Dolomites

Dolomites, citadelles alpines

J’ai attendu fin août début septembre pour partir en vacances d’été 2015. Et je ne suis pas parti très loin, je suis resté en Europe et ai pris la direction des Dolomites, un célébrissime massif alpin dans lequel je n’avais encore jamais eu loisir de me rendre. Je souhaitais découvrir les Dolomites sans effectuer d’exploit sportif (d’avance je savais goûter très peu les via ferrata) et j’avais donc choisi chez Terres d’Aventure un itinéraire que je croyais répondre à ce besoin. Mais là, j’avoue que j’ai été assez contrarié car le guide (Laurent C.), souhaitant manifestement se faire plaisir, a pris un certain nombre de libertés avec le programme et nous a embarqués dans des itinéraires beaucoup plus engagés que ce à quoi je souhaitais me tenir. Je lui en ai pas mal voulu. Heureusement que le temps mitigé dans la deuxième partie du séjour a mis un frein à ses ambitions.

Terres d’Aventure nous donnait rendez-vous en milieu de journée à la gare de Bressanone (ou plutôt Brixen, puisque dans cette région on parle en fait allemand). J’ai donc dû organiser moi-même mon transfert jusque là, en choisissant entre le train de nuit (ce dont je n’avais pas trop envie) et l’avion. Pour ce second choix, le plus rapide était d’arriver à Vérone par Air France mais c’était assez cher (j’avais néanmoins étudié sérieusement cette possibilité, jusqu’à rechercher quelle œuvre lyrique était représentée aux arènes ce soir là). Finalement j’ai choisi de passer par Venise avec un vol EasyJet bien meilleur marché, et en ai profité pour effectuer de cette ville une visite express que j’ai décrite sur une autre page. J’ai ensuite pris le train de Venise-Santa Lucia à Brixen avec changement à Vérone. À partir de Vérone le convoi se rendait en fait en Allemagne, et j’ai été étonné du genre de population qui se trouvait sur les quais (des smalas africaines ou proche-orientales avec femmes multiples et voilées suivies d’une nuée d’enfants). Certes nous étions en pleine crise des « migrants », les médias ne parlaient que de ça, mais là, c’était du concret ! Je savais depuis un moment que la France n’était plus la France, j’ai découvert au cours de ce voyage que l’Italie n’était plus non plus l’Italie.

Le train était à peu près à l’heure (a contrario de la réputation peu flatteuse des chemins de fer italiens) et j’étais donc largement à temps pour le rendez-vous. J’ai vite repéré quelques randonneurs attendant avec leurs sacs dans des jardins publics proches de la gare, et en outre francophones : mes compagnons de voyage (le guide est arrivé peu après). Tous étaient venus en voiture individuelle, et tous étaient arrivés la veille au soir, prenant le temps de découvrir cette localité très germanique dans laquelle l’Italie ne semble avoir apporté que deux choses : le drapeau sur les bâtiments officiels, et (quand même) les spaghetti et le café. Les habitants parlent entre eux l’allemand, et un allemand beaucoup plus académique que ce que l’on peut entendre par exemple en Suisse ; il est possible d’en comprendre quelques bribes avec le simple niveau scolaire qui est le mien.

Il faisait un temps absolument magnifique qui devait durer trois jours. J’ai commencé à prendre des photos depuis le bus (public) qui nous conduisait à Zannes (dans le Val Funes), le point de départ de notre randonnée. La vue sur le Geislergruppe était déjà magnifique.

La première étape n’était qu’une très courte mise en jambe d’1h30 jusqu’au refuge de Gampenalm. Une montée à travers de verdoyants alpages, toujours au pied du Geislergruppe.

Arrivés au refuge, une surprise nous attendait (mais il faut dire que le refuge est accessible en voiture). Loin de trouver l’ambiance sportive austère des refuges de haute montagne, il y avait là une sorte de kermesse, avec une sono diffusant de la musique d’inspiration traditionnelle, des couples assez âgés qui dansaient, et… de jeunes et jolies serveuses en costume traditionnel.

Il faisait toujours grand beau le lendemain matin. C’est ce jour là que le guide (qui nous connaissait pourtant à peine !) nous a engagés dans un itinéraire aérien et engagé au sein du massif Aferer Geisler, la haute route Günther Messner (du nom du frère de l’himalayiste Reinhold Messner, né à Brixen et mort en 1970 au Nanga Parbat au Pakistan). Le programme prévoyait normalement de faire le tour par la base de ce même massif Aferer Geisler.

