux jours de trek sont nécessaires pour le Semeru. Une première journée de marche, entièrement en sous-bois et avec très peu de dénivelé (tout est en balcon), nous conduit au camp de Kalimati (2700 m). L’ascension proprement dite débute à 2h du matin, 1000 mètres seulement de montée mais sur un terrain très instable rendant l’ascension assez éprouvante (sans compter le retour au village dans la foulée).

Nous avons eu un temps exceptionnel le premier jour, celui de la marche d’approche. Un ciel entièrement dégagé qui nous a permis d’apercevoir le volcan dès la sortie du village de Ranu Pani. C’est paraît-il très rare d’après notre guide, mais il semble que la mer de nuages qui recouvre la région était simplement un peu plus basse que les jours précédents. Le sentier menant au Semeru est très bien marqué mais progresse sous une couverture végétale assez dense, masquant le plus souvent la vue du volcan (sans ce sentier il serait d’ailleurs très délicat de progresser et les risques de se perdre importants). 

Marche d’approche en direction du Semeru, le 19 juillet 2007

Après quatre heures de progression, nous arrivons au lac (naturel) de Ranu Kumbolo (ci-dessus). Tout le monde pique-nique à cet endroit (certains aussi campent, ceux qui font l’ascension en trois jours), du coup il y a un monde auquel on ne s’attendait pas en arrivant. Comme au Rinjani on trouve quelques (pléthoriques) groupes de touristes indonésiens, qui se caractérisent par la lenteur extrême de leur marche. 

Comme je l’ai déjà évoqué, le volcan Semeru est l’un des rares volcans du monde qui soit en activité permanente, produisant toutes les vingt minutes environ une petite explosion de cendres : un peu comme le volcan Karimski, quoique moins fréquemment mais avec davantage d’intensité. Et contrairement au Karimski, cette activité n’interdit pas l’ascension du volcan, à condition de ne pas s’approcher du cratère éruptif (la constance des vents dominants empêche en général la voie d’ascension et le sommet, d’être recouverts par les projections volcaniques). Les quelques photos d’explosions ci-dessous ont été prises pendant la fin de la marche d’approche et depuis le camp de Kalimati.

Explosion du volcan Semeru, depuis le camp de Kalimati le 19 juillet 2007

L’ascension est une bonne bavante. On se lève à une heure impossible pour arriver au sommet à l’aube. Après une première partie en sous-bois (jusqu’au camp d’Arcopodo, 2960 m, situé au tiers de la pente et où certains groupes passent la nuit), on attaque la montée terminale sur la partie dénudée du volcan. Sept cents mètres d’une traite, ce n’est pas vertigineux mais c’est assez raide, et surtout le terrain, typiquement volcanique, est très instable. Le sentier s’élève entre deux ravines, tout droit (il n’y a pas la place de faire des lacets), et il y a intérêt à être bien encadrés (surtout à la descente) car le risque de perdre le sentier est important. Notre guide était bien placé pour le savoir, ça lui est arrivé (après s’être disputé avec un groupe), il a erré seul pendant trois jours sur ces pentes et a été à deux doigts d’y rester… Au beau milieu de la montée, nous nous sommes trouvés derrière un important groupe d’Indonésiens. Et là, il bien fallu quitter le sentier pour les doubler, sinon nous y serions encore ! (ils avaient à peine progressé quand nous les avons recroisés à la descente…). Il va sans dire qu’en marchant à côté du sentier on s’enfonce et on recule encore plus ! Une fois ce dépassement terminé nous avons trouvé facile le reste de l’ascension, en comparaison. 

Nous sommes finalement montés (un peu) trop vite : arrivés à 3600 mètres alors qu’il faisait encore nuit, notre guide a préféré attendre pour gagner le sommet : il est prudent en effet de voir de quel côté partent les projections volcaniques ! Un groupe (français) d’Aventure et volcans, accompagnés d’un guide local, n’a pas jugé utile de prendre de précaution similaire, au grand scandale de notre guide… 

Le sommet du Semeru (appelé aussi Mahameru) n’est pas situé directement au bord du cratère éruptif… une configuration des lieux sans laquelle l’ascension ne serait pas possible, et dont on ne se doute d’ailleurs pas, vu l’aspect de cône parfait de ce volcan, du moins quand on le regarde du côté par lequel on y monte… Il y a eu une explosion au moment où nous étions au sommet, il faut dire que quand on ne s’y attend pas cela surprend ! Bizarrement l’explosion fait moins de bruit qu’on pourrait le penser, c’est juste de la matière qui se retrouve éjectée en moins de temps qu’il ne le faut pour le dire…

Le Semeru explose alors que nous sommes au sommet ! (20 juillet 2007)

Cela étant, si l’on fait abstraction de l’activité volcanique, il faut bien reconnaître que la vue depuis ce volcan est loin d’être aussi belle que depuis le Rinjani. D’autant que les nuages avaient remonté par rapport à la veille, masquant toute la plaine, y compris la caldeira du Bromo dont ne dépassait que le sommet du Penanjakan.