Nous avons commencé par redescendre une partie des alpages gravis la veille.

(Leçon de botanique du guide sur le pin d’Arolle vivant en symbiose avec un oiseau, le casse-noix moucheté).

Ensuite nous avons gravi le massif par un étroit sentier mais qui restait encore « débonnaire ».

Le paysage devient plus minéral.

Les réjouissances commencent maintenant. Il faut gravir la falaise en face par le sentier câblé qui s’y faufile (et qu’on ne distingue pas à cette distance).

Évidemment, dans tous ces passages j’ai dû mettre l’appareil dans mon sac (la seconde des photos précédentes a été empruntée à Bruno Voyer). Les photos suivantes ont été faites au pique-nique, après la falaise la plus vertigineuse.

Encore une falaise câblée (moins difficile) dans l’après-midi. À droite notre guide, visiblement content de lui.

La journée se terminait par une petite échelle (seconde photo).

Nous avons dormi au refuge de Genova (pourquoi s’appelle-t-il ainsi ? mystère), très proche à vol d’oiseau de celui de Gampenalm d’où nous étions parti. Ce refuge est très fréquenté et beaucoup moins convivial que celui de Gampenalm.

Le jour suivant fut encore une journée de très beau temps ; mais ce fut la dernière. C’était aussi l’étape la plus longue, avec une longue progression sur un plateau assez minéral (contournement du Lantental). Il y avait aussi une unique « réjouissance » (passage câblé avec une petite échelle), pas trop difficile celle ci.

Le début du parcours, éclairé par la lumière matinale, nous offrait encore une très belle vue sur le Geislergruppe.

Nous nous dirigeons vers le col de la Roa (éboulis en face) que nous allons franchir.

Montée dans les éboulis. Notre guide a enguirlandé en anglais deux « touristes » qui étaient sortis du sentier.

Nous ne nous sommes pas attardés au col. Laurent nous a fait repartir tout de suite pour franchir la petite via ferrata avant les autres groupes et pour éviter de recevoir des pierres. Mais une fois dans le passage, nous étions lents et les autres voulaient nous doubler… (photo : Bruno Voyer)

Une fois sur le plateau, nous sommes dans un univers très minéral. C’est toujours le Geislergruppe qu’on aperçoit derrière.

Jolie vue sur une zone particulièrement découpée, avec la vallée de Vallunga en contrebas.

Traversée (très momentanée) d’un paysage pastoral.

Il y a quand même de haute falaises en contrebas.

Nous avons pique-niqué à côté du refuge de Puez, très populeux ! L’avantage étant de pouvoir déguster un café italien à la fin du repas.

Le troisième des trois drapeaux est celui du Tyrol du sud (Südtyrol), la région où nous nous trouvons et qui était autrichienne avant la 1re Guerre Mondiale.

Ce petit lac est l’un des seuls des Dolomites (et le seul que nous ayons rencontré au cours de ce séjour). Dans ce relief calcaire l’eau s’infiltre presque systématiquement.

La vallée rouge, dans laquelle notre imaginatif guide voyait un décor de western.

Le chaos de Contessina. Malheureusement, le temps commençait à se couvrir, annonciateur des mauvais jours à venir.

Arrivée au col de Gardena où se trouvait notre gîte. (Pas mal de remontées mécaniques qui font partie de l’immense domaine skiable des Dolomites.)

Au col les panneaux indicateurs étaient trilingues. La troisième langue est le ladin, un idiome local proche du romanche.

Le lendemain, comme annoncé le temps était couvert. Mais la pluie n’est pas tombée immédiatement, nous laissant le temps de franchir le passage le plus engagé (la via ferrata du val Setus) qui se trouvait en début d’étape.

Évidemment je n’ai pas pris de photo de la voie. Laquelle s’est avérée moins difficile que je ne l’avais craint. Ici, une fois arrivés en haut.

Halte pour un cappuccino réparateur au refuge de Pisciadù qui disparaissait dans le brouillard. Pas le temps toutefois de se laisser aller.

Le temps avait empiré quand nous sommes repartis. Il y avait encore devant nous une petite via ferrata, pas dure. Suivie d’encore une montée (nous avons atteint le point le plus élevé du circuit, 2900 m environ).

Pour la descente (par le val Lasties), nous n’avons pas échappé à une pluie soutenue. Heureusement le sentier n’était pas trop glissant.

Laurent nous a accordé un réconfort bienvenu : plutôt que de pique-niquer sous la pluie, nous sommes entrés dans le restaurant de Pian Schiavaneis pour y déguster un plat de spaghetti. (En ressortant, le soleil était très provisoirement revenu).

Conformément au programme, nous avons pris ensuite un bus public jusqu’au col de Sella, histoire de nous épargner quelques kilomètres de route. Puis nous avons gagné (chacun à son rythme, donc en nous espaçant beaucoup) le refuge Friedrich August (accessible par une route en terre). Les souterrains qui en relient les différents bâtiments sont étonnants, mais je ne pense pas qu’il s’agisse comme en Suisse d’abris anti-atomiques.

Toujours un temps mitigé le lendemain. Mais grâce à cela le guide s’en est tenu au programme, nous épargnant des extras engagés auxquels nous n’aurions pas coupé autrement.

Nous avons commencé par gravir le col de Sassolungo (par ailleurs desservi par une remontée mécanique). La montée est régulière mais soutenue.

Il y a un refuge (vendant du cappuccino !) au col.

L’autre versant (vallon de Sassolungo) est très minéral. Le sentier à droite n’est ni notre itinéraire, ni même celui d’une quelconque via ferrata. Ce semble-t-il le départ d’une voie d’ascension.

Nous longeons ce qui (d’après le programme publicitaire de Terdav) serait le plus grand alpage d’Europe. Une affirmation qui avait pour effet d’agacer le guide.

Montée un peu fastidieuse jusqu’au refuge Zalinger (noir de monde, malgré la météo), cappuccino. Puis, progression sous une pluie battante le long de cette crête alpestre.

L’étape se terminait par une montée assez soutenue le long d’une route en terre. Là encore nous nous sommes espacés, les plus jeunes du groupe faisant la course avec le guide. Le refuge d’Alpe di Tires était tout neuf mais ne m’a pas trop plu, avec ses douches sans porte, ses salles de lavabos mixtes où les mamies allemandes prenaient leurs aises, ses échelles d’accès aux lits presque aussi casse-gueule que les via ferrata du sentier, et le menu abscons du restaurant où ce que qui arrivait dans son assiette n’avait que peu de rapport avec ce qu’on croyait avoir commandé.

Une heureuse surprise nous attendait le lendemain matin au réveil. Après une nuit au cours de laquelle la pluie battante ne s’était pas interrompue un instant, le ciel s’est retrouvé dégagé et lessivé. Une très belle lumière, et une visibilité excellente nous laissant apercevoir des sommets autrichiens recouverts de neiges éternelles.

(Parmi ces sommets se trouve sans doute le Großglockner mais je ne suis pas en mesure de le reconnaître)

(Il était même tombé un peu de neige fraîche pendant la nuit).

Ce beau panorama devait être très éphémère. Nous avons franchi un col nous conduisant au cœur du très minéral massif du Rosengarten, j’imagine ainsi nommé par antiphrase. Traversée d’un vallon tout en caillasse avant d’arriver dans le brouillard au refuge du Grasleitenpass (passo Principe).

Ce refuge blotti au creux d’une falaise est absolument charmant et très convivial. Cappuccino délicieux. Et il n’y avait pas encore trop de monde à cette heure matinale

Absolument incroyable mais vrai : le refuge de passo Principe est équipé du tout-à-l’égout !

Plutôt que d’arriver très en avance au refuge de Stella Alpina, lieu de notre dernière nuit dans les Dolomites, le guide nous a fait faire un détour par les alpages (pique-nique, observation de marmottes et de mouflons). Une fois encore, le temps mitigé nous a fait échapper à une via ferrata carabinée.

La dernière étape, nous l’avons effectuée sous une pluie presque continue. Laurent était en outre très inquiet car la météo avait annoncé une descente de l’isotherme jusque vers 2000 m. Donc, risque de trouver de la neige pour le franchissement du col de la Zigolade (alt. 2550 m), la clef de la dernière étape.

En fait, si nous avons effectué toute cette montée sous une pluie battante (et à un rythme soutenu !), nous n’avons pas été gênés par la neige fraîche, effectivement présente mais en très petite quantité.

On aura noté les quelques mouflons et chamois aperçus pendant la montée.

Début de la descente.

Curieux passage sous une arche naturelle.

Arrivée au Rotwandhütte (refuge Roda, du club Alpin italien) pour une assez longue halte cappuccino.

La pluie s’est un peu calmée pour la descente finale. Le trek se terminait au Karerpass (ou col Costalunga). Après que nous eûmes récupéré nos bagages, un bus public devait nous amener à la ville de Bolzano (sans Weierstraß !), où passait un peu plus tard un train direct pour Venise.