Après un temps finalement assez bref passé au sommet, nous avons entamé la redescente, assez délicate en raison de la pente, du caractère irrégulier du terrain (il n’est pas possible de se laisser glisser comme au Rinjani) et de la présence de ravines de chaque côté du sentier au fond desquelles il est préférable de ne pas tomber… Le Semeru a refait une petite explosion alors que nous étions à mi-pente.

Redescente du Semeru, le 20 juillet 2007

Cette dernière photo, prise du bas mais en direction du sommet, plaît pas mal aux internautes qui visitent mes photos dans Google Earth.

Nous avons enchaîné sur le retour après seulement une (assez) courte pause au camp de Kalimati (le programme prévoyait de s’attarder un peu plus). Ce qui fait que nous sommes arrivés vers 14h à Ranu Pani, après environ 12 heures de marche presque d’affilée ! Lors de ce retour, nous n’avons pas eu le même temps que la veille loin s’en faut (nous avons même eu un peu de pluie…). Mais les vues fantomatiques à travers le brouillard, du volcan puis du lac, nous offraient une autre appréciation du paysage ce qui n’était pas pour déplaire.

Le lac de Ranu Kumbolo à travers le brouillard, le 20 juillet 2007

Je dois dire que je suis assez fier de cette photo du lac de Ranu Kumbolo, qui elle aussi plaît beaucoup aux internautes.

La fin du voyage était uniquement culturelle, avec la visite de Yogyakarta et quelques sites alentour, dans le centre de Java. Ce qui pour nous y rendre a impliqué un long transfert (une journée entière de minibus au lent rythme des axes de circulation javanais). C’est cette partie du voyage qui eût été sacrifiée si nous n’avions pas accepté malgré tout de rentrer par la Garuda.

Sur la route nous nous sommes tout de même arrêtés pour une visite qui n’était pas initialement prévue au programme, celle de la ville de Solo (prononcer Solu), également appelée Surakarta. C’est une ville à l’héritage culturel assez important, autrefois siège d’un sultanat local dont il subsiste notamment un palais, le kraton. Mais nous n’avons pas visité ce dernier (paraît-il moins intéressant que son semblable de Yogyakarta), nous nous sommes contentés des boutiques d’artisanat ainsi que d’un tour en cyclopousse dans les rues de la ville.

Dans les rues de Solo, le 21 juillet 2007

La dernière des photos précédentes montre (les mains de) notre guide en train d’acheter un kriss, poignard traditionnel javanais dont les blessures, dit-on, ne se referment jamais (et dont seul son propriétaire est selon la tradition « habilité » à le sortir de son foureau). Les kriss constituent l’un des symboles de la très raffinée culture javanaise, ils se transmettent de père en fils (un propriétaire ne s’en sépare jamais) et leur fabrication est un processus très complexe. Ils se portent traditionnellement dans le dos, comme on peut le voir plus bas sur une photo prise à Yogyakarta. (Notre guide, qui avait l’air passionné par la question, nous a longuement disserté sur le sujet ; il nous a également parlé des ikat qui sont des étoffes javanaises, elles aussi très complexes et très raffinées (et très recherchées), mais nous n’avons pas eu l’occasion d’en voir).

Si notre guide nous a permis de voir Surakarta qui n’était pas prévue, il nous a quand même (pratiquement) sucré quelques heures plus tard un site qui était bel et bien programmé, et un site de première importance : il s’agit des restes des temples hindous de Prambanan. En fait le guide n’a pas voulu en payer l’entrée et nous nous sommes contentés d’emprunter une petite route latérale pour admirer les temples depuis l’extérieur. Et ce, au prétexte que le tremblement de terre de 2006 aurait fortement endommagé les ruines. Certes, je comprends que notre guide ait eu quelque mal à boucler son budget pour un voyage dont il n’était pas du tout prévu qu’il parte à trois, mais peut-être aurait-il pu nous le dire autrement… voire pourquoi pas nous (re)faire payer l’entrée, normalement incluse dans le prix du voyage. Enfin bref. Nous avons donc fait comme ces touristes d’Europe de l’est qui viennent jusqu’à Paris en Trabant mais ne peuvent se payer l’accès aux monuments… et avons fait le tour du site en essayant de passer inaperçus. Ben voyons ! Nous avons vite été repérés par un policier du coin qui a exigé que nous achetions des tickets… et une vive altercation s’en est suivie avec notre guide. Mais ce dernier était très fort, je ne sais vraiment pas comment il a fait, mais le policier est reparti la tête basse au bout de quelques minutes ! Nous avons tout de même eu le temps de faire quelques photos, et je possédais heureusement un bon téléobjectif.

Les temples de Prambanan, le 21 juillet 2007

Notre guide nous a tout de même prodigué quelques explications concernant ces trois temples, mais j’avoue ne pas en avoir retenu grand chose…

Nous avons terminé à la nuit cette longue journée de transfert, jusqu’à notre hôtel situé en plein cœur de Yogyakarta (qui comme chacun sait se prononce Djodja, moi personnellement je ne le savais pas jusqu’au matin de prendre l’avion mais je dois être un ignare…), une ville de 500 000 habitants environ. Nous sommes arrivés à l’heure de la prière du soir, et au bruit de la circulation et au brouhaha des passants s’ajoutait le chant de dizaines, peut-être de centaines de muezzins, nullement synchronisés entre eux et à l’origine pendant une bonne demi-heure d’un très particulier fond sonore.

Yogyakarta constitue l’un des plus importants centres culturels de l’Indonésie. On y trouve des monuments, de l’artisanat, de la musique de gamelan, des danses, des spectacles de marionnettes, tout une culture aussi riche que celle de Bali sinon plus. Tout ceci sans doute en grande partie lié à l’anomalie politique que constitue la ville. Contrairement à sa sœur jumelle Surakarta, et bien que l’Indonésie soit une république, la ville a conservé son sultan qui y remplit les fonctions de maire et qui administre également une partie de la région. Ce privilège fut accordé à la ville en récompense de l’engagement en faveur de l’indépendance de l’Indonésie, du sultan de l’époque.

Le kraton, palais royal du sultan, ne se visite qu’en partie puisqu’il est toujours habité : les touristes ne pénètrent que dans certaines cours. Les bâtiments sont en général assez esthétiques mais pas très anciens (XVIIIe siècle), une influence occidentale pouvant être détectée sur certains d’entre eux. Certains de ces bâtiments ont été transformés en musée. Musée qui n’est d’ailleurs pas toujours très intéressant, avec ses nombreuses salles à la gloire du sultan (arbres généalogiques, photos de mariages et de visites de chefs d’état étrangers), et qui n’est pas sans rappeler le palais royal de Kathmandou (de l’époque où il y avait encore un roi). 

L’un des bâtiments du kraton de Yogyakarta, le 22 juillet 2007Un garde du kraton de Yogyakarta, en costume traditionnel et armé d’un kriss

Parmi les objets exposés dans le musée, on notera ce palanquin, autrefois utilisé pour transporter les femmes de haut rang et qui pèse plusieurs tonnes. On imagine le nombre de porteurs que cela requérait !

Autre monument de Yogyakarta, le palais aquatique, autrefois utilisé par le sultan pour passer du temps avec ses nombreuses concubines (le sultan est aujourd’hui monogame). Les bâtiments remontent aussi au XVIIIe siècle. Ce lieu est (hélas) très touristique, même si, tentant en cela d’imiter mon père, j’ai presque réussi à en prendre une photo sans personne !

Une vue du palais aquatique de Yogyakarta, le 22 juillet 2007

Revenus ensuite dans le kraton, nous avons assisté sous l’un des préaux de la cour, à un spectacle de danses traditionnelles sur la musique des gamelan. Certes nous n’avons pas bénéficié pour ces danses d’un contexte aussi privilégié qu’à Bali, nous étions ici des spectateurs parmi d’autres (et assez nombreux). Mais notre guide, faisant preuve d’une prévoyance un peu sans gêne, avait pris soin deux heures avant le début du spectacle, de « réserver » quatre places au premier rang en nous y faisant placer nos chapeaux. Un stratagème qui a parfaitement fonctionné, les places étaient toujours libres quand nous sommes revenus dix minutes avant le début du spectacle. Nous avons donc pu admirer et photographier les danses dans ces conditions optimales, même si la configuration du lieu avec une bande de lumière sur-exposée rendait un peu difficile les réglages (le spectacle se déroulant en pleine matinée), ce qui m’est possible en photo mais pas avec le petit appareil me servant à enregistrer des films.

Les danses de Java sont tout aussi sophistiquées que celles de Bali, mais en diffèrent à plus d’un titre. Tout d’abord la musique de gamelan, accompagnée de flûtes ainsi que d’une voix féminine, est bien moins agressive à l’oreille que celle de Bali. Ensuite les danseurs ne sont plus des fillettes mais des adultes, hommes et femmes à peu près à « parité » (pour employer ce vocable politiquement correct). Bien que Java soit musulmane les danses continuent à relever de légendes et de rituels hindous (sans compter l’animisme qui se mêle à tout ça). En cela la culture javanaise est encore plus complexe que la culture balinaise. L’une des danses, exécutée par deux jeunes filles mais qui en fait jouent le rôle de deux hommes, raconte une histoire hindoue que notre guide nous a préalablement racontée, mais je dois bien reconnaître que je n’en ai pas retenu grand chose.

Danse traditionnelle javanaise dans le kraton de Yogyakarta, le 22 juillet 2007

Situé juste à côté du kraton, un autre incontournable de Yogyakarta auquel nous n’avons pas dérogé, son marché aux animaux : les Javanais adorent posséder des animaux exotiques en cage, et c’est ici qu’ils se les procurent. On trouve ici surtout des oiseaux, mais pas seulement, comme le montrent ces photos de créatures un peu moins sympathiques… Notre guide anglo-saxon, au nom du bien-être animal, n’aimait pas beaucoup ce lieu auquel il se sentait néanmoins obligé de nous emmener ; mais je dois avouer qu’en ce qui me concerne je n’avais pas ses appréhensions (vous savez ce que Descartes disait des animaux ?). Mais bon je ne vais pas me risquer à faire de la philosophie…

Oiseaux dans le marché animal de Yogyakarta, le 22 juillet 2007

Notons qu’on ne parlait pas encore de la grippe A en 2007 mais beaucoup de la grippe avaire. Mais circuler au milieu de cette volière ne posait de problème à personne. Normal : l’Indonésie n’émettait aucune statistique à ce sujet !

Les marionnettes de cuir constituent l’une des spécialités de l’artisannat de Yogyakarta. Elles sont utilisées dans des spectacles traditionnels comme celui auquel nous assisterons dans la soirée. La fabrication (à la main) de ces marionnettes, qui sont découpées dans le cuir et peintes, représente des heures de travail.

Une marionnette traditionnelle à Yogyakarta, le 22 juillet 2007

Le fabriquant à qui nous avons rendu visite se trouvait dans un quartier très calme de Yogyakarta, aux petites ruelles dépourvues de circulation : on se serait presque cru à la campagne !

Après les coulisses, le spectacle. Il s’agit en l’occurrence de projections en ombres chinoises, accompagnés de texte parlé et (par moments) de la musique de gamelan. Le spectacle raconte une histoire complexe et dure en général plusieurs heures. Le texte n’est pas prononcé en indonésien mais en javanais, une langue tombée en désuétude depuis l’Indépendance mais dans laquelle on trouve encore inscrites en ville quelques plaques de rues (l’écriture est proche du sanscrit). Comme le spectacle auquel nous avons assisté était en fait organisé pour les touristes, il était possible de se déplacer dans la salle pendant la représentation pour aller voir l’« envers du décor », c’est-à-dire les marionnettistes ainsi que les joueurs de gamelan. En ce qui me concerne toutefois, ce spectacle n’est pas, des trois auquels nous avons assisté dans ce voyage, celui que j’ai préféré. Du reste, l’obscurité rendait très difficile la prise de photos correctes. D’un commun accord, mes deux camarades et moi, avons quitté la représentation bien avant la fin du spectacle pour regagner l’hôtel en taxi.

Spectacle de marionnettes à Yogyakarta, le 22 juillet 2007

Dernière visite de ce voyage, et non des moindres : le stûpa bouddhiste géant de Borobudur. Le sanctuaire étant situé à une heure de route au nord-ouest de Yogyakarta, nous avons une fois de plus quitté l’hôtel aux aurores (4h) afin d’y être pour l’ouverture, avant l’afflux des touristes.

Borobudur est un site archéologique de tout premier ordre. C’est le plus grand stûpa du monde, édifié au VIIIe siècle de notre ère par la dynastie Saïlandra (contemporaine de la dynastie hindoue qui édifia Prambanan). Par la suite les bouddhistes furent vaincus et le site disparut dans la jungle, pour n’être redécouvert qu’en 1815. L’édifice, en pierre volcanique, est constitué d’une sorte de pyramide de 188 m de côté, pyramide qui comprend cinq étages intermédiaires, des galeries faisant le tour du monument. Ces galeries sont toutes décorées de bas-reliefs relatifs au bouddhisme, avec également de très nombreuses statues de Bouddha, plus ou moins bien conservées. Le sommet de Borobudur contient un grand stûpa au centre, entouré d’un grand nombre de stûpas plus petits.

Vue partielle du stûpa géant de Borobudur, le 23 juillet 2007

Voici quelques vues des galeries intermédiaires avec des exemples de bas-reliefs (toutes sont ainsi décorées sur l’intégralité de leur longueur). Notre guide, très branché bouddhisme (ce qui n’est pas trop mon cas !), nous a effectué les commentaires lui-même. Et il a tenu a nous montrer pour nous le commenter (et après l’avoir tout de même recherché assez longuement…) un bas-relief bien particulier, qui représente l’illumination originelle du Bouddha placé sous un arbre. Bouddha aurait vécu (au Népal et en Inde) au Ve siècle avant notre ère.

L’une des galeries intermédiaires du stûpa de Borobudur, le 23 juillet 2007

Autour du stûpa central situé au sommet, se trouvent un grand nombre de petits stûpas creux, chacun d’entre eux renfermant une petite statue de Bouddha que l’on peut distinguer à travers le grillage de pierre (mais toutes ne sont pas parfaitement conservées). L’un de ces petits stûpas est pour une raison m’ayant échappé, plus sacré que les autres ; le fait le toucher le Bouddhâ qu’il renferme assurerait une bonne réincarnation (mais mon karmâ étant définitivement compromis, je me suis abstenu…).

Petits stûpas secondaires au sommet de la pyramide de Borobudur, le 23 juillet 2007

C’en était maintenant fini du programme officiel du voyage. Pour occuper la fin de la matinée, notre guide nous a proposé d’aller prendre un petit déjeuner dans un grand palace de la région, l’hôtel Amanjiwo, disant vouloir reconnaître les lieux pour éventuellement y amener des clients par la suite. Mais à 900 $ la nuit il ne doit pas s’agir du même genre de clientèle que nous ! Lorsque nous sommes arrivés sur les lieux, le gardien a commencé par passer notre véhicule avec une pôele à frire : nous avions sans doute des têtes de terroristes… On nous a ensuite servi notre petit déjeuner (nous étions presque seuls dans la grande salle à manger), le maître d’hôtel avait l’air particulièrement suspicieux à notre égard, jusqu’à ce que nous ayions payé la note. Enfin, une fois cette formalité accomplie et conformément à ce que notre guide avait préalablement négocié, nous avons pu visiter une suite : toutes les suites ont vue sur le stûpa ainsi que sur le volcan Merapi ; et, excusez du peu, sont dotées d’une piscine individuelle ! Le tout bien sûr, à l’abri des regards. Mais bizarrement, il n’y a pas de télévision, c’est semble-t-il un choix de la direction. Notons que nous n’avons pas eu le droit de photographier cette suite, des fois qu’ensuite nous aurions vendu les photos à la concurrence.

J’ai brièvement évoqué le volcan Merapi qui domine la région de Borobudur : c’est l’un des volcans les plus dangereux au monde, son dôme de lave explose régulièrement envoyant sur ses flancs des coulées pyroclastiques mortelles. Et comme cette boue volcanique est très fertile, beaucoup de paysans habitent sur ses flancs. L’ascension du Merapi (paraît-il assez difficile) est souvent au programme des voyages organisés, du moins quand il n’y a pas d’éruption. Mais ce n’était pas notre cas, il faut dire que notre périple avait déjà été plus que chargé (et nous avons tout juste pu apercevoir le volcan, tant depuis Borobudur que depuis l’hôtel, en raison du brouillard qui recouvrait la région ce matin là). 

Je ne m’appesantirai pas sur la fin du voyage : le retour sur Denpasar par cette si peu sûre compagnie Garuda Indonesia (ma voisine dans l’avion, il me semble originaire d’Amérique latine, faisait le signe de croix au moment du décollage…), vol au cours duquel nous avons pu revoir le Semeru qui nous a salués d’un spectaculaire panache de fumée (malheureusement je n’avais pas l’appareil à portée). À Denpasar, un repas de poisson dans un restaurant situé sur la plage, à l’entrée de la presqu’île (au-delà de l’aéroport). Et enfin un retour cette fois-ci sans encombre par la Cathay Pacific et via Hong-Kong.